Boston, Charles Street. Un vieux bâtiment datant de 1850 est transformé en hôtel. A quoi servait-il auparavant ? On pourrait penser qu’il s’agissait autrefois d’une église ou d’une bibliothèque. Mais on est loin d’imaginer que l’hôtel était une prison.
Derrière de beaux murs de granit et une petite tour ronde très jolie se cache un pénitencier gigantesque qui a servi 120 ans.
J’entre dans l’ancienne prison qui s’appelle, ironie du sort, Hotel Liberty. Je cherche des yeux quelque chose qui rappelle le passé de ce bâtiment. En préservant ce lieu, on a voulu à la fois conserver son cachet historique et éviter de choquer les nouveaux occupants. Au premier étage, les numéros de cellules, les barreaux et les portes étroites sont éclairés. Quelques cellules ont été préservées mais leurs portes sont murées. Ce n’est pas un musée, simplement une curiosité, un décor où le regard se pose sans s’attarder. En face, le restaurant de l’hôtel porte un nom qui évoque le bruit des menottes. Le concept de marketing est réussi. Il me fait sourire mais mon expression est triste. Hier, on mourait pour s’échapper d’ici. Aujourd’hui, on meurt d’y séjourner.
À côté du fleuve où voiliers et péniches voguaient, des prisonniers ont dû envier les voyageurs, si proches de l’eau et de cette inaccessible liberté qui ne pouvait qu’être un rêve pour eux. Le cadre des portes et des fenêtres est en granit. On croirait entendre dire les gardiens : « Vos cuillères sont inefficaces contre la pierre. Regardez, sentez, respirez, survivez, mais abandonnez tout espoir de vivre. »
À l’hôtel, une idée m’est venue à l’esprit. Je suis dans le Nouveau Monde, celui des filles de joie, des brigands et de la noblesse exilée. J’ai pensé à ces bagnes du Nouveau Monde nommés Australie ou Canada …
J’ai entendu un jour la phrase suivante : « 99 p. cent des prisonniers prétendent qu’ils sont innocents. » Et si c’était vrai ? Et si c’était là la raison qui fait qu’un pays comme le Canada est aussi tolérant et développé ?