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Le Québec et l’ambiguïté nationale

Élections provinciales québécoises 2018 : Le Délit analyse la campagne électorale. 

George Kaplas

Le Québec retourne aux urnes en octobre. Toutefois, cette campagne électorale a de particulier qu’on a pratiquement éjecté hors de celle-ci la question de la souveraineté politique de l’État québécois.

Pour les électeurs québécois, le positionnement socio-économique des partis politiques sur l’axe gauche-droite n’est évidemment pas dénué d’intérêt. Toutefois, depuis les années 1970, c’est leur position face à la question nationale qui s’est généralement avérée déterminante.

Cette question maintenant écartée du débat, le clivage gauche-droite devient le principal élément structurant de cette campagne. De retour à la politique dite normale, semble-t-il.

Cependant, le débat souveraineté c. fédéralisme absent cette fois-ci, les partis traditionnels ont dû revoir leur jeu afin de s’attirer autrement la sympathie des électeurs. Or, des décennies de focus sur la question nationale ont épargné au Québec la polarisation gauche-droite qu’on peut observer par exemple aux États-Unis. L’échiquier politique québécois demeure donc relativement étroit.

Du pareil au même ?

C’est ainsi que la ligne apparaît en effet parfois plutôt mince entre la Coalition avenir Québec (CAQ), qui se trouve en tête de peloton, et le Parti libéral du Québec (PLQ), qui se range présentement juste derrière elle : « Libécaquiste, Caquibéral : du pareil au même » insiste d’ailleurs une coalition de syndicats québécois.

Le PLQ et la CAQ sont effectivement tout autant apôtres d’une « saine » gestion des finances couplée à une réduction de la taille de l’État. Les deux partis se rangent derrière le projet de Réseau express métropolitain (REM). Ils s’engagent à donner plus de poids aux régions, se campent en faveur du fédéralisme et demeurent discrets face aux impératifs des changements climatiques.

Le PLQ se défend de vouloir abolir les commissions scolaires tel que la CAQ promet de le faire ; il a pourtant tenté de rapatrier leurs pouvoirs et de supprimer les élections scolaires lors de son dernier mandat. Enfin, sur le plan socio-économique, les différences entre les deux partis semblent relever davantage de la forme que du fond.

L’ambiguïté ne peut d’ailleurs qu’être entretenue alors que le PLQ et la CAQ s’échangent des candidats comme s’ils étaient des cartes Pokémon. Prenons Marguerite Blais, ministre au sein du gouvernement libéral de Jean Charest, ou Nadine Girault, qui a elle aussi décidé de porter les couleurs de la CAQ. De l’autre côté, deux candidats défaits de la CAQ ont été recyclés en ministres au sein du PLQ. Tout dernièrement, Gertrude Bourdon et Enrico Ciccone, qui flirtaient avec la CAQ, ont annoncé qu’ils seraient candidats pour le PLQ.

Cette confusion idéologique risque d’exacerber la volatilité politique qui règne déjà suite à la mise au rancart de la question nationale ; car c’est bel et bien sur le plan identitaire qu’ils semblent vouloir se distinguer l’un de l’autre.

La promesse caquiste de diminuer annuellement de 20% le nombre d’immigrants en témoigne. On en témoigne un autre exemple, lorsque Philippe Couillard, faisant profil bas sur son bilan, prétend au nom des Québécois que « La ‘‘ballot question’’, comme on dit au Québec en 2018 » devra porter sur les seuils d’immigration.

Souveraineté

Si le Parti québécois (PQ) a mis la souveraineté au rancart, c’est notamment parce qu’il sait qu’elle ne trouve pas le même écho auprès des Milléniaux qu’auprès des Baby-boomers, dont le poids démographique décroît progressivement. 

Avec Québec solidaire (QS) à sa gauche, le support des milléniaux – socialisés politiquement durant une période complètement différente de celle des Boomers, ayant assisté à deux référendums et plusieurs crises constitutionnelles est tout sauf gagné d’avance pour le PQ. 

Tel que le présageaient Éric Bélanger et Valérie-Anne Mahéo dans un article paru cette année, tout indique qu’un réalignement du système partisan québécois est en cours. La question qui semble s’imposer, finalement, est la suivante : le PQ aura-t-il été le parti d’une génération, voué à disparaître ?


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