Dans le cadre de la journée d’action contre la violence sexuelle faite aux femmes (JACVSFF), le vendredi 19 septembre, le regroupement québécois des centres d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (CALACS) et Trêve pour elles se sont joints pour organiser une mobilisation au métro Mont-Royal. Cette année, à l’échelle du Québec, le thème était l’inceste. L’événement, qui fait écho à la marche « la nuit, la rue, les femmes, sans peur ! » était accompagné d’un spectacle de danse. L’événement s’est terminé au Sporting Club avec des artistes venus apporter leur soutien en musique. Des experts de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) se sont également rendus disponibles au cours de la journée pour répondre à des questions.
Des mobilisations telles que la JACVSFF n’ont lieu que depuis les années 1970. Il convient de rappeler qu’il a fallu attendre 1983 et l’adoption de la Loi canadienne sur les agressions sexuelles pour qu’une plainte pour viol entre époux soit recevable par un tribunal. Selon la règle de l’exception maritale, les Canadiennes étaient jusqu’alors soumises au devoir conjugal, c’est-à-dire à l’obligation de se soumettre aux désirs sexuels de leur mari. Si la transformation des mentalités est perceptible, au demeurant encourageante, sa lenteur n’en demeure pas moins problématique. L’action de se rejoindre en collectivité a d’abord permis aux femmes de prendre conscience du discours stéréotypé qui consiste à justifier la violence des hommes par la loi de la nature. En se rassemblant pour analyser les sources de violences, elles ont généré un soutien aux victimes. « Trop souvent, les femmes et les enfants ne sont pas crus », dénonce-t-on à la JACVSFF. Leurs témoignages sont remis en doute et la responsabilité finit par leur en incomber injustement, décuplant leur sentiment de culpabilité. Comment l’instrumentalisation d’un enfant peut-elle se cacher sous le mot pédophilie ? Étymologiquement, pédophile vient du grec et signifie enfant et aimer. La violence sexuelle est trop souvent, et à tort, en plus d’être euphémisée, mêlée avec l’amour.
De plus, le spectre des agressions sexuelles est considérablement plus large que le petit mot tabou de quatre lettres. Le viol est relatif au coït mais lorsqu’on parle de violence faite aux femmes, on ne peut passer à côté des harcèlements, des menaces et des attouchements qui sont souvent difficiles à prouver.Il ne faut pas oublier que les victimes se trouvent à porter un fardeau ayant des conséquences traumatiques, renforcées à l’occasion par une victimisation secondaire. Les procédures judiciaires tendent souvent à faire revivre aux victimes l’événement violent et à remettre en doute leur parole en vertu de la présomption d’innocence.
Mélissa Blais, doctorante en sociologie et professionnelle de recherche au sien du Groupe interdisciplinaire de recherche sur l’antiféminisme, à l’UQAM, mentionne au Délit l’affaire Guy Cloutier et Nathalie Simard, en 2005, qui a encouragé des femmes à dénoncer les violences qu’elles ont subies. Elle rappelle que « l’organisation d’un rassemblement qui lutte contre la violence faite aux femmes, c’est aussi l’occasion pour des victimes de se reconnaitre dans les femmes qui dénoncent. D’autres ont la force qu’elles peuvent avoir aussi ». Au lendemain de la publication du rapport de l’UNICEF « Cachée sous nos yeux », la lutte contre la violence faite aux femmes et aux enfants ne fait que commencer.