Je ne suis pas contre une hausse des frais de scolarité. Je suis contre le malfinancement des universités.
Je ne suis pas contre une hausse des frais de scolarité. Je suis contre le fait de payer sans savoir à quoi servira mon argent.
Parce qu’on dira ce qu’on voudra, l’ultime problème réside en l’incapacité ou l’incompétence du gouvernement à dire où iront les 1625 dollars par étudiant en cinq ans.
Les enseignants s’insurgent contre la hausse en s’inquiétant de l’impact de celle-ci sur le nombre d’inscriptions à l’université. De nombreux syndicats se positionnent aussi contre la hausse. La rectrice de l’université de Sherbrooke annonçait fin septembre que « la hausse des frais de scolarité n’était pas la seule solution au sous-financement des universités ».
Alors quoi, où va notre argent si ce n’est ni pour attirer les meilleurs professeurs, ni pour mieux payer les employés de l’université, ni pour régler le sous-financement des universités ?
Madame Samoisette, la rectrice qui ose s’opposer à la Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec (CREPUQ), met le doigt sur le problème : on nous présente une solution qui n’en n’est pas une ; ce qu’on nous vend, c’est en fait une manière de mettre fin à l’endettement de toute la province, avec une redistribution aléatoire en éducation.
En plus d’un réinvestissement douteux de notre argent, il y a aussi des contradictions au sein même de l’argumentaire pour la hausse des frais. Un communiqué de la CREPUQ annonçait en grande pompe le 5 octobre que « les établissements universitaires connaissent […] une hausse du nombre total de leurs inscriptions au semestre d’automne ». Dans un contexte où les admissions universitaires augmentent, comment peut-on dire que le financement diminue ? Le problème, c’est la dette du Québec, c’est l’économie qui va mal, et c’est nos priorités qui volent trop bas.
Manifestation
L’acte de manifester en montant aux barricades ne s’accorde pas à ma vision de la résolution de conflit. Toutefois, la réunion de milliers d’étudiants au nom d’une même cause peut créer beaucoup de bouleversements. Par exemple lors de la grande campagne de 2004–2005, lorsque le gouvernement libéral avait coupé 103 millions de dollars du programme des prêts et bourses, les initiatives étudiantes s’étaient terminés par la remise des 103 millions aux étudiants, comme quoi l’acte de manifester et de faire la grève pourrait faire gagner leur cause aux revendicateurs encore cette année. Ensuite en 2004, après sept semaines de grève, certains étudiants étaient écoeurés de ne pas étudier. Ils se sont donc regroupés pour nettoyer le mont Royal. Ce genre d’action solidaire rappelle que la force du mouvement de groupe et ses impacts positifs peuvent aller au-delà de ce qui avait été prévu.
Le Québec n’est pas seul
Au Chili en ce moment, et depuis juin dernier, les étudiants sont dans les rues pour revendiquer une éducation gratuite. En toute solidarité, les étudiants militent et usent de créativité pour contester un système qui ne répond pas à leurs attentes. Un exemple marquant de cohésion est la grande chorégraphie sur une chanson de Michael Jackson le 25 juin. En mémoire du chanteur décédé, et pour attirer l’œil des médias, les milliers d’étudiants dansaient d’un même pas en clamant leur position sur la gratuité scolaire.
L’action dans les rues est essentielle à la démocratie au Chili. Lorsque le système électoral est défaillant, lorsque le mode traditionnel de surveillance du gouvernement ne donne pas de résultat, seule l’action citoyenne peut vraiment créer des résultats. Par chance, ça existe, même içi.
Les journaux étudiants se réunissent
Le Délit, The McGill Daily et The Link, journaux étudiants sur les campus de McGill et Concordia, s’associent cette semaine pour faire un dossier sur les faits entourant la hausse : du contenu travaillé, recherché et présenté dans un cahier détachable à l’intérieur du Délit pour vous permettre d’aller manifester, ou pas, en toute connaissance de cause.
La hausse peut ainsi être vue comme un excellent prétexte pour se réunir, réseauter et éventuellement avoir plus de poids dans la balance citoyenne. Que les journaux soient pour ou contre ne change absolument rien. Mais qu’on travaille ensemble à bâtir un dossier qui sera utile à l’ensemble des étudiants, dans un climat de cohésion, voilà qui vaut la peine de se souvenir.
Les étudiants refusent de payer la note salée d’un système qui ne leur offre pas de solution. Souvenez-vous en.