Loin de moi l’idée de Me détourner de la sphère culturelle, mais n’est-il pas un meilleur prétexte que la Journée internationale des femmes pour faire digression ? Probablement que oui. J’ai maintes fois considéré que les journées mondiales étaient trop nombreuses. Ces commémorations orchestrées par qui veut bien les déclarer ponctuent les mois, les semaines et le quotidien, à tel point qu’elles passent inaperçues dans la plupart des cas. Banque sans fond dans laquelle pigent les médias en manque d’inspiration ou moment idéal pour les politiciens de montrer leur sympathie envers une cause que, souvent, ils ignorent durant le reste de l’année ? Grande était ma réticence, chers lecteurs, à saisir cette occasion pour traiter d’un sujet sur lequel je me questionne constamment.
Or, parmi toutes les déclarations et les discours qui ont entouré la Journée internationale des femmes, l’une d’entre elles, ayant suscité bien peu de réactions, m’a beaucoup interpellée. Autant critiquée au sein de son parti que dans l’opinion publique, Pauline Marois a tout récemment confié à la Presse canadienne « qu’être une femme avait nuit à son ascension au pouvoir ». L’assertion n’a en soi rien de bouleversant, dévoilant au grand jour ce que l’on peut penser tout bas sur un milieu qui, malgré les apparences, peine à s’adapter à la présence des femmes. Les statistiques nous prouvent bien que le nombre de femmes élues à l’Assemblée nationale augmente d’élection en élection, que de plus en plus de ministères leurs sont attribués. Mais qu’en est-il du sentiment général et du battage médiatique entourant une femme qui aspire à être la prochaine première ministre du Québec ?
Sentant toujours une grande « réticence » à son endroit malgré ses trente ans de carrière politique, la chef du Parti québécois prétend avoir été contrainte d’adopter une attitude et une image qui ne lui ressemblaient pas. Longtemps jugée selon sa garde robe colorée et cette étiquette de bourgeoise snob dont elle n’a jamais pu définitivement se départir, elle a déploré pour une des premières fois ce moule dans lequel elle a eu à se placer pour faire entendre ses idées et pour être considérée comme une candidate valable à la chefferie du parti. Elle admet même avoir peiné à adopter « l’uniforme » fade et, admettons-le, assez peu féminin, du politicien. On a souvent évoqué son manque d’agressivité dans les débats et les périodes de questions, mais elle estime que cette attitude va à l’encontre de sa propre nature. Malgré tout ce que l’on peut penser d’un parti qui a probablement grandement besoin de se renouveler et de sa dirigeante, j’ai trouvé le témoignage de Mme Marois prenant de par la sincérité qui s’en dégageait.
Au-delà de la politique, j’ai cru entendre la femme à qui l’on reprochait de ne pas agir « en homme » pour être prise au sérieux dans un milieu qui laisse rarement place à la féminité, quelle qu’elle soit. Sommes-nous donc réellement ouverts à ce qu’il y ait une première ministre à la tête du gouvernement, quelque soit le parti qu’elle représente ? Reprocherait-on avec autant d’acharnement à un homme d’afficher une image de bourgeois ? Le manque de leadership peut être reproché à bien des chefs de parti, il n’en va cependant pas de même avec le manque d’agressivité…
Si bien peu de gens disent pouvoir s’identifier à Pauline Marois, force est d’admettre que c’est plutôt derrière une femme que le milieu politique ne veut pas se ranger. Si ses propos avaient fait quelques remous sur la colline parlementaire, plusieurs lui auraient reproché de jouer la carte de la féministe éternellement insatisfaite. Mais l’événement sera loin de faire scandale. Au-delà de la fameuse Journée des femmes, il semble que le débat d’idées sera bien vite classé ou du moins, si on a de la chance, calmement relancé le 8 mars prochain.