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Le temps d’un Perrier avec HMB

Pour débuter cette nouvelle année, Le Délit, le Daily, et le Tribune étaient conviés à la table de la fringante Heather Monroe-Blum, rectrice de McGill.

Le Délit (LD): Dans les dernières années, l’Université McGill a adopté une politique de développement durable. Quelles sont les actions qui ont été prises cette année dans le cadre de ce plan de développement ?

Heather Munroe-Blum (HMB): Il y a eu de grands progrès réalisés par rapport à notre plan de développement durable, même si nous ne sommes pas encore aussi avancés que nous le désirerions. Nous ne sommes pas aussi avancés que ne le désire la communauté étudiante ; il y a beaucoup de choses à faire ici à McGill, à Montréal et au Québec pour [faire] avancer [la cause de] l’environnement. Les actions entreprises sont très variées : installation de lumières actionnées par détecteur de mouvement, la fermeture des lumières à l’extérieur des heures d’ouverture, l’intensification du recyclage sur le campus. Nous avons aussi investi une somme d’argent considérable dans la construction du nouveau Life Sciences Complex, élaboré à partir de standards environnementaux très élevés, et nous comptons continuer à l’avenir de respecter cette perspective de développement durable dans tous nos projets de réfection ou de construction. En ce qui concerne le projet de campus sans voiture, nous avons diminué le nombre de places de stationnement disponibles. Nous travaillons également avec la Ville [de Montréal] à améliorer l’accès aux transports en commun tout autour du campus, par exemple entre le campus Macdonald et celui du centre-ville. La compétition entre les différents établissements encourage à prendre de nouvelles initiatives environnementales, et je crois que McGill peut jouer un rôle de leader à ce niveau, pour Montréal et la province en général.

LD : Il y a récemment eu des problèmes de ventilation dans le bâtiment Leacock, et on peut observer sur le campus de nombreux chantiers. Les infrastructures vieillissent, et l’université est en retard sur son plan de réfection. Pourriez-vous nous expliquer les causes de ce problème, ainsi que les actions entreprises pour y remédier ?

HMB : Tout d’abord, il n’y a pas de problème présentement, à ma connaissance (concernant le bâtiment Leacock). On m’a assurée en décembre dernier qu’une enquête avait été menée sur cet incident et que les mesures de sécurité nécessaires avaient été prises ; je crois qu’il y a eu un malentendu à ce propos. Cela dit, votre question soulève un problème général bien réel pour McGill. Nous avons pour plus d’un demi-milliard de dollars de travaux de réfection en retard, et c’est un défi énorme auquel fait face l’université. Les gens me demandent souvent : « Comment pouvez-vous vous plaindre de la contribution financière du gouvernement, alors que McGill se classe très bien dans les palmarès et attire de bons élèves ? » Pour mieux comprendre, il suffit de regarder l’état de nos infrastructures. Environ 30 p. cent des bâtiments du campus du centre-ville que nous utilisons de manière intensive à des fins pédagogiques ont été construits avant 1940. La valeur historique de nos bâtiments, ainsi que la réglementation en cours concernant la conservation des espaces verts, compliquent la tâche davantage et augmentent les coûts. En lien avec votre question précédente, il est intéressant de noter que les lois de conservation du patrimoine nous dictent de remplacer les fenêtres de nos anciens bâtiments avec des fenêtres exactement semblables, alors que ce n’est pas la bonne chose à faire du point de vue environnemental.

LD : Un article du McGill Reporter paru en février dernier [« Le français sur la sellette à la Francofête », 7 février 2008] rapportait que la communauté étudiante francophone avait diminué dans les dernières années, passant de 25 à 17 p. cent. (D’après les commissaires francophones de l’AÉUM). Comment expliquez-vous ce phénomène ?

HMB : J’ai beaucoup de difficulté à croire cela. Année après année, nous accueillons environ 50 p. cent d’étudiants québécois, doit la moitié est francophone, et nous faisons de notre mieux pour maintenir cet équilibre. De plus, nous avons beaucoup d’étudiants internationaux qui utilisent le français comme langue maternelle, et qui ne sont pas comptabilisés dans les statistiques. Je ne crois pas que ce soit vrai.

LD : Donc, la communauté étudiante francophone se porterait bien à McGill ?

HMB : Oui, bien sûr. Dans bien des cas, plus de soutien est disponible : services d’orientation, un bureau d’aide qui leur est consacré. J’ai tenu depuis mes débuts en tant que rectrice à ce que toutes nos communications publiques, ou presque, soient bilingues, à ce qu’il y ait de nombreuses opportunités pour les étudiants francophones. Plusieurs de nos professeurs ont le français comme langue maternelle, et plusieurs autres le parlent en tant que langue seconde. Je crois donc qu’il serait inapproprié de conclure que McGill régresse à ce niveau. Ce qui pourrait arriver, cependant, est que la demande et l’intérêt pour les services aux francophones augmentent. Dire que la taille de la population étudiante francophone ou les services aux francophones aient diminué à McGill serait une erreur.

LD : En ce qui concerne les services aux étudiants francophones, ne pensez-vous pas justement que ce serait une bonne idée d’indiquer sur tous les plans de cours qu’il est possible d’écrire ses travaux et ses examens en français à McGill, comme c’est déjà fait au sujet de l’intégrité académique ? Beaucoup d’étudiants ignorent cette possibilité.

HMB : C’est une idée très intéressante. Je ne sais pas s’il serait techniquement possible de le faire sur l’ensemble des plans de cours, mais je comprends votre idée. Il est bel et bien possible que cette opportunité soit méconnue, dans la communauté québécoise en général et même parmi nos étudiants francophones. J’appuie votre idée, et je crois qu’il est vrai que nous devrions mieux faire connaître cette possibilité et nous assurer qu’elle est rappelée aux étudiants.

LD : McGill opère une centralisation des services alimentaires. Un nouveau poste administratif a été créé à cet effet, et un nouveau restaurant Subway vient d’apparaître dans la Faculté des arts. Quelle est à votre avis la place des initiatives étudiantes dans les services alimentaires sur le campus ?

HMB : J’ai pu observer une amélioration des services alimentaires à l’université depuis que je suis en poste. Je crois qu’il est très important d’avoir des standards pour la gestion de ces services et la qualité de la nourriture ; ces standards ont amené de nombreux changements dans la provenance des services alimentaires. Si, il y a dix ou quinze ans, ces services étaient offerts au niveau local, que ce soit par les étudiants eux-mêmes ou par leur faculté, ils ne le sont plus aujourd’hui dans la grande majorité des cas. Depuis les années quatre-vingt-dix, nous avons tenté d’offrir des repas plus variés et de meilleure qualité, d’avoir en place un inventaire des services alimentaires de l’université, et tout cela a mené à une centralisation dans ce domaine. Ce qui est important pour nous est la consultation et le dialogue maintenant possible avec les étudiants, par l’entremise du nouveau directeur des services alimentaires.

LD : Pourriez-vous élaborer sur cette idée que la qualité de la nourriture sur le campus dépend de la centralisation des services alimentaires ?

HMB : Sans aller dans les détails, en raison du très grand nombre de services offerts à l’université, je peux vous donner un exemple. Il y a déjà eu par le passé des services alimentaires menés par de simples familles qui cuisinaient à la maison pour vendre la nourriture sur le campus. Même si d’un certain point de vue une cuisine maison peut paraître une bonne idée, elle l’est moins du point de vue de la sécurité et de la salubrité des aliments. Nous nous devons de respecter des règles de sécurité strictes.

LD : Pensez-vous que cette centralisation était vraiment nécessaire dans tous les cas, par exemple celui du Architecture Cafe, où des inspections étaient menées régulièrement et où il n’y a jamais eu de problèmes ?

HMB : Nous avons toujours une responsabilité par rapport aux services offerts aux étudiants, et qu’il n’y ait jamais eu de problèmes ne veut pas dire qu’ils n’auraient pas pu survenir. J’aime la structure qui a été mise en place par le travail du premier vice-principal exécutif adjoint [PVPEA] avec les groupes étudiants, et je crois que de déplacer les services alimentaires à l’extérieur de l’administration et de la finance, pour les situer sous la responsabilité du PVPEA, a été une action importante. Il y a bien entendu toujours des compromis.

Les questions étaient posées en français, et les réponses de la rectrice, tantôt en français, tantôt en anglais, ont été traduites au besoin. 


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