Le jeudi 8 octobre dernier, l’Association des étudiants de l’Université McGill (AÉUM) a tenu une table ronde pour discuter des critères déterminant si un événement peut avoir lieu ou non sur le campus, suite à une conférence controversée organisée par le club étudiant anti-avortement Choose Life.
Le groupe avait suscité la polémique début octobre en annonçant une conférence donnée par José Ruba, co-fondateur du Centre canadien pour la réforme bio-éthique, intitulée « Échos de l’Holocauste ». Au cours de sa présentation, M. Ruba a comparé la pratique de l’avortement au génocide perpétré par les Nazis pendant la Seconde Guerre mondiale. La conférence devait avoir lieu dans les locaux de l’AÉUM, mais elle fut censurée lors de la réunion bimensuelle du Conseil législatif de celui-ci le 1er octobre dernier. La motion de censure a été votée en réaction à ce que l’AÉUM craignait être un événement qui violerait sa Constitution et sa politique d’éthique.
Faisant fi de ladite motion, le club Choose Life a quand même décidé d’organiser la conférence dans un local étant hors de la jurisdiction de l’AÉUM, dans le bâtiment Leacock, à la même date et heure et montrant le même contenu que prévus. En pleine conférence, l’AÉUM a sommé les organisateurs de clore l’événement et a fait appel à l’administration pour tenter d’y mettre fin. Cependant, l’administration a décidé de laisser libre-cours à la conférence.
Le professeur Morton J. Mendelson, vice-principal exécutif adjoint à la vie étudiante et à l’apprentissage de l’Université McGill, a le dernier mot sur les événements qui se tiennent sur le campus. C’est pour cela qu’il a été invité à discuter avec les étudiants sur les « limites du tolérable ».
M. Mendelson a cependant dit ne « pas savoir où est la limite » raisonnable et acceptable pour un événement étudiant de ce genre, laissant aux étudiants le soin d’exprimer leurs points de vue sur la question. « Lorsque je n’ai pas la réponse, je consulte les autres », a‑t-il fait savoir. Il a également tenu à préciser que « les limites sont vagues » et que « l’Université est apolitique, séculaire et ne suit pas une ligne idéologique, mais [comprend] que certains étudiants veuillent s’exprimer sur [des] sujets » tels que l’avortement.
Dans cette perspective d’expression des opinions divergentes, Mohammed Ashour, étudiant à la maîtrise en neuroscience, a lancé qu’«il ne devrait pas y avoir de place pour la propagande sur le campus, mais plutôt pour un dialogue ». Il a ajouté que « la polémique peut parfois être une bonne chose, mais qu’il ne faut pas mélanger l’émotionnel au rationnel ».
Sarah Woolf, sénatrice de la faculté des arts et conseillère de l’AÉUM, a jugé qu’«il n’y avait pas de place pour le dialogue [lors de la conférence du club Choose Life]» et s’est dite « profondément déçue par la façon dont l’administration a géré l’affaire ». M. Mendelson a répondu qu’il n’y « avait pas de place pour le dialogue puisqu’il y avait des perturbateurs qui empêchaient le déroulement de l’événement ». Il a déclaré partir du principe que la présence à la conférence était laissée à la discrétion de chacun.
Corey Omer, conseiller de l’AÉUM pour les clubs et services, a dit souhaiter une « plus grande régulation » des activités et événements ayant lieu sur le campus. Il a noté que, bien que « la limite soit, au final, subjective, une limite devrait être fixée, tout en respectant la politique d’éthique » de l’AÉUM. À la fin de cette table ronde, l’AÉUM est revenue à son point de départ, n’ayant pas su prendre le toreau par les cornes et aborder directement la question qui faisait polémique.
Le club Choose Life n’a pour l’instant subi aucune « sanction » depuis. Le débat sur la liberté d’expression et la liberté de rassemblement est relancé.