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La pause culturelle

Sortir la campagne de la fille

Depuis le début de la session, et donc depuis que j’écris cette chronique, il y a une facette de ma personne que je tente de garder secrète. Toutefois, amis lecteurs, comme c’est le « spécial région » et que de toute façon je quitterai l’univers mcgillois dans moins d’un mois, je sens la soudaine envie de me confier à vous. Je fais donc de vous mes confidents –le temps d’une chronique, du moins– dans cette affaire des plus scabreuses.

Le fait est que, à chaque semaine, je vous entretiens de la beauté de l’art, de sa finesse et des bonheurs qu’il occasionne. Nous aimerions tant clamer haut et fort que nous sommes des artistes avec la même conviction que Christian Bégin. Si seulement. Mais bon, l’histoire n’est pas là.

Disons plutôt que derrière toutes ces propositions de sorties hautement culturelles et urbaines que je vous fais, je tente de dissimuler un lourd passé : celui d’être fondamentalement une « fille de la campagne ». Et quand je dis campagne, prenez le mot dans son sens le plus rural possible (voir la définition de « trou » en annexe). J’entends déjà vos exclamations, vos cris de désarroi. Je sais, je sais.

Je n’ai d’autre choix que de vous affirmer que votre chroniqueuse culture préférée a grandi en buvant de la Molson Ex et en écoutant du AC/DC.

J’entends vos accusations, mes enfants, je les entends : région ne veut pas dire manque de culture et de raffinement. C’est bien vrai la plupart du temps, mais je dois avouer que ce n’est pas l’image qui me reste de mon patelin natal.

J’aimerais tant vous dresser le portrait d’une région stimulante, où l’air est pur et bon, où l’herbe est tellement verte que vos yeux ne peuvent le supporter et où le ciel est tellement plus lumineux que nulle part ailleurs. Toutefois, j’ai grandi au Centre-du-Québec. C’est où ça ? C’est la question à laquelle je dois répondre constamment ; vous chercherez par vousmêmes.

Le fait est qu’il ne se passe pas grand chose au Centre-du- Québec et que le bar du coin est le divertissement le plus culturel qui soit (ben quoi, y’a un juke box) et le casse-croûte le seul restaurant.

Mais bon, j’ai bien beau rire de mon villâââge natal, reste que je porte en moi des marques indélébiles de cette éducâââtion. Lesquelles ? Celle de courir pour traverser la rue entre deux feux de circulation, celle de toujours avoir peur quand j’entends plusieurs sirènes d’ambulance et de camions de pompiers et celle de pogner les nerfs quand les Montréalais se décident à faire des concertos de klaxon. Sentez-vous bien libre de rire. Mais pour le moment, je préfère être ridicule en ville que de m’ennuyer en campagne. 


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