Le Café Nocturne accueillait le vendredi 18 novembre la première des « causeries HANY », organisée par l’association mcgilloise du même nom. Créée en début d’année, cette association a pour but de promouvoir l’intégration des réfugiés au Canada, notamment en proposant des cours de langues anglaise et française. La causerie portait sur la montée de la xénophobie en Europe et aux États-Unis dans le contexte de la crise des réfugiés syriens.
Afin d’alimenter la discussion, l’association avait convié trois panélistes : Dave Anctil, professeur de philosophie au Collège Jean-de-Brébeuf, Danièle Tayar, enseignante en gestion et conférencière en relations et communication interculturelles, et Lionel Fritz Adimi, politologue et conseiller politique du ministre des Forêts, de la Faune et des Parcs. Cet événement a donné lieu à une discussion animée, questionnant quelques-uns des enjeux de la percée des partis d’extrême-droite et de la xénophobie en Europe et en Amérique du Nord.
Mme. Tayar a ouvert la discussion en évoquant le rôle du manque d’opportunités socio-économiques d’une partie de la population dans la montée de la xénophobie. Elle a notamment expliqué que les craintes de certains citoyens pour leur avenir jouaient un rôle clé dans leur rejet des réfugiés. M. Anctil a lui aussi pointé du doigt le rôle de la vulnérabilisation économique de la population européenne dans la montée de la xénophobie et des discours identitaires en Europe. Ces premières interventions ont donné lieu à de vives réactions dans le public, l’un des invités dénonçant le « déni » des panélistes du racisme systémique auquel font face les citoyens d’origine arabe en France et au Québec, ainsi que son importance historique dans la construction d’un discours xénophobe.
Une réponse internationale insuffisante
La discussion s’est poursuivie sur le rôle de la communauté internationale dans la crise des réfugiés. M. Anctil a expliqué que cette dernière n’avait pas été pas à la hauteur des responsabilités auxquelles elle s’était engagée, et devait donc être tenue responsable de la crise humanitaire actuelle. « La dette morale des États européens, du Canada, des États-Unis et de l’Occident de manière générale est énorme », a‑t-il ajouté, soulignant les disparités d’accueil entre des pays comme le Liban, l’Iran ou la Turquie — qui accueillent chacun plusieurs millions de réfugiés — et certains pays de l’espace Schengen. M. Adimi s’est quant à lui penché sur la question de la montée des partis d’extrême-droite en Europe, expliquant que la crise des réfugiés avait eu un « effet d’amplification ». Il a également dénoncé l’instrumentalisation par les partis d’extrême-droite de cette crise humanitaire et de la méfiance qu’elle génère.
Réinventer le politique
La causerie s’est finalement tournée sur l’essor de la xénophobie aux États-Unis. M. Adimi a notamment souligné le rôle des attentats dans la banalisation des discours xénophobes au sein de la société américaine. La discussion s’est achevée sur une analyse de la victoire récente de Donald Trump aux élections présidentielles américaines, une actualité que la conférence n’a su éviter. Les panélistes ont identifié le rejet des élites politiques et médiatiques par une frange de la population comme l’un des facteurs principaux de l’attrait du populisme et des discours xénophobes. La nécessité de réinventer le politique et de répondre aux inquiétudes socio-économiques afin de faire face à la montée de la xénophobie est particulièrement ressortie des interventions des conférenciers.
Les questions abordées lors de la causerie ont donné lieu à des discussions virulentes entre les membres du panel et le public. Toutefois, malgré la tension ambiante, cet évènement a eu le mérite d’ouvrir le débat sur la résurgence de la xénophobie dans le contexte de la crise syrienne, et d’apporter des éléments de réponse sur les moyens d’y faire face.