Fils d’un soldat américain mort au front, Craig Pressgang est victime d’une croissance ininterrompue depuis sa naissance. Curiosité locale à l’âge de dix ans alors qu’il est grand comme un arbre, il fascine rapidement la planète entière lorsqu’à l’âge adulte, il atteint la taille d’un immeuble de trois étages. Si cet inexplicable handicap n’empêche pas le jeune garçon de trouver l’amour, il le sépare inexorablement des autres au fil du temps. Toute communication devient finalement impossible et l’exil s’impose de lui-même lorsque le géant ne peut plus sentir les gestes affectueux de sa femme et de son enfant.
Fausse biographie tenant lieu de parabole sur le genre humain, L’histoire secrète du géant est divisé en trois chapitres racontés successivement par trois personnages féminins : la mère du protagoniste, qui tente de combler l’absence de son mari par la présence de son fils, sa femme, fascinée autant par son gigantisme que par les miniatures qu’elle-même étudie, et sa fille, en quête d’un père disparu.L’utilisation de la voix-off permet à Matt Kindt de tendre vers une mélancolie douce-amère d’une grande justesse, tout ajoutant une subtile réflexion sur la différence et la solitude. D’ailleurs, la qualité du récit fait oublier le caractère parfois maladroit du trait de Kindt tandis que le style aéré et poétique des dessins accompagne bien le propos, enrichi par divers articles et lettres. Ceux-ci, ainsi que les publicités reproduites et le fond de page sépia, rendent l’histoire plus réaliste et l’ancre particulièrement bien dans son époque, les années 60. L’histoire secrète du géant est donc un album réussi, touchant et sympathique dans son ensemble.