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Maître du bar

Fins connaisseurs de l’alcool fort, des fruits exotiques et du glaçon, ils jonglent avec les coupes et vivent la nuit. 

Webmestre, Le Délit | Le Délit

Il existe différentes écoles de pensée quant à ce que qu’il faut pour être un bon barman. Certains diront qu’il faut une santé de fer pour résister au mode de vie tardif, d’autres soutiendront qu’une bonne santé mentale doit primer, pour résister aux abus d’alcool durant et après le quart de travail. Faut-il de l’entregent, du leadership, de l’enthousiasme ? Est-ce que le diplôme est une denrée essentielle ou est-ce plutôt l’expérience qui prime ?

Photo : Lindsay P. Cameron

À l’École des Maîtres, en opération depuis 1981, la réponse est claire : « Nous formons des gens pour qu’ils soient des professionnels. Ils sortent d’ici avec tout le bagage nécessaire pour se faire employer dans un restaurant, un hôtel ou un bar » soutient Claire Champeau, directrice des ventes à l’École des Maîtres. Non seulement, l’École offre un cours certifié par la formation professionnelle du Québec, mais elle offre aussi un service de placement aux étudiants qui terminent leur cours et qui désirent se trouver facilement un emploi. Madame Champeau ajoute : « Certains étudiants sont timides et n’osent pas faire valoir leur diplôme. Pour eux, le service de placement est très utile. »

Pourtant, le métier de barman ou barmaid demande un peu d’audace pour réussir. Des barmaids comme Sonia* au Ziggy’s Pub ou Sandra* au Thursday’s Bar sur la rue Crescent à Montréal vous le diront : Ce qui fait un bon service au bar c’est la personnalité, l’entregent ainsi qu’aimer les gens et faire preuve de beaucoup de patience.

« La méthode de travail est aussi essentielle, soutient Sandra en rigolant, sinon, on ne survit pas ! » Alors que le travail au bar pourrait sembler relever de l’improvisation, il n’en est rien. C’est pourquoi différentes écoles de formation existent pour inculquer une bonne base utile à ceux qui n’ont aucune expérience et qui veulent se lancer dans le métier.

Le diplôme donne certainement plus de crédibilité. Par contre, quelle école choisir ? Que ce soit l’École des Maîtres, l’Académie Bar Pro, l’Absolute, ou l’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec (ITHQ), les résidents de Montréal ont l’embarras du choix lorsque vient le moment de choisir son école de tenue de bar.

L’ITHQ, par exemple, est une école reconnue, publique, qui fonctionne depuis 35 ans maintenant. La formation de service de bar est de 80 heures, ce qui en fait la plus longue offerte en ville comparé à 30 heures à l’École des Maîtres ou 45 heures à l’Académie Bar Pro. Par ailleurs, l’Institut demande aussi des frais de scolarité plus élevés de 715 dollars contrairement à l’école des Maîtres qui ne facture ses classes qu’à 368 dollars alors que l’Académie Bar Pro charge 400 dollars.

Sylvie Carrière, la responsable du recrutement étudiant à l’ITHQ soutient qu’il faut tout d’abord choisir son futur milieu de travail et définir ses objectifs de carrière. L’environnement et les conditions de travail que l’on souhaite peuvent orienter la décision d’un futur étudiant.

« Si on veut poursuivre dans la restauration, dans un établissement haut de gamme, cela demande une formation plus étoffée, et le sceau de l’ITHQ est reconnu comme étant fiable. »

De part sa vocation d’école publique, l’ITHQ peut fournir à ses étudiants, après les 80 heures de formation pour le service au bar à la fois un diplôme institutionnel et un diplôme d’études professionnelles approuvé par le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport au Québec.

Le monde de la restauration et de l’hôtellerie vise à faire le plus de revenu, sans perte de temps. C’est pourquoi le diplôme est une denrée intéressante pour un employeur qui n’a que très peu de temps pour former son nouveau personnel. Pourtant, Roxana Gonzalez, une étudiante au baccalauréat en Gestion du tourisme et hôtellerie à l’Université du Québec à Montréal, croit que l’expérience compte pour beaucoup dans la balance. D’ailleurs, « l’école peut ne pas être nécessaire si le candidat semble connaître le domaine ».

C’est aussi ce que croient Sandra, Sonia, et Anela, toutes barmaids de longue date. Après trois ans au Gerts, Gérard* pense lui aussi que l’école du cocktail n’est pas nécessaire : « J’ai tout appris des gens plus vieux que moi ! »

Pourtant, les cours attirent, et attirent beaucoup de monde, d’après madame Champeau, de l’École des Maîtres. L’École roule à pleine vapeur et offre de nouvelles formations d’introduction à la dégustation des vins par exemple, une autre branche du service de bar qui intéresse de plus en plus le néophyte.

Pour ce qui est du service de bar, le cours s’adresse à ceux qui n’auraient pas d’expérience pratique ou qui désireraient rafraîchir leurs connaissances, faisant de la clientèle une faune très diverse. De l’étudiant qui désire acquérir de nouvelles connaissances pour son travail d’été à la dame qui veut pimenter sa retraite, toutes les raisons sont bonnes pour suivre un cours de service de bar.
Mais attention, ce n’est pas un art, c’est un métier, appuie Sandra. En effet, elle a appris au fil des ans que professionnalisme rime avec discrétion lorsque l’on travaille au bar. « Un client qui revient plusieurs fois de suite avec différentes femmes, voilà bien une anecdote qui m’a fait comprendre que, si les clients changent, nous, on reste ! »

Photo : Nicolas Quiazua
Anela, qui travaille aux Trois Brasseurs de la rue Sainte-Catherine, en sait quelque chose. Elle sert les mêmes clients, tous les jeudis soirs, depuis quatre ans. D’ailleurs, deux d’entre eux, Éric et Giancarlos, s’empressent de la qualifier de « barmaid idéale » avant de lui payer un verre. Pour les clients, la qualité de la barmaid reste essentielle. « Tous les bars offrent le même alcool. Tous les bars offrent les même prix. Ce qui change, ce sont les serveuses ! » rappellent les deux collègues de travail. Pour eux, le fait qu’elle soit sympathique, agréable à côtoyer et charismatique leur donne envie de revenir et surtout… d’en redemander. Éric s’étonne : « Elle a beaucoup d’entraînement. Même si elle boit avec nous et avec d’autres clients, elle reste debout ! »

Si le métier de barman ou barmaid semble attirant pour plusieurs, il demeure important de noter que les quarts de travail sont tardifs et stressants. D’ailleurs, les serveurs et serveuses qui ont bien voulu parler de leur expérience étaient tous beaucoup trop pressés pour s’arrêter un moment. Non seulement le rythme de vie est effréné, mais les complications légales peuvent aussi alourdir la tâche du barman.

À L’ITHQ, Sylvie Carrière soutient qu’une formation complète pour les bartenders doit nécessairement comprendre les bases et tactiques du service, mais doit aussi inclure une formation quant aux responsabilités du serveur lorsqu’il vend de l’alcool. En effet, l’établissement et le barman sont responsables s’il arrive un accident dû à un client en état d’ébriété. C’est pourquoi la formation de base de service au bar de l’ITHQ s’associe depuis une dizaine d’année à Éduc’Alcool pour enseigner l’éthique du barman. « Action service est un programme inclus dans la formation de quatre-vingts heures et est nécessaire pour assurer une formation de qualité » ajoute la responsable du recrutement étudiant.

Néanmoins, le métier de serveur dans le milieu hôtelier peut certainement attirer, autant pour les perspectives d’emploi que pour les salaires payants. D’après madame Carrière, il y a une pénurie de main d’œuvre dans le service d’hôtellerie ; la demande est grande pour le personnel qualifié et les salaires offerts s’ajustent en conséquence, une information corroborée par Claire Champeau, de l’École des Maîtres.

L’Institut d’hôtellerie offrira d’ailleurs, en janvier 2013, un nouveau Diplôme d’études professionnelles (DEP): une formation internationale en service et sommellerie et restauration de un an et demi. Le programme obligera un stage de quatre mois dans les Rocheuses, puis de quatre mois en France dans un vignoble, et pourrait mener au métier de majordome.
Un tel cours donnerait envie, même aux plus rébarbatifs, d’enfiler leur tablier !
*Les noms marqués d’une astérisque sont fictifs.


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