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Média vs politique

Encore une fois, les événements de la semaine passée, où politiciens et journalistes se lancent des flèches à bout portant, sont autant de preuves que les hostilités demeurent ouvertes.

Le petit monde des médias québécois a été mis sans dessus dessous la semaine passée avec d’abord le congédiement de Jean-François Lisée de la table ronde politique du Téléjournal de Radio-Canada, puis le licenciement d’Alain Saulnier de son poste de directeur général de l’information de Radio-Canada. Même Le Délit a connu son moment sur la sellette avec le chroniqueur Jean-François Trudelle qui « a laissé un bout de jupon dépasser » comme TVA Nouvelles a si intelligemment décrit la situation. Monsieur Trudelle n’a pas mentionné son affiliation au Parti libéral du Québec alors qu’il était interviewé pour son soutien au mouvement étudiant pour la hausse des frais de scolarité.

Si le premier épisode est lié à l’adhésion de monsieur Lisée au comité sur la stratégie souverainiste mis de l’avant par Pauline Marois le 23 janvier dernier, le deuxième est une totale douche froide pour la communauté journalistique. Les rumeurs vont bon train pour expliquer le départ de l’homme qui a été président de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ), instigateur de l’émission Enquête et réformateur du traitement de l’information à Radio-Canada. Quant au troisième cas, le jeune homme a été confronté aux lois de la jungle qui régissent la vie politique après qu’il se soit fait attaquer pour manque de transparence.

Politiciens versus journalistes, la lutte n’est pas finie. D’un côté, il y a ceux qui accusent le complot conservateur (il suffit d’être au fait des articles dans Le Devoir ces jours-ci pour s’en rendre compte), de l’autre il y a ceux qui décrient le désir de sensationnalisme des journalistes. Encore une fois, c’est le combat acharné entre ceux qui racontent et dénoncent, et ceux qui changent et bouleversent.

L’émission de Mario Dumont, un ex-politicien qui fraie maintenant avec la télévision grand QI, est un exemple savoureux  de cette division flagrante. Martin Pelletier commentait le congédiement d’Alain Saulnier en disant : « Il y a juste à Radio-Canada que tu vois des situations de même. On parle d’un simple mouvement de personnel ! […] Les communistes péquistes de la salle des nouvelles de Radio-Canada applaudissent à grands coups avec en plus la théorie du complot. Là, c’est rendu que c’est Stephen Harper qui a mis dehors Alain Saulnier ! »

En effet, la FPJQ voit l’ombre d’une menace conservatrice dans le congédiement de Saulnier, alors que les conservateurs se défendent n’avoir jamais donné d’indications à ce sujet.

Du côté du cas Trudelle, sa réaction à ce qui lui est reproché est de souligner l’amour des journalistes pour l’élucubration de conspirations. Je nuancerais en précisant que seulement quelques médias ciblés se pourlèchent de sensationnalisme, une stratégie qui a fait ses preuves auprès d’un certain public, mais sans plus.

Attaquer la mauvaise foi des journalistes est un argument qui se vaut. Par contre, si l’on s’en tient à la transparence, qui a raison ? Comme l’a dit Patrick Lagacé : « À chacun son code d’éthique, quand on intervient ainsi en public » et j’aurais tendance à critiquer quelqu’un qui n’affiche pas entièrement ses couleurs. Dans la conjoncture, en tout cas.

Si l’on tient vraiment à comparer l’animal politique et journalistique pour leur transparence, les journalistes demeurent des champions en la matière. La preuve, s’ils sont affiliés à un parti, ils se font congédier. Ils sont autant à la merci des grands patrons que les politiciens le sont des électeurs.

Pas de répit pour personne, la loi de la jungle c’est la loi de la jungle.  Et encore une fois, les événements de la semaine passée, où politiciens et journalistes se lancent des flèches à bout portant, sont autant de preuves que les hostilités demeurent ouvertes.

Une des raisons plausibles de cette constante lutte réside peut-être en la jalousie des journalistes d’écrire sans avoir leur tronche reconnue aussi facilement que celle des politiciens. Si l’article paru il y a un an au sujet de la monarchie, par notre chroniqueur Jean-François Trudelle, a connu un relent tapageur ces derniers jours, c’est grâce à l’apparition de son auteur à la télévision.

Du flot de commentaires qui en découle, le plus pertinent est certainement : « Si j’avais su qu’il fallait passer à la télé pour être lu, j’aurais travaillé ma gueule ! » Comme quoi, finalement, le sensationnalisme paie peut-être.


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