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Budget provincial 2016–2017

Le Délit décortique le 3ème budget provincial du gouvernement Couillard.

Matilda Nottage

Un budget équilibré est de nouveau au menu cette année. En effet, jeudi dernier, M. Leitão, ministre des Finances du gouvernement Couillard, a présenté son nouveau budget pour l’année fiscale 2016–2017 et sans surprise, l’équilibre budgétaire était de mise. Mieux, le budget de cette année devrait permettre de dégager un surplus de deux milliards de dollars. M. Leitão se félicitait ainsi d’avoir « remis la maison en ordre ». Des services sociaux et de santé aux entreprises, en passant par l’éducation, de nouvelles infrastructures, et un nouveau bouclier fiscal, ce troisième exercice budgétaire semble toucher à tout. Le Délit décortique pour vous ce budget tout neuf.


Des chiffres sur des mots

Cette prochaine année fiscale s’annonce être l’année des records. En effet, ce ne sont pas seulement les revenus, mais aussi les dépenses de la Belle Province qui passent la barre des 100 milliards de dollars. Denis Coderre a annoncé sa satisfaction envers le nouveau budget provincial, mais tout le monde n’est pas du même avis. En effet, cet exercice budgétaire a déclenché moult réactions auprès des partis d’opposition, ces derniers le jugeant encore beaucoup trop austère pour le contexte de ralentissement économique actuel. Cela s’explique par le fait que seulement certains programmes, tels que RénoVert, seront financés par des programmes existants, comme la taxe carbone payée à la pompe à essence. D’autres programmes, comme la rénovation des écoles, seront financés partiellement par une réallocation de fonds. Cependant, une augmentation des fonds injectés dans les programmes gouvernementaux signifie soit une hausse des recettes du gouvernement, soit une réduction de ses dépenses. Et pour l’exercice fiscal 2016–2017, les deux seront de mise. 

Dans un premier temps, certains ministères continueront leur régime minceur lancé lors du précédent budget. Par exemple, la Direction des poursuites criminelles et pénales verra son budget amputé de plus de cinq millions de dollars. Dans un second temps, le gouvernement Couillard a renouvelé son ambition de simplifier et alléger le complexe administratif québécois.

Sur le plan des recettes, le gouvernement continue de capitaliser sur ses monopoles gouvernementaux : Loto-Québec et la Société des alcools du Québec (SAQ). En effet, cette année, la SAQ a rapporté dix millions de dollars de recettes supplémentaires par rapport à l’an passé, et ce chiffre devrait doubler au cours de l’année qui vient. En tout, ces deux entités ont rapporté 48 millions de dollars de recettes supplémentaires au cours de l’année passée, et cette croissance ne devrait pas s’arrêter au cours des prochaines années.

De son côté, la dette augmentera de 5 milliards pour atteindre les 213 milliards l’année prochaine. Ceci s’explique en partie par l’investissement provincial dans les Séries C de Bombardier. 

Le service de la dette provinciale devrait alors coûter pas moins de 10 milliards de dollars aux habitants de la province. Mais tout n’est pas noir de ce côté puisque grâce au fonds des générations, le ratio dette-PIB québécois devrait se maintenir autour des 55%. M. Leitão a ici aussi réitéré son intention de réduire ce ratio autour des 50% d’ici à la fin du mandat du gouvernement Couillard.


Aide à la consommation verte et réhabilitation de mines

Lors de la présentation de l’exercice budgétaire, le gouvernement Couillard a annoncé la mise en place du programme RénoVert. Ce programme, ayant un coût évalué à 175 millions de dollars pour le prochain exercice fiscal, vise à encourager les Québécois et les Québécoises à rénover leur maison de façon écoresponsable. Au travers de ce programme, les citoyens de la Belle Province recevront 20% de leurs dépenses de rénovation sous la forme de crédit d’impôt à la condition que les matériaux utilisés soient certifiés « écoresponsables ». Avec un plafond de 10 000 dollars, ce programme est une aubaine à la fois pour les producteurs de matériaux « verts » et pour les avocats d’un Québec plus sensible à la cause environnementale.

Le nouveau budget ne s’arrête pas là puisqu’il prévoit aussi une accélération de la décontamination des sites miniers québécois. De nouveau, le gouvernement essaie ici de faire un investissement à la fois économique et écologique. À ce jour, le Québec compte presque 500 mines abandonnées dont un certain nombre sont à ciel ouvert. Leur réhabilitation devrait permettre un retour de la faune et de la flore dans ces milieux complètement défrichés. Mais si ce programme répond à des considérations environnementales, il apporte aussi un second souffle à ces régions durement touchées par le ralentissement de l’activité minière au Québec. 

En accélérant la cadence, le gouvernement provincial prévoit d’avoir réhabilité au moins 80% des sites miniers abandonnés au Québec d’ici 2021. 

En résumé, ce nouveau budget semble s’inscrire dans l’optique d’un Québec plus vert au cours des prochaines années, même si, pour les plus sceptiques, ces programmes ne sont pas encore suffisants.

Matilda Nottage

L’éducation, la santé et les services sociaux 

Historiquement les plus grosses dépenses du gouvernement, les budgets de l’éducation, et de la santé et des services sociaux représenteront respectivement 17,2 milliards de dollars et 33,7 milliards de dollars de dépenses lors de la prochaine année fiscale. 

Ainsi, le budget de l’éducation augmentera de 3% cette année. En comparaison, il avait augmenté d’un maigre 0,9% au cours de l’exercice dernier. Il permettra une augmentation de 1,7% du budget accordé aux universités. Deux fonds seront également débloqués. Le premier, d’une valeur de 200 millions de dollars sera principalement utilisé pour rénover des écoles, tandis que le second, d’une valeur de 164 millions de dollars, aura pour but de lutter contre le décrochage scolaire. 

Si cette augmentation est saluée, elle ne satisfait pas tout le monde. Jacques Létourneau, président de la Coalition Avenir Québec, expliquait que le gouvernement ferait mieux d’investir le surplus budgétaire dans l’éducation des jeunes Québécois plutôt que de le placer dans le fonds des générations, destiné à réduire le poids de la dette québécoise. 

De son côté, le ministère de la Santé verra son budget augmenté de près de 2,4% en 2016–2017. Mais la nouvelle est loin de faire l’unanimité. En effet, seulement 88 millions de dollars du budget supplémentaire seront destinés aux usagers tandis que 454 millions de dollars iront aux hausses salariales. Selon les mots de Pierre Blain, porte-parole du Regroupement des comités d’usagers, « on a l’impression que les travailleurs se sont mis les mains dans le pot de bonbons ». De leurs côtés, les unions pro-gratuité de la Santé, telle que la Coalition solidarité santé, dénoncent le fait que les augmentations promises cette année ne suffiront même pas à « maintenir le niveau de service de l’an dernier, qui ne maintenait pas lui non plus le niveau de l’année précédente ! »


Bouclier fiscal et nouvelles infrastructures

Si l’éducation et la santé représentent une partie importante des augmentations budgétaires, ce ne sont pas les seules mesures à avoir été présentées jeudi dernier. M. Leitão a dévoilé jeudi dernier son nouveau bouclier fiscal. Ce dernier, après implémentation, devrait alléger la facture fiscale des petites et moyennes entreprises (PME) de pas moins de 280 millions de dollars au cours des cinq prochaines années. Ce bouclier semble être la réponse du gouvernement Couillard aux nombreuses accusations de l’opposition. En effet, cette dernière accuse le gouvernement libéral d’avoir tué la croissance économique et la consommation des Québécois au travers de ses nombreuses mesures d’austérité.

La Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ) a favorablement accueilli le nouveau budget Leitão. Elle a notamment souligné l’importance de ce bouclier fiscal en tant que moteur de croissance. Selon elle, ce crédit d’impôt va permettre d’inciter les Québécois au travail. Elle souligne aussi que ce nouveau budget répond à leurs attentes dans les secteurs de l’agroalimentaire, du tourisme et de l’accès à l’énergie.

Pour autant, cette dernière initiative pourrait devenir sujette à controverse au cours des prochains mois. En effet, elle offrira un rabais sur la facture d’électricité aux grandes entreprises manufacturières ou dans le domaine de la transformation de ressources naturelles. Ainsi jusqu’à 40% des coûts d’un projet d’investissement pourront être remboursés par le biais de cette initiative. 

Si elle est saluée par ses bénéficiaires et va certainement déclencher une nouvelle vague d’investissement dans l’ensemble de ces secteurs, cette clause du budget pourrait passer de travers auprès des détracteurs du gouvernement. Il y a un mois, l’investissement du gouvernement auprès des séries C de Bombardier avait déjà déclenché une vague protestataire dans la population de la province. Beaucoup se plaignaient du fait que le gouvernement privilégiait les grandes multinationales eau lieu des petites entreprises locales.

En matière d’investissement, M. Leitão a bien souligné l’importance de Montréal au Québec puisque la ville récoltera près du tiers du budget infrastructures du gouvernement provincial. Cela permettra d’alléger celle-ci du poids de ses dernières larges dépenses telles que les nouvelles rames de métro. Le gouvernement du Québec devrait ainsi aider la ville de Montréal à financer ses nouvelles rames de métro ainsi qu’à maintenir et rénover ses infrastructures routières.

Le nouveau budget semble, ici encore, mettre l’accent sur un gouvernement plus proactif envers les pôles majeurs de son économie.


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