Les groupes Amnistie Internationale McGill, David Suzuki McGill et Divest McGill ont rassemblé quatre experts, le jeudi 23 janvier dans le pavillon Leacock, pour discuter de changements climatiques et de droits humains. Étaient invités Peter Stoett, professeur au département de science politique de l’Université Concordia, Floris Ensink, président de Sierra Club Québec, un organisme environnemental à but non lucratif, Joanna Petrasek-Macdonald, du groupe de recherche d’adaptation aux changements climatiques de l’Université McGill et Katherine Lofts, chercheuse associée du Centre de droit international du développement durable. Ensemble, ils ont essayé d’apporter à leur auditoire des réponses à cette large question : en quoi y a‑t-il interaction entre changements climatiques et droits humains ?
Les aspects politiques, économiques et sociaux de la destruction de l’environnement ont été examinés. Le professeur Stoett évoque la tragédie des biens communs, principe économique selon lequel le conflit des intérêts individuels pour une ressource limitée mène nécessairement à sa surexploitation. Dans le cas de l’utilisation des énergies fossiles, un usage démesuré engendre une importante pollution de l’environnement. Il apparaît selon lui essentiel de légiférer dans ce domaine. Reste à savoir où situer la frontière entre une limitation raisonnable et des lois coercitives, néfastes aux libertés individuelles.
Il ajoute que, par exemple, les problèmes de santé liés à la pollution posent un vrai problème de droit, puisque des individus subissent les conséquences des actes des firmes polluantes. Joanna Petrasek-Macdonald s’intéresse, quant à elle, aux droits des minorités, de plus en plus importants dans le droit international. Elle évoque le cas des Inuits qui sont directement affectés par le changement climatique, car, pour eux, la glace et la neige ont une valeur culturelle. La défense de leurs territoires ancestraux peut être aussi bien liée à la cause environnementale qu’à celle de la protection des communautés autochtones.
Tous sont d’accord pour dire que la volonté politique de s’engager dans ces deux voies n’est rien sans le déploiement de moyens suffisants. Il existe en effet très peu de clauses concernant l’environnement dans le droit international. D’autre part, Katherine Lofts remarque qu’en pratique, les droits sociaux, contrairement aux droits politiques, sont rarement respectés puisqu’il n’existe pas vraiment de dispositifs légaux appropriés. La création de nouvelles lois et de nouveaux mécanismes, adaptés à chaque situation, est absolument nécessaire pour avoir un impact concret sur la vie des gens. Selon les experts présents lors du panel, il est primordial que le peuple, et notamment les jeunes, exerce une pression politique sur les gouvernements pour encourager ce changement. Enfin, Floris Ensink met l’accent sur les pays du Sud, dont certains, en pleine industrialisation, ne veulent pas qu’on leur ferme la porte du développement polluant à l’occidentale. Il explique la nécessité de programmes écologiques incluant ces pays, sans pour autant endiguer leur essor.
À l’échelle universitaire
Si Divest McGill a voulu contribuer à la mise en place de cette conférence, c’est pour « montrer l’évidence d’un tort social lié aux changements climatiques », comme l’explique David Summerhays, un des membres de l’organisation. L’implication des droits de l’homme serait donc une arme supplémentaire dans leur lutte pour faire désinvestir l’Université McGill des compagnies productrices d’énergies fossiles. Bien que l’Association Étudiante de l’Université McGill (AÉUM) ait adopté une motion l’engageant à mettre fin à ses propres investissements en février 2013, l’Université elle-même fait toujours barrage. Divest McGill considère que les arguments de l’association ne sont pas assez solides pour envisager une telle décision. Divest McGill espère, grâce à ce panel, établir un lien avec les autres associations avec qui Divest partage les mêmes objectifs, et ainsi augmenter leur influence sur le campus.