« Quelle étrange chronique tiens-je entre mes mains ? » vous demandez-vous sûrement, surpris par cette nouveauté dans votre Délit. Pourtant, alors que vous vous apprêtiez nonchalamment à tourner la page, cet appel direct vous interpelle et vous force à continuer votre lecture. (Non, n’y pensez même pas, on vous surveille!)
En quelques mots, cette chronique vise à remplir l’un des objectifs de notre cellule universitaire, soit informer les gens du travail effectué par Avocats sans frontières Canada (ASFC), ainsi que des diverses situations qui donnent lieu à ce travail. Ces quelques lignes bimensuelles traiteront donc de divers sujets liés au travail d’ASFC, qu’ils soient issus de l’actualité ou de questions juridiques qui en découlent. Vous n’y trouverez pas de scoops retentissants, marquant à jamais l’histoire du journalisme, mais plutôt des informations et des pistes de réflexion utiles si vous voulez faire bonne impression aux cocktails mondains, ou bien simplement si vous souhaitez avoir une vision éclairée du monde qui vous entoure.
Populations indigènes menacées en Colombie
D’abord, traitons d’une situation qui ne fait pas les manchettes, mais qui se déroule en ce moment même sur notre continent.
Le rapporteur spécial de la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des peuples autochtones auprès des Nations-Unies, James Anaya, se dit extrêmement préoccupé par la situation des peuples indigènes en Colombie. Il dénonce en effet la violence extrême des FARC envers ces populations, le recrutement forcé d’adultes et d’enfants dans leurs villages et la disposition de mines anti-personnelles sur leurs territoires. Il signale aussi le rôle joué par les FARC dans le déplacement de plusieurs communautés indigènes. Ces exactions violent évidemment plusieurs principes internationaux en matière de droits fondamentaux. Le commissaire se montre aussi très critique envers le gouvernement colombien, estimant qu’il ne réprime pas ces agressions avec l’urgence et le sérieux qu’elles nécessitent. Il se montre inquiet pour la survie matérielle et culturelle des peuples indigènes sur le territoire colombien, pris dans un conflit qui ne les concerne pas (source : ActuLatino – 24 janvier 2011).
Il est à noter qu’ASFC œuvre en Colombie depuis 2003. La seconde phase de sa mission dans ce pays, entreprise en 2009, vise entre autres à appuyer le travail des défenseurs des droits des personnes qui se battent à armes inégales et souvent au péril de leur vie pour faire valoir les droits de leurs clients.
Responsabilité des compagnies multinationales
Le droit fonctionne assez bien lorsque des personnes possédant les ressources pour le faire s’opposent devant les cours d’un ressort qui leur est accessible et dont le choix n’est pas contesté. Malheureusement, les choses se corsent lorsque l’une des parties est un individu sans moyens qui fait face à une multinationale, à elle seule plus puissante que plusieurs États. Ces compagnies réussissent en fait assez souvent à échapper aux recours intentés contre elles lorsqu’elles causent du tort dans des pays au système judiciaire instable. Il en est ainsi pour toutes sortes de raisons, allant de l’incroyable puissance économique de ces géants à l’absence de mécanismes de régulation à la fois légalement contraignants pour eux et pouvant être appliqués malgré leur caractère multinational.
Même si la situation rappelle celle de David contre Goliath, il faut trouver comment de tels mécanismes peuvent être mis en place. Nos équipes de recherche travaillent sur la question ; cela nous permettra de partager quelques pistes dans les prochaines chroniques.