« Yo, idée pour édito ? » Quatre mots qui résonnent comme les quatre syllabes de démocratie. Dé-mo-cra-tie. Quel-beau-Dé-lit.
Vous voilà plongés dans le processus de décision consensuel pour l’éditorial représentatif de l’équipe du Délit. Ce dimanche, sur la conversation Facebook « Délit Officiel », la proposition fut lancée : « Et si on parlait culture pour une fois ? Ça change de l’AÉUM. »
Qui a le droit ?
Affirmer notre point de vue sur la vitalité de notre culture en tant que seul journal francophone dans une université qui, dans une des villes francophones les plus dynamiques en termes de culture, oublie parfois son environnement… Logique et nécessité.
Faire une ode à ces créations artistiques qui se retrouvent chaque semaine dans nos pages… Facilité et légitimité.
Écrire un éditorial sur la liberté, l’insolence, l’innovation de la culture québécoise alors que notre équipe est en grande majorité constituée de Français « de France»… Risque d’observation ethnologique et point de vue biaisé.
Minorité ou concentré
Dans les sections Actualités, Société et — bien évidemment — Culture, l’identité et l’élan continu de la culture québécoise ont fait les titres cette semaine.
Hubert Aquin (p.14) et Claude Jutra (pp.6 et 15) nous évoquent l’histoire de notre vie culturelle par deux grandes figures d’une identité québécoise encore en formation pendant la Révolution tranquille : entre celui qui a choisi la voie indépendantiste révolutionnaire et celui beaucoup plus en retrait mais au rôle néanmoins important pour l’affirmation d’une culture propre au Québec. Une histoire qui aujourd’hui encore est ancrée dans la province à travers son héritage et la postérité de ces artistes, mais aussi par la brûlante polémique autour de Claude Jutra.
Notre longue entrevue avec le groupe de post-rap Dead Obies laisse voir que la culture québécoise investit d’autres espaces, moins conventionnels, et par le passé largement anglophones.
Et le milieu étudiant ?
McGill reste souvent « hors-jeu » quand il s’agit de culture québécoise, mais Le Délit a pour rôle de faire éclater la fameuse bulle en rencontrant régulièrement des artistes francophones de Montréal et en couvrant des événements mettant à l’honneur la culture de notre province — comme les Rendez-vous du cinéma québécois cette semaine (pp. 12 et 13).
À la suite d’Hubert Aquin et de son grand article « La fatigue culturelle du Canada français » publié dans Liberté en 1962, une idée forte s’est développée au Québec, l’idée que la culture québécoise se serait faite à côté de l’Histoire, car prise entre deux cultures dominantes : la culture anglophone de l’Amérique du Nord et la culture française du colonisateur.
Le Délit pourrait se désoler d’être dans la même position au sein du bastion mythique anglophone de McGill, forteresse érigée au centre de la plus grande métropole de la province. La question de la minorité culturelle se pose, et avec elle celle de l’affirmation et du rayonnement d’une identité et d’une langue.
Une culture étouffée par le confinement ? Ce n’est pourtant pas ce qui se défend dans nos pages cette semaine : le Québec joue le cadre d’un microcosme culturel où la force de la création est livrée en concentré. Peut-on filer la comparaison avec Le Délit ?