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De l’eau sous les ponts

Retour sur l’année universitaire 2013–2014.

Si proche et pourtant si loin. Il s’en est passé des choses à McGill et à Montréal depuis septembre dernier. Pour ses lecteurs non-assidus ou pour ceux qui aiment tout simplement jeter un coup d’œil en arrière de temps en temps, Le Délit se propose de vous remémorer les événements de cette année universitaire, dans le cadre de sa dernière édition.

Tout d’abord, l’Université a changé de Principale. Suzanne Fortier, la première francophone à occuper ce poste, a officiellement pris ses fonctions le 5 septembre. Lors d’une entrevue avec Le Délit, elle avait alors cité comme principaux objectifs pour cette année l’amélioration de la transparence et des communications avec les étudiants, ainsi que sa propre intégration dans la communauté mcgilloise. Des défis relevés ?

L’administration a également passé un cap en créant son premier cours en ligne. « Chimie alimentaire », ou CHEM 181x, a propulsé l’Université dans une tendance internationale, que certains appelleraient l’éducation du futur. McGill est en train d’élaborer trois autres cours en ligne dans différents domaines. Les dates de réalisation n’ont pas encore été communiquées.

Les enjeux autochtones ont également occupé une part importante de l’actualité du campus. Le 20 septembre dernier, le Pow Wow sur le Campus Inférieur a lancé la semaine des Premières nations, qui a lieu tous les ans depuis 2011. Les jours qui ont suivi ont vu passer plusieurs conférences sur des thèmes comme les lois liées à la réalité autochtone ou encore la revalorisation de la médecine traditionnelle. De plus, McGill, qui était en retard par rapport à d’autres universités canadiennes telles que celle de Toronto ou celle de Colombie-Britannique, a avancé d’un pas dans les études autochtones. En effet, à partir de septembre 2014, les étudiants pourront choisir une mineure dans ce domaine ; ce programme regroupera des cours liés aux Premières nations appartenant à divers départements de l’Université.

L’écologie, et notamment les enjeux liés au pétrole, ont fait couler beaucoup d’encre durant l’année 2013–2014. On a vu l’association étudiante Divest McGill s’imposer comme un acteur incontournable sur le campus. Depuis septembre 2012, ses membres réclament que McGill, Université très impliquée dans divers projets environnementaux, désinvestisse ses quelques millions de dollars d’actions versés aux compagnies produisant des énergies fossiles. Ils ont suivi une démarche du Committee to Advise on Matters of Social Responsibility (Comité de conseil sur les affaires de responsabilité sociale, (CAMSR), ndlr) qui n’a jamais donné suite. Toutefois, l’Association Étudiante de l’Université McGill (AÉUM) a adopté une motion l’engageant à mettre fin à ses propres investissements en février 2013. Divest McGill a, par la suite, organisé plusieurs événements, dont des conférences et une protestation à vélo. Il y a onze jours, Amina Moustaqim-Barrette, une membre active de l’association, a été élue vice-présidente aux affaires externes de l’AÉUM. Une affaire à suivre de très près.

D’autre part, les conférences Pétrocultures ont aussi été un événement majeur. Les 6 et 7 février derniers, ces panels proposaient des réflexions sur les relations entre l’exploitation pétrolière et la culture, la démocratie ou encore les droits autochtones. Il est à noter que la deuxième journée a été perturbée par des manifestants qui ont occupé le lieu des conférences, le Cercle Universitaire de McGill, et qui ont bloqué l’accès à celui-ci et ont par la suite déroulé, depuis le toit, une bannière revendiquant leur protestation contre l’exploitation des sables bitumineux.

Cette année a aussi vu la naissance du nouveau café entièrement géré par les étudiants, Le Nid, qui a ouvert ses portes le 6 janvier. L’entreprise est globalement très appréciée par les étudiants, puisqu’elle propose des plats à prix abordables, et notamment végétariens. L’absence d’option de repas à petit budget avait été la cause de manifestations sur le campus en 2010, lorsque le café Architecture avait fermé.

La Table de concertation étudiante du Québec (TaCEQ) s’est effondrée cette année. L’organisation visait la discussion et la coopération entre les associations étudiantes de plusieurs universités. L’adhésion était trop chère et les bénéfices contestés. Le Regroupement des étudiants et étudiantes de maîtrise, de diplôme et de doctorat de l’Université de Sherbrooke (REMDUS) a décidé de quitter la TaCEQ en janvier, déclenchant presque immédiatement la création d’un référendum par l’AÉUM. La sortie a été votée à 81%, le 21 mars dernier. L’Association étudiante de l’Université Laval étant la seule restante dans la TaCEQ, l’organisation est de facto dissoute.

Enfin, cette fin d’année a vu le renouvellement de la direction de l’AÉUM, à l’issue d’élections plus ou moins controversées. Tariq Khan, dont le programme se basait principalement sur l’emploi étudiant dans tous ses aspects, a été élu président avec 29,8% des votes, à peine 80 voix d’avance sur sa concurrente Courtney Ayukawa. Claire Stewart-Kanigan, Stefan Fong, Kathleen Bradley, Amina-Moustaqim-Barrette et Daniel Chaim ont été élus respectivement vice-présidente aux affaires universitaires, vice-président aux clubs et services, vice-présidente aux finances et aux opérations, vice-présidente aux affaires externes et vice-président aux affaires internes.

La place du français à McGill

La langue de Molière a été clairement célébrée durant ces derniers mois. Outre l’attribution du poste de Principale de l’Université à une francophone, le campus a vu la création d’une troupe de théâtre en français, Franc-Jeu, qui commencera ses représentations l’année prochaine. Au programme : Le Malade Imaginaire et La Réunification des deux Corées de Joël Pommerat. D’autre part, Le Délit a été fier d’organiser « Méchante langue », une conférence entièrement en français, chose plutôt rare à McGill.

Un an à Montréal 

Il s’est également passé un certain nombre d’événements en dehors du campus de McGill. Les étudiants ont été immergés, pendant cette année à Montréal, dans d’autres enjeux locaux, mais aussi provinciaux. Tout d’abord, le débat autour de la Charte des valeurs, aujourd’hui projet de loi 60, a déjà fait du bruit pendant toute la session d’automne. La proposition du gouvernement péquiste, rappelons-le, vise à interdire le port de signes religieux « ostentatoires », c’est-à-dire très visibles, pour les employés du secteur public, ainsi que d’autres mesures liées à la laïcisation des représentants de l’État. La décision a polarisé l’opinion en « pro » et « anti » Charte, créant une controverse gigantesque et faisant descendre plusieurs dizaines de milliers de manifestants dans les rues de Montréal. Les partisans de la Charte ont insisté sur la lutte contre l’intégrisme et celle pour l’égalité des sexes, évoquant les femmes musulmanes obligées de porter le voile par leur conjoint.  La quasi-totalité des partis provinciaux et fédéraux se sont levés contre le projet. Le premier ministre Stephen Harper le regarde d’un très mauvais œil. Les communautés musulmanes et sikhes ont été au premier plan de l’opposition civile, dénonçant la Charte comme discriminatoire et liberticide. Beaucoup ont également pointé sa portée polarisatrice, une stratégie électorale du gouvernement Marois selon eux. L’adoption du projet de loi 60 est toujours en suspens.

Denis Coderre a été élu 44e maire de Montréal en novembre dernier, avec 32% des voix. Son programme était fondé sur les logements sociaux, notamment pour les sans-abris, et le concept de ville intelligente autour de la connectivité haut débit et l’innovation technologique. Des promesses qui semblent aboutir à quelque chose de concret, Coderre ayant été l’un des instigateurs d’un plan de logement social à l’échelle québécoise. Les jeunes ont pourtant été déçus de l’élection de Coderre, le croyant incapable de changer les choses.

Tout ce qui était actualité est déjà devenu histoire ; reste à savoir si ces événements auront des conséquences sur l’année prochaine, ou seront tout simplement oubliés.


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