À la croisée de la rue Pastoret et de la rue des Trois Rois à Marseille se niche une galerie photo bien anodine ; ses grandes portes en verres, séparées par des planches de bois bleu ternies par le temps, laissent transparaître une grande enfilade. À l’intérieur se chevauchent des centaines d’ouvrages photographiques posés sur de longues tables d’apprenti, sous l’œil attentif des cadres photo suspendus au mur. Invité à la galerie pour son vernissage, on pouvait suivre dans les yeux de monsieur Garcin les traces des aventures qui ont fait de lui l’homme de 89 ans qu’il est aujourd’hui. D’origine provençale, il a apprivoisé la photographie lorsqu’il est parti à la retraite. s uns Gilbert Garcin disait : « J’ai un jour pris conscience que les situations que je ne vivrai pas, les rêves que je ne ferai pas sont innombrables. Il n’y a pas de raison à se résigner à cet état des choses. » C’est ainsi que s’est fabriqué petit à petit l’univers du photographe, un état du monde et des choses d’apparence lunaire, toujours en noir et blanc avec une charge mélancolique incroyable, une sensibilité face à la fatalité de la vie qui vous kidnappe le regard si par mégarde vous avez l’audace de vous y pencher d’un peu trop près.
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Dans sa boite à outils, Garcin possède une gamme d’objets symboliques qu’il réutilise à souhait pour mettre en scène le théâtre de ses songes : sa grande bobine de ficelles pour l’écoulement du temps, de grands cadres de photos d’où il contemple son passé et une série de marionnettes en papier pour peupler ses rêves.
L’œuvre de Garcin est en quelque sorte là pour nous rappeler qu’il est essentiel de cultiver la simplicité et la vérité en photographie, de laisser divaguer notre imagination, d’aller jusqu’au bout de notre pensée et surtout de mettre la main à la pâte ! Voici une ode à notre bonne vieille technique argentique qui a tendance, de nos jours, à se faire marcher sur les plates bandes par le numérique, ce prétentieux rat de l’informatique qui nous ment !