Quand vous étiez petits, peut-être avez-vous eu l’occasion comme moi de jouer quelque fois avec ces drôles de boîtes surmontées d’une grosse loupe, conçues pour accueillir toute une population d’insectes fourmillants. Munis de votre petit laboratoire portatif, vous jouiez alors aux scientifiques curieux, passant des heures entières à observer le comportement de vos bestioles captives.
C’est exactement ce que j’ai eu l’impression de faire pendant les deux derniers mois que j’ai passés à Amsterdam, quand je vivais en colocation avec trois mâles – et je n’ai pas choisi ce mot au hasard pour désigner mes deux Italiens et mon Mexicain. Comprenant de manière minimale la langue italienne (qu’ils utilisaient régulièrement au cours de leurs conversations de « gars »), j’ai pu observer discrètement le comportement de ces hurluberlus qu’étaient mes colocataires.
Sautant sans aucune subtilité sur tout ce qui bougeait et qui avait un minimum de poitrine, ils étaient machos à souhait, et leur énorme ego n’avait d’égal que leur surplus de testostérone. Qu’on ose refuser leurs avances, et ils croient toutes les femmes désintéressées par la gent masculine. Si les femelles ne veulent pas d’eux, de quel homme voudraient-elles ?
Le premier d’entre eux à le penser se prenait pour un mâle dominant dans tous les sens du terme. Prédateur sans pitié rôdant autour de ses victimes avant de les attaquer sans relâche jusqu’à obtenir ce qu’il voulait, il n’hésitait pas à réitérer ses avances d’une semaine à l’autre. Sa lourdeur était telle que certaines de mes amies n’osaient plus venir passer la soirée chez moi, de peur de ne devoir subir une nouvelle fois les déambulations, se voulant provocatrices, d’un gars torse nu et en caleçon. Admettons toutefois que d’autres auraient bien aimé être invitées plus souvent.
Toujours aux côtés de ce tombeur impitoyable se trouvait le compagnon de drague typique : mignon, mais moins « beau gosse » et moins doué que l’autre, quoiqu’aussi irrespectueux envers ses conquêtes. Naïve que je suis, c’est grâce à lui que j’ai appris que les gars comme eux distribuaient aux filles un « indice beauté » compris entre un et dix, pour donner à leurs complices une idée de ce à quoi elles ressemblaient ! En plus d’être absolument répugnant, ce système de notation n’est évidemment pas fiable du tout, étant donné la subjectivité manifeste des goûts de chacun. Ce n’est qu’une façon de parler, car pour mes zigotos, la note semblait être proportionnelle à la masse mammaire de la fille… Désespérant !
Mon troisième colocataire étant le type même du gars qui se veut sage et plein d’expérience, les deux autres l’avaient pris pour confident et écoutaient les conseils qu’il prodiguait, comme les habitants de Delphes écoutaient autrefois la Pythie. Malheureusement, malgré sa bonne décennie d’avance sur nous, il était tout aussi immature que les autres et peut-être même plus macho qu’eux.
J’ai beau râler –comme d’habitude–, la « mâlitude » de ces drôles d’oiseaux commence toutefois sérieusement à me manquer.