Mercredi soir, la salle de concert Il Motore était pleine à craquer pour accueillir le groupe de post-rock Caspian, venu du Massachusetts. Le choix de Montréal n’était pas anodin, puisque c’est la première ville dans laquelle ils aient jamais joué, mis à part la leur.
La première partie, assurée par le groupe québécois La Querelle, a fait bonne impression, le groupe maîtrisant suffisamment ses morceaux pour être démonstratif. Le chanteur notamment, tour à tour extatique et hagard, a marqué les esprits. Ainsi le public était dans de bonnes dispositions pour accueillir Caspian.
Dès l’entrée du groupe sur scène, le ton est donné : vêtus de noirs, les musiciens annoncent l’atmosphère sombre qui habite leurs morceaux. Leur concert s’ouvre sur un discours préenregistré, prononcé d’une voix grave, martelant « Go all the way » (« Allez jusqu’au bout », ndlr ) à de multiples reprises, en évoquant tous les sacrifices que cela implique. Même de perdre un proche, tragédie vécue par le groupe en août suite à la mort de leur bassiste.
Mais quand la musique s’élève, tout est oublié : dans des ambiances plutôt lentes et graves, les mélodies s’entremêlent, et la foule est conquise.
Les premières notes de leur classique « Sycamore » sont accueillies par des applaudissements. La chanson débute avec une guitare sonnant comme un violon auquel de la saturation vient s’ajouter, et suit la structure de la plupart de leurs morceaux : une longue introduction, calme et étouffée, puis une montée en puissance annoncée par une batterie plus lourde et des guitares qui se complètent, formant des harmonies somptueuses, et enfin un final qui retombe, apaisant.
Puis, leur quatrième chanson, « Gone in bloom and bough », s’élève, éthérée et gracieuse. Il s’agit de la seule dans laquelle la voix est utilisée, mais elle est filtrée, transformée, pour qu’aucun mot ne reste. On la confond bientôt avec les instruments. Ce morceau se fait le reflet de l’œuvre de Caspian : une musique qui transcende les mots, pour dévoiler les émotions avec une plus grande pureté. Il suffit d’observer la foule, calme et admirative, bougeant simplement la tête, les yeux parfois clos, comme pour mieux s’imprégner de l’ambiance dégagée par le groupe.
Le fait que la scène soit si proche du parterre y est peut-être pour quelque chose, car cela rajoute encore un surplus d’intimisme à cette musique qui se passe de mots.
Au cours de leur performance, le terme « post-rock », qui qualifie la musique de ces Américains, prend tout son sens : si le rock est la musique de la rage, de la destruction, le post-rock est ce qui vient après. Ce qui, une fois que tout est aboli, fait résonner le silence.
Le final en apothéose voit les trois guitaristes et le batteur se rejoindre pour jouer à l’unisson sur quatre tambours, faisant trembler les tympans et les cœurs.
Quand Caspian se tait, le silence qui suit a quelque chose de musical.