Dès le départ, le pari de Bombardier de s’attaquer au marché des jets de 100 à 150 passagers semblait risqué. Jusqu’à présent, les Goliath de l’industrie, l’américaine Boeing Co. et l’européenne Airbus, se partageaient 95% des parts de ce marché, évalué à plus de 100 milliards de dollars annuellement. On ne peut donc pas en vouloir à cette dernière d’avoir voulu jouer dans la cour des « grands » en s’ouvrant à ce nouveau marché. En comparaison avec les avions commerciaux de ses compétiteurs, la gamme Séries C lancée par Bombardier, offre une économie de plus de 20% sur le plan de consommation de carburant. En effet, grâce à un moteur turbopropulsé, elle offre une diminution de plus de 30% des coûts comparativement aux avions à réactions actuels dont il souhaite prendre la place.
Après un autre quart financier décevant pour Bombardier, les dirigeants ont indiqué que la compagnie va réduire son effectif mondial de plus de 10% au cours des deux prochaines années. Concrètement, ce sont plus de 2800 emplois qui seront perdus au Canada, dont 2400 au Québec. Bombardier a dilué la nouvelle en annonçant une commande de plus de 45 avions de la Série C de la part d’Air Canada, avec une option d’achat de 30 autres appareils. Évaluée à plus de 3,8 milliards de dollars américains, cette transaction, couplée à l’annonce de restructuration, a donné un véritable regain à l’action de Bombardier. Cette dernière a en effet bondi de plus de 60% depuis l’annonce de la nouvelle la semaine dernière offrant ainsi un second souffle plus qu’attendu pour le titre financier qui a chuté de plus de 40% au cours de l’année passée.
Favoritisme
Alors que le gouvernement provincial a préféré investir près d’un milliard de dollars canadiens dans Bombardier, au détriment des services sociaux offerts à la population, les Québécois ne sont pas les seuls à voir d’un mauvais œil l’aide du gouvernement à Bombardier. En effet, le gouvernement fédéral envisage lui aussi d’offrir une aide financière à Bombardier évaluée entre 1 et 2 milliards de dollars canadiens. La première ministre de l’Alberta, Rachel Notley, profite de cette occasion pour rappeler au gouvernement fédéral que les Québécois ne sont pas les seuls à avoir besoin de cette aide gouvernementale. En entrevue avec Radio-Canada, Notley a rappelé que les compagnies canadiennes de sables bitumineux ont aussi besoin de cette aide gouvernementale. Cette prise de position de la première ministre albertaine démontre un certain regain de tension entre le reste du Canada (ROC, Rest Of Canada, ndlr) et le Québec. Depuis de nombreuses années, l’ouest canadien dénonce le « favoritisme » du gouvernement fédéral envers le Québec, renforçant de surcroît cette image d’enfant gâté que le ROC se fait du Québec.
Aussi, le gouvernement fédéral a promis plus de 250 millions de dollars du fonds de stabilisation du Canada à la province albertaine. L’Alberta compte sur la promesse du gouvernement libéral d’investir plus de 700 millions de dollars en infrastructure. Que l’on soit en faveur ou non de l’exploitation des sables bitumineux, une aide du gouvernement fédéral serait difficilement acceptée par les autres Canadiens, surtout après le refus du Québec d’accepter le passage des pipelines albertaines sur son territoire.
Suite au contrecoup de l’épisode Rona de la semaine dernière, il est intéressant de remarquer que finalement il importe peu que le gouvernement québécois intervienne financièrement auprès des compagnies provinciales, ses décisions ne feront apparemment jamais l’unanimité auprès des habitants de la belle province.
Bombardier :
Cours de l’action : 1,24 $ (+8,77 %).
Siège social : Montréal.
PDG : Alain M. Bellemare.
Création : 1942, Valcourt.
Chiffre d’affaire : 18,2$ Milliards (2015).
Résultat net ajusté : 326$ Millions (2015).