Le 17 février dernier Carlos Leitão, ministre des Finances du gouvernement québécois, a présenté son nouveau « Plan pour la réussite en éducation », remettant ainsi sur la table un sujet que les années d’austérité avaient mis en marge. Sur une période de trois ans le gouvernement promet donc de réinvestir près de 1,2 milliard de dollars dans le secteur afin de rénover les infrastructures et favoriser la réussite scolaire. Un plan ambitieux qui veut se poser comme la bouée de sauvetage d’un système en déclin mais qui laisse les syndicats et les commissions scolaires dubitatifs.
Des bâtiments en fin de vie
En effet, au cours des dernières années pour la province, force a été de constater que la décadence du parc immobilier d’écoles québécoises devait être traitée de manière urgente. Or en début d’année, le journal La Presse dévoilait que presque 80% des établissements de la Commission scolaire de Montréal (CSDM) obtiennent la pire note possible en terme de vétusté et ce malgré le fait que le problème ait été soulevé dès 2014. Pour répondre à cela, le budget Leitão prévoit d’investir près de 700 millions de dollars, dont 200 cette année, dans la rénovation et la reconstruction des écoles québécoises, une somme qui reste insuffisante aux yeux de la Commission. La présidente de cette dernière a confié à Radio Canada qu’«avec 200 millions pour l’ensemble du Québec, là, c’est environ une dizaine ou une douzaine de projets dans l’ensemble du Québec de reconstruction totale ». Un nombre dérisoire lorsque l’on sait que dans la seule ville de Montréal 82 établissements devraient normalement faire l’objet d’une reconstruction ou d’une réhabilitation majeure tandis que 134 autres sont dans un état « préoccupant ». Si le gouvernement Couillard dit consacrer ses efforts à l’éducation, il semblerait toujours que cette dernière soit reléguée au second rang au profit du financement de la dette publique.
Les universités continuent d’être livrées à leur propre sort
Mais la rénovation des écoles n’est pas le seul domaine lésé par ce plan économique. Effectivement, ces investissements dans l’éducation adressent de manière minime les demandes du milieu universitaire. Pour la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), « la hausse des budgets à 1,7 % en 2016–2017 ne répondra pas aux besoins du réseau », un réseau qui a particulièrement souffert ces dernières années des coupes budgétaires — qui ont été de 72 millions de dollars en 2015, de 200 millions en 2014 et qui pourraient bien continuer en 2016. Toutes les universités de la ville de Montréal ont dû réduire le choix des cours proposés aux élèves et certaines, par exemple l’Université de Laval, ont dû concentrer leurs efforts dans des campagnes de financement extensives, au détriment de la vocation éducative de leurs institutions. Augmenter les subventions de fonctionnement des universités québécoises est aujourd’hui nécessaire si la province désire conserver son rayonnement fédéral et international, mais l’investissement intensif dans l’éducation que le gouvernement a fait miroiter durant ces derniers mois n’est en réalité que très limité.
Une rhétorique confuse
Les mesures prises n’auraient sûrement pas fait l’objet de tant de critiques si elles n’avaient pas été vendues de la sorte par le ministre. Les associations dénoncent aujourd’hui un manque de clarté de la part du gouvernement. La Centrale des syndicats du Québec ne comprend pas comment la province peut augmenter le budget du financement de la dette publique de 42%, celui de l’éducation de 3%, et dire dans son discours que ce dernier est la priorité phare de 2016. Les mesures prises sont un signe optimiste que le Québec est peut-être bien en train de sortir de sa phase d’austérité. Le gouvernement a décidément fait un pas dans la bonne direction, mais la route est encore longue.