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McGill francophone

Comment vous souhaiter la bienvenue pour une énième fois sans répéter les mots des années passées ? Après avoir parcouru les archives, il était étonnant de voir combien les soucis de notre génération, à savoir notamment l’accessibilité à l’éducation et le bilinguisme, sont similaires à ceux d’autrefois. Le passé est alors apparu comme une muse inspiratrice et plutôt que de vouloir se distinguer de ceux qui nous ont précédés, il semble préférable de continuer le chemin qui a été entamé.

Septembre à nouveau. Une nouvelle rentrée scolaire. Comment vous souhaiter la bienvenue pour une énième fois sans répéter les mots des années passées ? Après avoir parcouru les archives, il était étonnant de voir combien les soucis de notre génération, à savoir notamment l’accessibilité à l’éducation et le bilinguisme, sont similaires à ceux d’autrefois. Le passé est alors apparu comme une muse inspiratrice et plutôt que de vouloir se distinguer de ceux qui nous ont précédés, il semble préférable de continuer le chemin qui a été entamé.

L’émergence d’une large génération à l’âge adulte

Le 23 janvier 1968, l’Union générale des étudiants du Québec appelait la population à manifester sur la situation des prêts et bourses. 33 000 demandes de bourses avaient été renvoyées à leur expéditeur par le Ministère de l’Éducation sous prétexte que le formulaire était « incomplet » ou les informations fournies « inexactes ». 1800 étudiants en sciences humaines de l’Université de Montréal boycottaient leurs cours pendant une semaine comme symbole de support aux étudiants issus des cégeps, car les facultés refusaient de reconnaître la validité des diplômes des collèges classiques et obligeaient certains à reprendre des cours suivis au secondaire. Enfin, on laissait aussi entendre que la présence d’une seule université francophone à Montréal n’était pas assez pour tous les étudiants issus de la première cohorte des cégeps.

Les francophones font du bruit

Le 23 octobre 1959, Jean-Paul Desbiens, un frère mariste avait publié une lettre dans Le Devoir dans laquelle il qualifiait le joual, la langue des étudiants canadiens-français, de « langue désossée parlée par une race servile » et signalait par là l’abrutissement des francophones par l’Instruction publique. Ceci a servi d’huile sur le feu, mais c’est la publication d’Option Québec, un essai de René Lévesque le 6 janvier 1968, qui sera un vrai catalyseur pour l’esprit national et l’indépendance du Québec. Lévesque prévoyait une révolution : l’avènement d’une nouvelle élite économique francophone. Aussi, à la suite de l’insistance de la commission scolaire de Saint-Léonard pour que les enfants d’immigrants reçoivent une éducation unilingue française, une Loi pour promouvoir la langue française au Québec entra en vigueur en novembre 1969.

Ainsi, c’est le croisement entre les groupes du mouvement ouvrier, les organisations nationalistes et les étudiants qui ont mené à l’«opération McGill », une marche de 10 000 jeunes qui désiraient franchir les portes de McGill et l’en écarter l’élite anglo-saxonne, le 28 mars 1969. Ils demandaient à une université publiquement financée de répondre aux besoins du public qui l’a supportait : les nationalistes pour promouvoir la culture et la langue francophones au sein de McGill, les ouvriers parce qu’elle est élitiste et les jeunes qui craignaient pour leur avenir. Le mouvement a été depuis rebaptisé « McGill français » en référence à un des slogans.

Le McGill Daily avait appuyé la manifestation, mais ce ne sera que le 1er septembre 1977 qu’apparaîtront des articles en français. La volonté derrière le premier éditorial est éloquente encore aujourd’hui : « Une édition francophone ne peut avoir qu’un effet positif car elle permettra l’expression des sentiments d’une minorité culturelle en Amérique qui est majoritaire au Québec. Ainsi les anglophones seront à même de mieux comprendre certaines aspirations de leurs voisins. Ainsi par le biais d’un journal étudiant, les deux minorités pourront se comprendre et s’entendre tout en travaillant à l’élaboration d’un Québec meilleur. »

Les Anglophones comprennent-ils mieux nos aspirations ? Mais surtout, le Québec est-il meilleur ? À l’échelle mcgilloise, l’administration a pris la décision au cours de l’été de d’éliminer la nécessité pour ses postulants de passer le test d’admission pour les Facultés de médecine (MCAT) parce qu’il n’était pas traduit en français. Et McGill ne voudrait pas officiellement se couper d’un segment majeur de sa population en imposant un test unilingue qui compromet les chances d’acceptation de ceux dont la langue de McGill n’est pas maternelle.

Le Québec est-il meilleur ? Le remaniement ministériel a apporté son lot de vent, et a soufflé Courchesne au Trésor. Celle qui annonçait une majoration inexorable des droits de scolarité au-delà de 2012 a ainsi laissé sa place à l’ex-ministre de l’Environnement. Beauchamp, elle, semble tempérer. Au moment où cette dernière a eu à se prononcer sur le très litigieux dossier des bulletins scolaires uniformes, elle choisit de remettre l’entrée des nouvelles formules à l’année prochaine, faisant ainsi le bonheur des cadres, commissions scolaires et autres acteurs du monde de l’éducation. Saura-t-elle faire consensus pour renflouer les coffres des institutions universitaires du Québec ?

Le Québec s’améliore-t-il ? Quoi qu’il arrive, Le Délit sera là pour vous tenir au courant. Comme l’ère contemporaine est caractérisée par l’avènement de l’ici et maintenant dans le domaine des médias, notre journal sera plus actif dans l’univers de la presse 2.0. Le sociologue spécialiste des technologies de l’information, André Mondoux a cité les mots de Jean-Louis Barrault lors d’une table ronde de l’École d’été de l’INM sur le rôle du web dans la crise des médias en août dernier : « La dictature “C’est ferme ta gueule!“ et la démocratie c’est “Cause toujours!“…» Aujourd’hui, chacun trie les informations selon ses intérêts ‑à la carte‑, nous vous invitons alors à nous écrire, à collaborer et à venir cogner à la porte du B‑24 de l’édifice Shatner pour faire du Délit, votre Délit. Plus on est de francos, plus on rit !


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