L’Assemblée générale qui a mis fin à la grève des employés de soutien de l’Université McGill a eu lieu le 6 décembre 2011. Après quelques jours d’ajustement et des vacances bien méritées, les membres de MUNACA sont maintenant de retour au chaud et au travail.
Sur les 1700 membres estimés du syndicat, 1263 ont voté à l’Assemblée générale. MUNACA a obtenu une échelle salariale qui assurera une augmentation de salaire variant de 8,6 à 16% selon la situation du salarié sur l’échelle actuelle. De plus, ils ont maintenant un pouvoir décisionnel accru sur la contribution de l’université aux plans de retraites et avantages.
Cette échelle salariale ne profite qu’à 75% des 1700 et quelques membres de MUNACA qui n’a pas encore atteint son plafond salarial, pourcentage qui coïncide étrangement avec 72% qui a voté en faveur de l’entente proposée par la conciliatrice du gouvernement québécois Claire Tremblay. Toutefois, cela ne signifie pas que les 25% restants ne sont pas de ceux là.
Des 325 membres de MUNACA qui ont l’ancienneté, 40 % travaillent dans les bibliothèques. Francisco Uribe, qui travaille au service des prêts entre bibliothèques, dit que l’atmosphère a changé dans les six dernières années, et il n’a pas ressenti de tensions entre les employés lors du retour au travail. Uribe a écrit une lettre, dont une partie a été publiée dans la Gazette, pour exprimer l’expérience positive qu’a amené la grève dans la vie des employés de soutien. Lui a voté non à l’entente par principe. Il a estimé que « quand l’offre est venue, nous ne pouvions simplement pas la refuser ». Ceci semble être un sentiment partagé, bien qu’à l’Assemblée générale, plusieurs se soient indignés du fait qu’ils acceptaient la toute première et unique offre que l’université faisait après tant de temps à résister toute concession.
« Essayer de garantir notre pouvoir décisionnel total sur les pensions est une cause perdue. Elles sont coupées partout dans le monde » dit Francisco Uribe. Patrick Leblanc, porte-parole francophone pour MUNACA depuis le début du conflit syndical pense que les retraites et leur indexation pourraient être la première cible des prochaines négociations qui auront lieu dans 4–5 ans. Pour ce qui est de l’échelle salariale, les membres de MUNACA auront en effet atteint la parité avec les autres universités montréalaises dans 5 ans. En Assemblée générale, certains membres ont exprimé un doute quant à savoir si l’échelle salariale serait garantie dans le prochain accord collectif, et le comité a affirmé pouvoir le garantir.
Selon ce qui se dit sur le campus, on voit le « fléchissement » des membres du syndicat comme étant un signe de l’affaiblissement moral et physique des troupes. Pour la plupart, accepter l’entente avec l’université était une question de viabilité financière. S’ils avaient décidé d’attendre une deuxième ou troisième proposition de la part de l’université, il aurait tout de même été impossible de savoir combien il leur aurait fallu de temps pour y arriver. « Cela aurait pu prendre deux semaines comme ça aurait pu prendre trois mois » dit Uribe, qui lui-même est à présent endetté. Les fonds de secours ne sont pas de l’argent donné. Beaucoup dans le groupe de piquetage de Francisco n’étaient pas prêts à emprunter plus pour gagner un maigre pourcentage d’augmentation qui n’aurait pas compensé les frais engendrés par la grève. Lui a perdu 25% de son salaire en faisant une grève qu’il n’était pas en mesure de continuer.
Sylvie Bosher, du McGill Writing Center, quant à elle, aurait été heureuse de rester sur les lignes de piquetage pour trois autres mois. « J’étais vraiment déçue que nous ayons cédé » dit-elle. Les douze personnes de son groupe de piquetage ont voté contre l’entente. Lors de l’assemblée qui a duré plus de quatre heures, il y a eu beaucoup de questionnement quant à la légitimité du président du syndicat de Kevin Whittaker, qui selon certains incitait plutôt que recommandait à ses membres de voter oui. Un membre de MUNACA qui a souhaité garder l’anonymat dit avoir, dans le doute, vérifié avec l’avocat la légalité de ce geste. Même si celui-ci était légal, Whittaker a cependant été obligé de changer de ton au milieu de l’assemblée, passant de moins pressant à plus suggestif pour calmer les ardeurs.
Sylvie Bosher a eu l’impression que c’était l’Alliance Canadienne de la Fonction Publique (AFPC) qui a fait pencher la balance lors du vote à la table des négociations. Cependant, Whittaker affirme que le négociateur en chef de l’AFPC n’a pas voté. La recommandation de l’entente auprès des membres de MUNACA a été ratifiée par les huit représentants de MUNACA sans toutefois faire l’unanimité. Comme l’a répété à plusieurs reprises le président, « c’est le mieux qu’on ait pu obtenir à ce moment ci ».
Comme en témoigne le président, le retour au travail a été de façon générale assez angoissant pour tous les membres qui ne savaient pas tout à fait à quoi s’attendre. Il n’y a cependant eu que quelques réelles difficultés. La charge de travail est plus grande, mais ils font ce qu’ils peuvent pendant les heures de travail. Sylvie, elle, éprouve une certaine solitude à son retour. Au centre d’écriture, elle est la seule employée de soutien. Comme la coordinatrice du département d’études asiatiques qui est dans la même situation, elle a ressenti le besoin d’aller « communiquer avec d’autres membres de MUNACA » sur ses heures de repos. L’expérience de la grève a été très positive pour elle et pour Uribe. Peut importe l’issue et les bénéfices qu’ils en retiennent, ils n’ont pas seulement fait la grève pour eux, mais pour tous les autres.