An 2058. Zachary Buzz a tout quitté (ses parents, sa sœur, la ferme où il a grandi) pour être élève à l’Académie de Police de Monplaisir, « une cité tentaculaire vouée à toutes les formes de plaisirs ». Dans cette société hyper surveillée, guidée soi-disant par le principe de plaisir et où évoluent des habitants étrangement déguisés en lapins géants et autres schtroumpfs, Zach fait ses premiers pas au cœur d’une justice humanoïde. Alors que le lecteur assiste aux débuts un brin chaotiques de Zach à l’Académie, le récit se perd dans différentes directions quelques peu inégales : les ébats amoureux de Zach, l’enquête de l’un de ses confrère et la vie de Niels, un jeune garçon déguisé en Justicier du Temps dont le rôle n’est pas tout à fait défini.
Les Règles du jeu (tome 1 de Urban) constitue l’introduction d’une série qui devrait compter jusqu’à six tomes. La multitude des thèmes traités rend sa lecture particulièrement enrichissante. Ces derniers sont tous plus actuels les uns que les autres ; de l’abrutissement des masses au travail à la solitude dans la foule, la misère, le voyeurisme, la télé-réalité, etc. Si l’album n’apporte rien de nouveau en matière de réflexion sur ces thématiques, il a au moins le mérite de bien les présenter. L’opposition constante entre la violence d’un système judiciaire omniprésent et l’ambiance toute tournée vers le plaisir sous toutes ses formes est particulièrement intéressante. Un univers qui semblait loin du nôtre par son futurisme poussé à l’extrême –et ce malgré la ressemblance avec nos grandes mégalopoles, leurs grands immeubles et leur foule– finit par y ressembler étrangement. Les images récurrentes d’Alice au pays des merveilles, que l’on aurait pu croire symbolisant l’inlassable quête du plaisir, sont en fait intimement liées à un système policier alarmant. L’omniprésence des écrans géants, la perte de toute intimité et l’état policier sont autant d’éléments qui provoqueront certainement chez les lecteurs attentifs une réflexion sur nos propres sociétés. Et tout cela est habilement mis en dessin par Roberto Ricci, dont le trait sûr sert le récit.On regrettera toutefois que l’histoire ne soit pas davantage développée. En effet, il est clair que ce premier tome pose les bases d’un récit qui pourra être de qualité, mais qui, pris indépendamment, il faut l’admettre, laisse le lecteur sur sa faim. Heureusement que les personnages qui se démarquent du récit sont tous dotés d’un certain charisme. On constate également que l’entité urbaine de Monplaisir, chaleureuse force destructrice qui étouffe tout libre-arbitre et toute liberté de pensée, semble elle-même se démarquer comme un personnage intriguant.