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RIDM 2010 : Yves Saint-Laurent raconté par Pierre Bergé

Dans L’Amour fou, Pierre Thoretton propose un portrait du grand couturier français Yves Saint-Laurent à travers les yeux de son compagnon de vie, Pierre Bergé. Ce premier documentaire est centré autour de la vente et la mise aux enchères de la monumentale collection d’art du couple, constituée d’œuvres amassées au cours de vingt ans de vie commune. Pierre Bergé est interviewé dans leur maison, qui est presque un musée chargé de tableaux (Mondrian, Picasso, Chirico, pour n’en nommer que quelques uns), de sculptures et de meubles de collectionneur.

Le film s’ouvre sur le discours d’adieu, puis les funérailles nationales du successeur de Christian Dior, ce qui n’est pas sans rappeler la place capitale qu’occupe la haute couture dans l’identité française. Ces événements sont d’abord présentés en noir et blanc, puis les couleurs s’ajoutent. S’ensuit dans un rythme juste une entrevue avec Pierre Bergé entrecoupée de scènes d’archives et de photos (notamment d’Annie Leibowitz et d’Helmut Newton). La trame du documentaire illustre bien les tourments liés à la gloire de ce créateur propulsé dans le monde de la haute couture à 21 ans, ainsi que son génie artistique.

Artiste, Yves Saint-Laurent l’était. En témoigne sa sensibilité pour l’art qu’il a collectionné tout au long de sa vie. Il aimait les poètes, nourrissait une obsession pour Proust et avait un tempérament nerveux et difficile. On revoit les nombreuses demeures occupées par le couple à Paris, à Marrakech, en Normandie… et c’est sans doute dans ces scènes que le talent du réalisateur se révèle le plus. Les longues séquences d’une lenteur méditative servent à donner l’ambiance et le décor des lieux et dévoilent, comme à son insu, une prédilection évidente de Thoretton pour l’esthétique architecturale. Ceci est même apparent dans la scène finale, celle de la vente aux enchères, où, malgré la tension de l’événement, la caméra s’évade à travers les murs et le plafond vitrés du Petit Palais pour filmer les environs.

La maison où il s’entretient avec Pierre Bergé est progressivement dépouillée de ses œuvres sous le regard désabusé de Bergé, qui dit n’avoir aucune nostalgie et ne pas croire en l’âme de ces objets. La collection sera donc dispersée chez des collectionneurs privés, mais chacun des objets est filmé avec minutie et presque dévotion, ce qui fait de la caméra une sorte d’élément rassembleur des œuvres d’art, comme des souvenirs du compagnon de vie de Yves Saint-Laurent, qui tourne tout de même son regard sur le passé en se prêtant à l’exercice du documentaire.


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