Nous apprenons, dès notre plus jeune âge, à écrire notre nom sur nos devoirs d’écoles. Puis, nous prenons l’habitude de remplir différents documents d’inscriptions jusqu’au premier passeport.. Enfin nous atteignons la majorité, devenant, à part entière, un individu doté d’une identité – supposée – fixe reconnue par l’état et par nos pairs. Pourtant, le prénom et le nom de famille sont sujets à changements. Comment la modification de l’identité s’articule-t-elle avec le nom inscrit au registre ?
Ce que dit la loi
Il y a plusieurs raisons et façons de changer de nom. Pour ce faire, il faut passer soit par le tribunal, soit par le Directeur de l’état civil, selon les circonstances. Quelques exemples de motifs sont divulgués sur le site officiel du gouvernement du Québec tels que : « Un nom prêtant au ridicule ou frappé d’infamie (marqué par le déshonneur, la honte, l’indignité). Un nom d’origine étrangère, trop difficile à prononcer ou à écrire dans sa forme originale. » Les procédures sont clairement expliquées et si vous êtes tentés par la chose, l’accès à l’information est libre.
L’une des obligations liées au changement de nom m’a cependant paru plus discutable : « La personne qui présente une demande de changement de nom au Directeur de l’état civil doit obligatoirement, sauf si elle en est dispensée, faire connaître publiquement son intention ». Cette procédure consiste en la publication de deux avis à ce propos dans La Gazette officielle du Québec et de deux autres dans « un journal local publié dans le district judiciaire du domicile de la personne concernée par la demande. »
Sexe changé ? Dispensé !
Le problème semble avoir trouvé une solution pour ce qui en est des changements liés au sexe, Il existe en effet des dispenses, issues de la Loi modifiant le Code civil en matière d’état civil, de successions et de publicité des droits (2013, chapitre 27). Depuis le 1er mars 2014, les citoyens dont le changement de prénom est lié à une modification de l’identité sexuelle sont dispensés de telles publications. Un autre changement entrera en vigueur « à une date ultérieure qui sera fixée par le gouvernement », pour permettre la reconnaissance officielle du changement d’identité sexuelle d’une personne sans que celle-ci ne soit passée sous le scalpel ou ait ingéré des médicaments, l’exemptant alors aussi de montrer au grand jour dans les journaux sa transformation identitaire.
Le Moi et son ID
Certes, le nom ne fait pas le moine et je pense que nous ne nous limitons pas à notre identité administrative. Reste qu’elle influe quotidiennement sur la façon dont nous sommes perçus par nos pairs et sur la place – si petite soit-elle – que nous occupons dans notre société. Aussi l’exigence des avis publiés me semble-t-elle abusive. Une personne qui change d’identité est certainement soumise à des tourments et il me semblerait plus solidaire – cher ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale – de ne point l’obliger à le déclamer sur tous les toits. Plaider une cause et contourner des lois devant un tribunal pour obtenir le simple droit de ne pas s’exposer publiquement constitue, à mes yeux, un surplus de procédures qui ne peuvent contribuer au bien-être de personne.
M’apercevant que cette obligation permet à d’autres, dès lors avisés, de s’opposer au changement, je crois qu’elle constitue un problème dans une société dotée d’une Charte qui prône la liberté des citoyens. En tant qu’individu, je ne comprends pas pourquoi je n’aurais pas les pleins pouvoirs sur ma propre appellation. Il me semble qu’il est aujourd’hui nécessaire de s’attarder sur la liberté et le bien-être des personnes en se penchant sur le droit à l’identité dans le Code Civil.