Confus, incapable de comprendre parfaitement ce qu’il regarde, le public se retrouve sans mots lorsqu’il assiste à la descente aux enfers d’Omar Khadr. Réalisé par Luc Côté et Patricio Henríquez, le documentaire porte sur l’interrogatoire d’Omar Khadr par le Service canadien de renseignements de sécurité (SCRS) à la prison de Guantánamo, entre le 13 et 16 février 2003.
Né dans la région de Toronto, Khadr est accusé d’avoir tué un soldat américain en Afghanistan en juillet 2002. Emprisonné à Guantánamo depuis le mois d’octobre de la même année, il reçoit la visite d’agents du SCRS en février 2003, alors qu’il était âgé de 16 ans. Au lieu de le soutenir, ces derniers l’interrogent pour rapporter des informations aux États-Unis et confirmer les accusations portées contre lui.
En 2008, dans l’affaire « Canada (Justice) c. Khadr », la Cour suprême du Canada a statué que le SCRS avait enfreint l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés, puisqu’il avait l’obligation «[d’]observer les principes de justice fondamentale, et les obligations internationales du Canada en matière de droits de la personne », dont celui de garder le silence et d’être informé de son droit de pouvoir parler à un avocat. De plus, la Cour a autorisé la divulgation de la bande-vidéo de l’interrogatoire d’une durée de sept heures, filmé par des caméras de surveillance. C’est cette bande qui est à la base du documentaire qui sera utilisé comme preuve pour la défense de Khadr dans son procès pour crimes de guerre.
Le documentaire, qui s’attarde particulièrement à cette violation des droits de Khadr, est divisé en quatre journées. Khadr est d’abord très enthousiaste et semble plein d’espoir lorsque les agents du SCRS établissent un lien de confiance avec lui. Il leur parle ouvertement de sa famille, de son passé et de son père qui, selon certains, collaborait financièrement à Al-Qaeda. Lors de la deuxième journée, Khadr apprend que les agents agissent pour leur propre intérêt et insiste pour obtenir leur protection avant de se confier davantage. Effondré devant des agents indifférents qui refusent la protection réclamée, il raconte en détails le traitement horrible qu’il a subit alors qu’il était prisonnier à Bagram, en Afghanistan, avant d’être transféré à Guantánamo. Finalement, pendant la troisième et la quatrième journée, il reprend le contrôle de l’interrogatoire et ne coopère plus.
L’intervention de psychiatres, de soldats américains, d’avocats et d’anciens codétenus de Guantánamo et de Bagram renforce la qualité du documentaire. Ceux-ci commentent l’interrogatoire et racontent la vie de Khadr. Conservateur ou libéral, ancien tortionnaire ou prisonnier, tous s’entendent pour dire que Khadr a été soumis à une procédure illégale durant ces quatre jours de février 2003.
Vous n’aimez pas la vérité est donc une réussite, car il nous pousse à réfléchir sur le traitement des citoyens canadiens à l’étranger et sur ces droits fondamentaux que certains oublient de faire respecter.
En salle dès le 29 novembre.