McGill est un repaire d’activistes radicaux de gauche contrôlant les journaux et les associations étudiantes, menaçant et terrorisant la communauté conservatrice de l’université. C’est le tableau que brosse « Why Canada Needs The Herald », l’article d’introduction du nouveau journal Prince Arthur Herald. Sérieusement ? Je conseillerais amicalement à l’auteur d’aller faire un tour sur le campus de l’UQAM et —s’il n’y succombe pas d’une crise cardiaque— d’être plus parcimonieux avec les hyperboles en en revenant. Il est difficile de trouver plus modéré que McGill.
Je passe ensuite à un second article, au sujet d’Israël et de la gauche. Je suis heureux que le sujet soit abordé de front, et j’espère y trouver de bons arguments en faveur d’Israël. Au contraire, Russell Sitrit-Leibovich me réserve un plaidoyer démagogique, intellectuellement malhonnête et franchement indigne d’un journal universitaire. Après deux articles, je suis prêt à jeter l’éponge.
Pourtant, par curiosité (morbide?), je parcours quelques autres rubriques. Et voilà que je suis agréablement surpris : Borja de Arístegui Arroyo y a écrit un article intéressant et nuancé sur les Chrétiens victimes de violence au Moyen-Orient ; Jess Weiser y signe un billet sur la tuerie de Tucson pour lequel j’aurais plusieurs objections à formuler, mais qui illustre bien mon malaise quant à la manie des médias de politiser l’acte d’un déséquilibré ; Jon McDaniel y a publié un article solide au sujet du classique de Mark Twain, qui s’est récemment vu charcuté sur l’autel de la rectitude politique.Tout cela pour dire que le Herald a finalement piqué mon intérêt. Un journal conservateur me paraît nécessaire, non pas parce que j’en partage les préceptes, mais précisément parce que je ne les partage pas. La beauté de l’environnement universitaire, c’est justement de confronter des idées les unes avec les autres et de remettre en question les partis-pris que l’on traîne avec soi depuis belle lurette. Lire des articles qui confortent sans cesse ses propres opinions —si avisées soient-elles— est intellectuellement abrutissant.
Le danger d’un journal explicitement associé à un courant politique, par contre, est de se transformer en un simple véhicule idéologique et partisan. Le piège est de procéder à l’envers ; amorcer d’abord une réflexion sur des positions idéologiques figées, puis tenter de les justifier coûte que coûte, quitte à donner dans la démagogie et l’hyperbole.
Si le Herald est capable d’éviter ces écueils à l’avenir, s’il est en mesure de proposer des analyses intelligentes et réfléchies, s’il peut s’inspirer de fondements philosophiques solides —et non d’une ligne de parti—, alors je crois qu’il a sa place sur le campus et je serai l’un de ses lecteurs. Cependant, si j’y lis des articles du style « le mariage, c’est entre un homme et une femme parce que la Bible le dit », « Israël est gentil et les Arabes sont méchants » (ou l’inverse, peu importe) et « Les gauchistes extrémistes envahissent le campus », alors j’irai voir ailleurs.