Parmi les défenseurs du bilinguisme, car il n’y a pas de droit au bilinguisme, il y a ceux qui revendiquent les vertus intellectuelles de connaître deux langues comme une intelligence supérieure. Examinons cette affirmation quelque peu généralisée.
Aujourd’hui, je me penche sur une chronique d’un certain Bernard Desgagné, sur le blog vigile.net. Puisque la dernière fois, je donnais la parole aux anglos, cette fois-ci c’est au tour des nationalistes. Écrit en 2008, le sujet reste d’actualité. Le post s’intitule : « Les fausses vertus du bilinguisme ».
De nombreux linguistes, tels que Pierre Calvé (expert en linguistique et ex-doyen de la Faculté d’éducation de l’Université d’Ottawa), défendent les études scientifiques étalées depuis une trentaine d’années, qui auraient « bel et bien démontré les bénéfices intellectuels (souplesse cognitive, créativité, etc.), sociaux et affectifs (moins d’ethnocentrisme et de xénophobie, etc.)» du bilinguisme (Le Devoir, 8 mars 2008). « Attention », dit Desgagné, car il faut prendre en compte l’échantillon étudié, qui est dans ce cas-ci les enfants issus des programmes d’immersion française du Canada anglais.
Il fait une première remarque quant à « savoir si le bilinguisme a un effet favorable sur le développement intellectuel, social et affectif, ce sont les personnes bilingues et les personnes unilingues qu’il faut comparer, et non les élèves soumis à divers régimes pédagogiques ». De plus, il rappelle que les programmes d’immersion tendent à exclure les élèves plus faibles, et qu’il s’opère donc au départ une sorte de sélection naturelle. Ce sont aussi le plus souvent des élèves plus favorisés sur le plan socio-économique. On comprend alors que l’échantillon est peu représentatif d’un phénomène bilingue plus général. Il est normal que des élèves naturellement plus doués et favorisés socio-économiquement réussissent mieux académiquement, et cela qu’ils soient bilingues ou non. Voilà nos recherches scientifiques bien démystifiées.
D’ailleurs, si être bilingue signifie être plus intelligent, alors celui qui ne connaît qu’une langue le serait moins ? Notre bon sens nous répond que non. De la même manière, cette logique nous ferait dire que perdre une seconde langue apprise reviendrait à effectuer une régression mentale et affective. C’est évidemment faux. La logique quantitative de l’intelligence est à éviter.
La bilingue en moi se récrie : bien sûr qu’il y a des bénéfices d’ordre cognitifs ! En fait, cela est moins facile à prouver qu’il n’y parait. Je peux néanmoins me pencher sur ma vie personnelle, qui cumule voyages et langues diverses, afin d’affirmer que même si l’avantage cognitif reste discutable, il peut y avoir des avantages d’ordre « social et affectif », comme une plus grande ouverture d’esprit. N’oublions pas non plus la théorie anthropologique selon laquelle la langue utilisée par un individu structurerait sa perception du monde. En tant que bilingues, nous aurions donc plusieurs perceptions à notre disposition, desquelles pourraient découler un esprit critique bien entraîné.