Du 24 au 28 septembre, les peuples autochtones étaient à l’honneur à McGill à l’occasion de la deuxième édition annuelle de la semaine de sensibilisation autochtone. Cet événement, organisé par le groupe Aboriginal Sustainability Project en partenariat avec plusieurs associations communautaires, a pour but de sensibiliser la communauté mcgilloise aux cultures autochtones du Canada. Une série de conférences, ateliers et événements sociaux étaient inscrits au programme de cette semaine thématique.
Vendredi soir, Allan Vicaire, coordonateur du projet, a exprimé au Délit sa satisfaction. « Les discussions, les questions posées, les réponses données étaient de grande qualité. Les étudiants se sont vraiment engagés dans ce projet, et avec enthousiasme ». Par rapport à l’année dernière, l’édition 2012 n’était pas « mieux, mais différente », selon Allan Vicaire. « Par exemple, beaucoup d’étudiants ont pris eux-mêmes l’initiative de me contacter pour me proposer des activités et me parler de conférenciers à inviter », a‑t-il expliqué. « Cette semaine est le résultat d’une année de réflexion de la part des étudiants et des partenaires communautaires ».
Repenser « l’identité indigène »
Une des conférences de la semaine portait sur « l’identité indigène ». Pamela Palmater, avocate Mi’kmaq spécialisée en droit indigène et en politique, était invitée à venir parler de ce sujet. « Nous avons une tâche monumentale : celle de décoloniser notre identité », a‑t-elle déclaré à plusieurs reprises au cours de la conférence. Le but de madame Palmater était d’attirer l’attention sur les absurdités des lois qui encadrent aujourd’hui – et depuis des centaines d’années – la définition de l’identité autochtone. Elle dénonce en particulier la Loi sur les Indiens de 1985 (Indian Act en anglais).
En effet, les critères de détermination et de classification de l’identité autochtone remontent à l’arrivée des colons au Canada. Les Amérindiens ont été soit « exterminés » ou « assimilés » par les colons et pour le reste d’entre eux, « classifiés ». À l’époque, « on mesurait les dents des Amérindiens de la même manière que l’on mesure les dents des chevaux », a rappelé Pamela Palmater. « La Loi sur les Indiens est issue de cette sombre histoire. » Elle a été récemment modifiée, mais « de nouvelles formes de discrimination ont été introduites ». Par exemple, la descendance d’une femme autochtone dépend à la fois de ses parents et de ses enfants. Le résultat est qu’une femme a davantage de risques de perdre son statut. « Il y a quelque chose qui cloche avec tout cela, et surtout à l’époque actuelle », a souligné Pamela Palmater.
« Que se passerait-il si on appliquait tous ces critères aux Canadiens non-autochtones ? », a demandé Pamela Palmater à l’assemblée. « Et si on déterminait la citoyenneté canadienne d’un individu en se basant sur le lien (proche ou lointain) qu’il a avec les pères de la Confédération ? C’est inconcevable. Alors pourquoi ça nous arrive à nous aujourd’hui ? ».
Le statut compte beaucoup pour les populations autochtones. Toutefois, la législation actuelle à ce sujet défavorise beaucoup d’entre eux et augmente leurs risques de perdre leur statut. Sans statut, un autochtone peut être privé de plusieurs avantages gouvernementaux. De plus, on peut être privé, par exemple, du droit de vote et du droit de concourir pour des élections dans la communauté, et ainsi « perdre sa voix ». « Dans beaucoup de cas on ne peut même plus vivre dans les réserves ». Il devient donc plus difficile d’entrer en relation avec les autres personnes de sa communauté et de préserver ses valeurs.
Le but pour Pamela Palmater est donc bien de « décoloniser l’identité » et d’établir de nouveaux critères, plus proches de la réalité et plus proches des valeurs des communautés autochtones d’aujourd’hui. « Selon moi, notre identité ne découlera jamais ni de la biologie, ni de la Loi sur les Indiens. Pour les générations futures, les autochtones ont le devoir de protéger leur identité. » C’est une démarche de « restitution ».
Bien qu’il y ait encore beaucoup à faire de ce côté-là, cette conférence aura au moins rempli deux des objectifs principaux de la semaine de conscientisation aux populations autochtones de McGill : faire prendre conscience des problèmes qui touchent les Premières Nations et faire interagir des étudiants, des membres des communautés autochtones et autres sur cette thématique.