Mis à part, peut-être, les jardins botaniques et la voix de Stan Getz, il semblerait qu’il existe peu de choses aussi relaxantes que les courts métrages de l’Office national du film du Canada. La structure familière de la phrase qui précède fera sourire les plus fidèles d’entre vous, non sans une fâcheuse impression de déjà-vu. Il y a près d’un an, Le Délit publiait une petite enquête sur les sentiers des dessins animés et courts métrages expérimentaux canadiens de la planète www.onf.ca. Il est grand temps de donner suite à ce premier volet que l’on surnomme « reviens ».
Cette fois ci le voyage démarre avec L’Homme sans ombre, un véritable tableau vivant et mouvant animé par le cinéaste Georges Schwizgebel. L’histoire s’inspire d’un conte surréel qu’Adelbert von Chamisso achevait en 1814, dans lequel un homme accepte d’échanger son ombre contre la bourse de Fortunatus : objet magique qui le rendra riche jusqu’à la fin de sa vie. C’est sans prétention que la trame visuelle de Schwizgebel suit les étapes d’un récit qui, dans les règles de son genre, cherche à édifier son public. C’est pourtant avec une grande liberté que le focus du film tourne autour du héros, que des formes abstraites se fondent en décor mondain, que l’on passe du gris à une palette haute en couleur et que la musique, les bruitages, accompagnent les images sans jamais les brusquer.
Il nous faudra alors quelques minutes pour méditer sur ces coups de pinceau frétillants avant de jeter l’ancre du côté de La carte impossible, pour un bref cours de cartographie à l’aide d’un pamplemousse. Déjà en 1947, les animateurs de ce grand-père du tutoriel tentaient de déjouer les lois de la géométrie en représentant à plat notre planète qui, jusqu’à preuve du contraire, est de forme sphérique.
Si le sérieux de ce format éducatif manque de vous assommer, il n’est peut-être pas trop tard pour embarquer sur le navire parodique de Pimp my botte (Rénover mon bateau ndlr). Une esthétique qui rappelle le dessin animé Futurama, un slang acadien quasi-incompréhensible, de la musique techno dans un tout qui se moque gentiment de l’émission américaine de restauration de voiture Pimp my ride. Remercions Marc Daigle pour cette idée loufoque et l’emploi audacieux du mot « botte » pour dire « boat » : il est vrai que le Canadien français aime jouer avec le bilinguisme.
Ceux pour qui ce manque de goût arrachera un soupir exaspéré choisiront alors de toquer à la porte de Chaque enfant, qui remporta l’Oscar du meilleur court métrage d’animation en 1979. Pour commémorer la déclaration de l’UNICEF sur les droits de l’Enfant, Eugene Fedorenko réalisait une satire douce au trait inimitable et dans laquelle gribouillis et caricatures font très bon ménage.
Si vous pensiez arriver enfin à la fin de ce jeu, détrompez-vous. La vérité c’est que le voyage vient tout juste de commencer. Parfaitement conscients du costume cliché que cette conclusion enfile, permettez-nous de friser l’incompétence une dernière fois tant il est facile de se reposer sur la bienséance des expressions toutes faites. Qui sait, on se retrouvera peut-être dans un an ?