La troisième convention annuelle du développement africain a eu lieu à McGill du 5 au 7 février derniers. Organisée par la McGill African Students Society (MASS) [Société des étudiants africains de McGill, ndlr], la conférence intitulée « revendiquer la réalité de l’Afrique sous toutes ses formes » visait à fournir une plateforme de dialogue pour revisiter les questions relatives au continent africain et à ses cultures. Ebuka Ufondu, président de la MASS, nous explique que ce thème a été choisi car il est important de regarder le continent africain et ses habitants à travers plusieurs points de vue, pour avoir une vision moins binaire du continent. La v.-p. social de la MASS, Bintou Diallo, explique que l’idée était de contester cette vision réductrice souvent ancrée dans nos esprits pour offrir aux étudiants de McGill une opportunité de repenser leur conception de l’Afrique. Afin d’atteindre cet objectif, les membres de l’association préparaient les événements depuis septembre dernier. Au programme cette année, des conférences sur l’afro-féminisme, sur l’afro-futurisme et une séance de discussion sur le développement de l’Afrique.
La conférence sur l’afro-féminisme s’est déroulée le samedi 7 février et avait pour objectif de nuancer l’image de la femme africaine, souvent vue soit comme une victime, soit comme une mère. Pour cela, quatre intervenants étaient invités : Mme Letty Chiwara, représentante d’ONU Femmes en Éthiopie, à l’Union Africaine et à la Commission Économique des Nations Unies pour l’Afrique ; Mme Marieme S. Lo, maître assistante en études des femmes et du genre, ainsi qu’en études africaines à l’Université de Toronto ; Monica Popescu, professeure agrégée au Département d’anglais de l’Université McGill ; et M. Uzoma Esonwanne, professeur agrégé au Département d’anglais et au centre de littérature comparée de l’Université de Toronto.
Lors d’une discussion modérée par Sta Kuzviwanza, étudiante en économie et études africaines, chacun a mis à profit son expertise sur trois grandes questions : la perception occidentale de la femme africaine, l’importance de l’éducation pour éviter l’émergence d’une conception erronée de celle-ci, ainsi que la place des femmes dans le développement de l’Afrique. Les panélistes ont apporté des réponses diverses à ces questions mais ont tous souligné l’importance de donner une voix à ces femmes, trop souvent oubliées. Tous étaient d’accord pour dire que les femmes sont, dans beaucoup de pays et de communautés, les moteurs du changement social, mais que leur représentation n’est pas toujours à l’échelle de leur importance. La discussion s’est terminée sur des questions d’élèves adressées aux différents panélistes.
La conférence a été un succès, se déroulant dans une salle quasi pleine en ce samedi après-midi devant un public captivé. Les panélistes, eux, étaient contents de participer à cette discussion mais aussi de pouvoir s’exprimer sur un sujet peu abordé en Amérique du Nord. En effet, Mme Chiwara a affirmé être heureuse de constater la forte demande pour ce type de discussion à McGill, et a avoué qu’avant de venir, elle se demandait ce que les étudiants savaient vraiment du féminisme en Afrique. De son côté, Mme Lo nous a expliqué qu’elle trouve le thème stimulant intellectuellement, et que venir participer à la conversation était une façon de supporter une initiative étudiante intéressante. Finalement, toutes les deux étaient d’accord pour dire qu’il est important de changer les discours utilisés pour parler de la femme africaine, et que ce genre de discussion était donc une bonne opportunité pour donner une voix à la femme africaine dans le monde occidental.
Du côté des étudiants, la curiosité semblait être la première motivation. Jacob Omorodion, étudiant en sciences politiques, a expliqué qu’il était venu par intérêt, mais aussi parce qu’il n’avait jamais eu l’occasion de voir interagir le féminisme et l’Afrique. Pour lui, ce genre de discussion est nécessaire et en tant qu’université représentante d’un corps étudiant international et varié, McGill se doit d’accueillir ce type de panel.
D’autres conférences ont animé ce congrès qui s’est terminé le samedi 7 février avec comme événement de clôture la venue de Binyavanga Wainaina, journaliste et écrivain kenyan. Pour M. Ufondu la convention a été un succès, avec un public nombreux chaque jour. Pour lui, le succès a été rendu possible par le thème qui rassemblait les différents événements, une durée de trois jours consécutifs au lieu de quatre (comme l’an dernier), et des intervenants plus renommés que pour les éditions précédentes, dont Binyavanga Wainaina en tant qu’intervenant principal.