Based on a true story, c’est l’histoire commune de cinq personnages en conflit avec eux-mêmes et avec les autres. Un policier, une juriste et trois punks se donnent la réplique avec violence dans une pièce aux accents Koltésiens.
Danny Redmen, un accro à l’héroïne, présente sa copine Camille à sa meilleure amie, une lunatique nommée Stevie. Ils forment ensemble un trio marginal, vivant joyeusement dans un appartement délabré d’une ville indéterminée des États-Unis.
« Punk noise as electricity, anger as light ».
Entre les concerts de punk, les jobs au McDo et les lignes de coke prises au couteau, on s’entend pour dire que tout va bien. Néanmoins, la normalité dans laquelle s’épanouissent les trois acolytes est vite confrontée à l’ordre et la morale, personnifiés par l’officier Davis et la juge Parks.
On pourrait croire en arrivant dans la salle qu’on va assister à une pièce antisystème, caricaturant la question de l’insertion sociale. Le décor se prête en effet assez bien au jeu. Côté cour : un bureau propre avec ses accessoires, machines à café, lampe, tableau sans intérêt. Côté jardin : un pan de mur tagué de noms de groupes punk, deux chaises dans un piteux état et un frigidaire. Entre ces deux instances opposées on trouve un arrêt de bus qui symbolise la rue.
La pièce propose une réalité bien plus complexe que cette toile de fond. Si l’on se doute dès le départ que le jeune Danny Redmen ne va pas bien, il est intriguant de se rendre compte que le juge et l’officier de police sont en proie à leurs propres chimères.
C’est là que se situe la force de Based on a true story ; le spectateur est sans cesse appelé à participer à l’action mais ne peut émettre de jugement sur elle. Il est tour à tour amateur de pogo lors d’un concert punk, membre malgré lui d’une audience juridique ou simple spectateur, et il reste impuissant face à la réalité des personnages. Inversement, cette réalité ne nous indique pas quoi faire, ni où aller, elle est simplement présentée dans une logique démonstrative.
C’est justement ce que voulait faire Isaac Robinson, le metteur en scène : donner à voir une réalité, celle de ces cinq personnages inspirés d’histoires vraies. Dans une entrevue accordée au Délit, il confie : « Le théâtre est juste un autre couloir de communication. […] Les personnages de ce spectacle ont été pensés pour être les plus réalistes possibles, tant au niveau de leurs réactions que de leur raisonnement. En revanche, la production finale ne satisfait pas cette demande de réalisme, elle est plus une représentation de la réalité dans laquelle des personnages réels évoluent. »
Outre cet aspect d’interprétation, la mise en place de cette production est des plus étonnantes. Isaac avait simplement présenté ses personnages au TNC et après quelques essais, il a trouvé des comédiens avec qui construire un script.
« C’était intéressant de diriger cette pièce, car l’opinion de chacun comptait autant que la mienne. Le seul réel pouvoir que j’avais était mon droit de veto. Une grande part du travail sur les personnages devait venir des expériences et du passé de chaque acteur. Mes histoires étaient simplement un cadre à partir duquel ils devaient développer et créer leurs propres émotions. »
On sort de Based on a True Story un peu bouleversé, sans vraiment savoir si l’on y a aperçu nos vies ou celles des autres. Si vous cherchez à flatter vos illusions, n’allez surtout pas faire un tour du côté du TNC, de mercredi à samedi prochain, sur le coup de vingt heures.