Jeudi 14 Janvier 2016, à l’Université de Montréal (UdeM), la Ministre du Commerce International, Madame Chrystia Freeland, participait à une conférence organisée par le Centre d’Études et de Recherches Internationales de l’Université de Montréal (CÉRIUM), dans le cadre du processus de consultation publique que le gouvernement Trudeau s’est engagé à tenir sur le Partenariat transpacifique (PTP). Ce traité qui implique à ce jour une douzaine de pays, et qui pourrait représenter près de 40% de l’économie mondiale, vise essentiellement à accroître le libre-échange entre les pays signataires à travers la réduction des barrières tarifaires reliées à l’investissement, le renforcement des règles liées à la transparence dans les échanges commerciaux, la création d’emplois, et l’innovation technologique. Il faut donc reconnaître que la ratification de ce traité représenterait un tournant historique concernant les efforts alloués par les États à la coopération internationale.
Et la Chine dans tout cela ?
Considérant tous les bénéfices énumérés ci-dessus, on peut toutefois se demander pourquoi la Chine, qui est maintenant un incontournable de l’ordre économique mondiale, n’a pas pris part aux négociations. Cet aspect reste malheureusement très négligé par les analyses relatives à cet accord. Cette absence des radars nous révèle surtout qu’au-delà de l’économie, le PTP, s’il est ratifié, aura aussi d’énormes conséquences géopolitiques sur l’Asie de l’est. La vérité dans ce sens est que, même si le Canada ne ratifie pas le traité, notre pays, en plus d’un potentiel isolement économique et d’une perte d’opportunités vers de nouveaux marchés, devra aussi composer avec les conséquences géopolitiques et stratégiques inhérentes à ce dernier. Ainsi la question de savoir ce que feront les décideurs chinois si ce traité rentre en vigueur, devient primordiale. La Chine sera-t-elle victime de la puissance d’attraction du traité ? Finira-t-elle par se conformer aux standards mis en place par le groupe comme cela a été le cas avec l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) en 2001 ? Quels sont les pays potentiellement en faveur et en défaveur de l’entrée de la Chine dans ce nouveau G12 économique ?
Une croissance qui dérange
Au-delà de l’attraction économique, seule une analyse géopolitique nous offrira les éléments de réponses à ces questions. À cet effet, la non-invitation de la Chine au processus de négociations commencé depuis 2008, est symptomatique des inquiétudes que sa croissance actuelle ainsi que les différentes rivalités territoriales en mer de Chine méridionale, posent à des États tels que le Japon, l’Australie et Singapour. Pour eux, cet accord signifie, par procuration, une présence accrue des États-Unis, leur allié offshore dans la région. À cela, les États-Unis auront donc un rôle déterminant à jouer concernant le future du PTP et surtout concernant la stabilité de la région. Quant au Canada, même s’il est vrai que nous n’avons pas directement un rôle à jouer dans la présente tentative d’endiguement contre la Chine, cela ne signifie pas pour autant que nous ne devons et pouvons rien faire par rapport au futur de notre relation avec la Chine et nos alliés dans la région.
Ainsi, l’approche diplomatique et multilatérale mise de l’avant par le gouvernement Trudeau et expliquée par la Ministre Freeland lors de la conférence pourrait, si elle continue d’avancer dans cette direction, devenir la clé d’une implication canadienne flexible et réaliste en Asie de l’est.
Enfin, comme la ministre Freeland l’a expliqué, le traité, après les consultations publiques et les débats au Parlement, sera à prendre ou à laisser. À cet effet, le gouvernement libéral aura la responsabilité de convaincre la population canadienne qu’en plus des retombés économiques, ce traité marquera un pas de plus vers notre retour sur la scène internationale.