Du 9 au 20 novembre se tenait la 14e édition des Rencontres internationales du documentaire de Montréal. Les centaines de films au programme ont une fois de plus démontré les différentes facettes du genre.
Contemplations poétiques
À la Librarie Le Port de Tête, Jorgen Leth nous lit ces quelques phrases de son recueil de poèmes : « The world is just herebeyond the wall and I am trying to pin down the perfect human in the space in which he moves. Is he free ? Does he want something in particular ? Where does he walk around what is he doing how exactly is he present ? » Celui qui serait le mentor de Lars von Trier est sans aucun doute un réalisateur à découvrir. Il étudie l’activité humaine depuis plus de quarante ans. Coups de cœur de la rétrospective : 66 scenes from America et New Scenes from America sont des tableaux qui illustrent le mythe américain et A Sunday in Hell qui suit le parcours cycliste Paris-Roubaix de plus de 200 mètres en 1976.
« Reality documentary »
Paradise Lost 3 : Purgatory a tout de l’intrigue d’un bon film policier : meurtres, un homme accusé à tort, un groupe de personnes qui luttent pour l’innocence de celui-ci, l’investigation bâclée de la police, de nouveaux coupables… Sauf que le film de Joe Berlinger et Bruce Sinofsky n’est pas de la fiction. C’est bel et bien un documentaire malgré ses airs de télé-réalité. En 1993, trois adolescents sont accusés du meurtre de trois enfants à West Memphis, en Arkansas. Les preuves ? Aucune. Ils gribouillaient trop de pentagrammes, de têtes de mort et de serpents. Les meurtres horribles sont l’œuvre de Satan et ces trois adolescents sont clairement amis avec le diable. La trilogie Paradise Lost est une réalisation phénoménale sur une des enquêtes contemporaines les plus invraisemblables. Le dernier volet Purgatory résume l’aventure cauchemardesque et met en relief les concepts de justice et de liberté. À voir absolument.
La première prise est souvent la bonne
Les réalisateurs Jim Brown et Gary Burns ont eux décidé de faire un remake du vieux film français La vie commence demain de Nicole Védrès. The Future is Now ! est malheureusement une pâle copie du film de 1949 dans lequel le comédien Jean-Pierre Aumont incarnait « l’homme de la rue » et s’entretenait avec le peintre Picasso, l’existentialiste Sartre, l’architecte Le Corbusier, le biologiste Rostand, l’auteur Gide… La vie commence demain explorait l’avenir qui s’offrait à l’humanité suite aux deux guerres mondiales, la bombe atomique, Hiroshima et Nagasaki. The Future is Now ! reprend le même fil conducteur, « la femme de demain » tente de changer l’attitude de « l’homme d’aujourd’hui » qui ne se contente que de ne pas faire de mal au monde et espérer qu’aucun malheur ne lui tombe dessus. Le film est dénué de toute émotion, pathos, le discours de Liane Balaban,«Il faut s’engager dans la collectivité, croire en l’humanité », sonne faux et assomme tellement il est moralisateur.
Controverse Wiseman
Le film d’ouverture Crazy Horse (lire l’article « Soldates de l’armée érotica » dans l’édition du 15 novembre) a fait l’objet d’une pétition signée par 20 cinéastes, producteurs et cinéphiles et appuyée par neuf autres personnes n’ayant pas vu le film qui accusaient le dernier film du réputé réalisateur Frederick Wiseman d’être « complaisante et sexiste ». L’œuvre n’avait pourtant pas choqué au Festival internationale du film de Toronto cette année. C’est se tromper que d’accuser hâtivement les RIDM d’avoir voulu gonfler les salles en choisissant ce film qui démontre une fois de plus la technique du cinéaste. Les sujets choisis par Wiseman sont ruminés longuement. Oui, sans narration on perçoit bien par le montage l’objectif de ses films : percer le mystère d’une institution –un hôpital psychiatrique dans Titicut Follies, une base militaire dans Basic Training, un centre de recherche zoologique dans Primate, une agence de mannequins dans Model – et Crazy Horse ne fait pas exception.
Docville nous offre les meilleurs documentaires de l’année à partir de janvier, le dernier jeudi de chaque mois. En vente au cinéma Excentris.