À McGill, le sujet de la hausse est sur toutes les lèvres, surtout à quelques heures de l’Assemblée générale de l’Association des étudiants de 1er cycle de la Faculté des arts qui se prononceront sur l’éventualité d’une grève générale illimitée. D’ailleurs, les manifestations se multiplient sur le campus en vue du vote.
En psychologie cognitive, j’ai même eu un cours dont le sujet d’étude était la hausse des frais. Prenez n’importe quel étudiant, faites lui écrire autant qu’il peut pendant 10 minutes au sujet de la hausse des frais de scolarité et pourquoi est-elle bénéfique, et vous obtiendrez de lui qu’il adhère à la vision qu’il vient de défendre sur papier, peu importe s’il était pour ou contre au départ. Essayez-le, vous verrez.
(Un seul détail : si cette décision est vraiment importante pour lui, alors il ne se laissera peut-être pas faire aussi facilement. C’est de la science et c’est enseigné à McGill.)
Un argument soulevé contre une grève à McGill : dans cette université prestigieuse, on ne doit pas s’impliquer dans ce genre de combat car ça risquerait de perturber nos standards de performance face aux autres universités, non pas Québécoises, mais du Canada et des États-Unis.
Ce genre de commentaire omet complètement qu’un, trois ou 20 jours de grève ne peut pas affecter le rang mondial de McGill ; le mouvement étudiant est fort, mais il ne faut pas exagérer.
Et pour tous ceux qui s’apprêtent à être célèbre grâce à leur recherche faite à McGill ou grâce au renom de l’université, je tiens à répéter le message plein d’empathie de l’administration McGill : « Les conséquences normalement engendrées pour ne pas avoir remis un travail, ou pour l’avoir remis en retard, et pour ne pas se présenter à un examen seront maintenues. »
De cette façon, comme dans maintes autres circonstances d’ailleurs, McGill s’assure que ses petits étudiants modèles fassent leurs devoirs, sous menace de leur enlever des points.
Ainsi, tous ceux qui seront dans la rue le 22 mars n’auront aucun passe-droit, hormis le fait qu’ils auront suivi leurs idéaux et ne se seront pas laissé impressionner par l’université. Comme le soulignait Mariève Isabelle, il y a Concordia qui se positionne systématiquement à l’opposé de McGill, preuve qu’il n’y a pas qu’au sein du corps étudiant qu’on refuse de se laisser dominer.
Et récemment, la main mise de l’université n’a pas qu’été académique : elle s’est étendue à la presse étudiante. Suite à la publication d’un article au sujet de McGillLeaks, le nouveau site de diffusion d’informations sur le Web, la Société des Publications du Daily (SPD) qui chapeaute Le Délit et le McGill Daily s’est fait menacer par McGill. En sommant de retirer toute information sur les sites de la SPD au sujet du site McGillLeaks, l’Université voulait contenir le scandale de ses informations personnelles divulguées. La mise en demeure envoyée par l’avocat de McGill a fait sursauter toute la communauté journalistique sur le campus devant une telle atteinte à l’intégrité journalistique.
McGill nous menace, nous plions, mais ce n’est qu’en raison des coûts qu’aurait occasionnés une poursuite devant un tribunal. La SPD cesserait d’exister si elle avait à débourser des milliers de dollars dans un procès, sans compter l’énergie investie dans une entreprise comme celle-là. En riposte, nous tâchons de mettre au courant la communauté étudiante du fait que McGill aime utiliser un bâillon pour faire valoir son point.
Je suis fatiguée de cette université qui terrorise, condamne et professe à qui mieux mieux qu’elle est la meilleure au monde ; une université qui censure ses journalistes, muselle ses étudiants, mutile les corps d’action sur le campus.
Je n’ai pas envie de me mêler au printemps mcgillois, mais j’apprécie le divertissement, j’apprécie l’acharnement des plus audacieux, j’apprécie que l’œil inquisiteur de McGill ne fait pas reculer les plus coriaces. J’apprécie qu’on ait un choix de grève générale illimitée dans la Faculté des arts, qu’on ait la possibilité de se positionner contre l’université.