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La promesse d’un voyage intersidéral

La nouvelle installation numérique du duo Maotik & Fraction à la SAT.

Sébastien Roy

Qui n’est jamais allé s’égarer dans la « satosphère » passe à coté d’un autre univers, d’une autre dimension. Au 1201 Saint-Laurent, des marches illuminées conduisent à ce dôme de 18 mètres de diamètre, qui forme un écran de projections sphériques. Les spectateurs sont invités à s’allonger sur des coussins, et on plonge dans une expérience multisensorielle.

C’est dans cet espace que le duo Maotik & Fraction frappe à nouveau avec ObE, fort de son succès au très respectable festival Mutek. On peut qualifier cette création d’installation audiovisuelle interactive. Au centre de l’espace, un demi-diamant incrusté dans le sol clignote déjà. Tout autour se trouvent des chevalets d’acier, que les spectateurs sont invités à manipuler pendant les trente-cinq minutes de la représentation. Les portes se ferment, le voyage peut commencer. Les graphismes 3D déboulent dans tout le champ de vision et évoluent au rythme de sons industriels. Le ballet des lignes parallèles aux couleurs froides mime un mouvement d’ascension, direction la stratosphère. Mais pas question de nuages, ici on s’engouffre dans la matière. Les figures fractales au comportement erratique dessinent pourtant les traits d’une entité. On baigne dans une vision organique du processus artistique. Des atomes s’entrechoquent pour faire et défaire cette créature. Des code-barres aux accents cosmiques monopolisent l’espace. Ils semblent répondre aux pulsations du son, et participent à l’hypnotisation du spectateur.

Soudain, les lasers semblent se calmer. On peut alors accoster les chevalets aux allures futuristes. Dotés de capteurs infra-rouges, ils réagissent à l’approche de la main et coordonnent des notes industrielles à des apparitions sur la sphère. Le spectateur est rendu démiurge pour l’occasion. Un simple mouvement et des figures 3D d’influence glacière surgissent de tous les côtés. Les palettes s’illuminent et chacune produit un son différent. Des ampoules au sol viennent compléter cette réinterprétation de la matrice. Morpheus, sort de ce corps.

Les fractales reprennent ensuite leur danse effrénée et englobent l’audience, médusée.

On pourrait penser à une métaphore, mais ce n’est plus de mots dont il s’agit. À ce stade de la métaphysique, le spectateur en est remis à ses sensations, et peut interagir avec un concept abstrait. Les couleurs chantent en canon avec les tons syncopés, on sent l’adrénaline monter.

On se laisse forcément porter par cette pause vis-à-vis du monde extérieur. La projection se termine, et on s’éveille doucement de ce rêve. Quelques instants se passent avant que le public ne se décide d’applaudir de façon parsemée. Le temps de ne pas comprendre ce qui vient de se passer. Par un séduisant minimalisme, Maotik & Fraction auront convaincu tout le monde. Respectivement artiste multimédia et plasticien sonore, le duo Maotik & Fraction réussit avec ObE le pari d’une expérience unique. Déconseillé aux épileptiques.


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