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L’université en campagne : QS

Gabriel Nadeau-Dubois présente sa vision de l’éducation supérieure au Délit. 

Courtoisie de Québec Solidaire

« Pour nous, les universités doivent servir le bien commun. » Ainsi s’articule la vision que Gabriel Nadeau-Dubois, co-porte-parole de Québec solidaire (QS), a de l’éducation supérieure. « Les universités et les cégeps sont des institutions qui doivent permettre l’égalité des chances, l’avancement de la connaissance, la transmission de la culture et du savoir au Québec. [Elles] doivent être les plus accessibles possible — c’est pourquoi la gratuité scolaire est dans nos propositions depuis notre fondation. [Elles] doivent l’être économiquement, mais aussi géographiquement », explique-t-il.

Les universités et les cégeps sont des institutions qui doivent permettre l’égalité des chances (…) c’est pourquoi la gratuité scolaire est dans nos propositions depuis notre fondation

Accessibilité et stages 

L’accessibilité aux études supérieures est un enjeu qui a déchiré la société québécoise dans la dernière décennie. Gabriel Nadeau-Dubois, ancienne figure de proue du mouvement étudiant, souligne toute l’importance qu’a eu la mobilisation de 2012 en ce qui concerne l’augmentation effective de l’accessibilité aux études. Le candidat solidaire indique cependant que la situation actuelle n’est pas optimale pour autant : « Quand on regarde les statistiques, il y a encore une grande proportion des étudiants au Québec qui sont des étudiants de première génération. Donc, l’accessibilité aux études supérieurs au Québec, ce n’est pas quelque chose d’acquis. On est encore dans une première phase d’accès à l’université. »

En plus de la gratuité, QS s’engage à offrir « une forme de rémunération » pour l’ensemble des stages au Québec. En effet, le candidat admet que la multiplication des stages — un phénomène qui a pris beaucoup d’ampleur ces dernières années — peut être une bonne chose pour la population étudiante. Toutefois, il pointe du doigt le développement « chaotique » de ceux-ci et les conditions très variables auxquelles les étudiant·e·s font face : 

« Dans certains milieux, souvent des milieux à prédominance masculine, les stages sont bien rémunérés, bien encadrés […]. Dans d’autres domaines, souvent des domaines traditionnellement féminins, les stages sont très peu ou pas du tout rémunérés. Cela fait qu’on se retrouve dans une situation où de jeunes étudiants et de jeunes étudiantes doivent, d’une part, payer leurs frais de scolarité, de l’autre, payer leurs dépenses courantes, mais travaillent à temps plein dans le cadre d’un stage qui n’est pas rémunéré ! Ça devient une équation extrêmement difficile, voire impossible à résoudre. » 

Financement des universités 

En ce qui concerne le financement des universités, Gabriel Nadeau-Dubois avance qu’il y a « encore beaucoup de travail à faire ». En effet, le co-porte-parole est très critique vis-à-vis la formule actuelle de financement « par tête de pipe », c’est-à-dire basée sur la population étudiante des universités. Il soutient que ce mode de financement encourage la compétition entre les universités et la chasse à la « clientèle » étudiante (terme qu’il tient à exprimer entre guillemets). Le candidat rappelle que c’est François Legault, actuel chef de la Coalition avenir Québec, qui est à l’origine de cette formule (à l’époque où il était ministre de l’Éducation du Parti québécois, ndlr). 

Du même souffle, le candidat solidaire dénonce la récente décision du gouvernement libéral de dérèglementer les frais de scolarité des étudiant·e·s internationaux·ales, soutenant qu’une telle décision favorise principalement les universités montréalaises anglophones : 

«[Les étudiants internationaux] vont devenir une véritable vache à lait [pour McGill et Concordia]. Or, il est faux de croire que l’Université du Québec à Chicoutimi, ou l’Université du Québec à Rimouski, auront les mêmes moyens de recrutement et qu’elles seront capables elles-aussi de profiter de cette manne-là. […] Cela va donc augmenter les inégalités à l’intérieur du réseau universitaire en favorisant les grandes universités montréalaises — qui sont déjà favorisées dans le modèle actuel — et en défavorisant les universités un peu partout au Québec qui sont extrêmement importantes pour le réseau, et pour l’accessibilité des études au Québec. » 

Le Québec avant l’international

En abordant la question de la dérèglementation des frais de scolarité de ces étudiant·e·s, Gabriel Nadeau-Dubois ouvre la voie à un questionnement plus large, celui de la place du Québec sur la scène universitaire internationale. Questionné sur cet enjeu de fond, le candidat solidaire réitère sa conception du rôle des universités évoquée plus tôt. Il met l’accent sur l’idée que la mission des universités québécoises est d’abord de servir les Québécois·e·s :

« Le rôle de l’université [québécoise], ce n’est pas de compétitionner avec les universités américaines. Ce n’est pas de compétitionner sur le soi-disant marché international de l’éducation supérieure. Une université, ce n’est pas une multinationale […].»

Toutefois, bien qu’attirer les étudiant·e·s étrangers·ère·s puisse sembler ne pas être prioritaire, le candidat énonce les éléments positifs que sont les échanges et l’immigration basée sur la rétention. Il souligne que l’accueil d’étudiant·e·s internationaux·ales est tout à fait cohérent avec la vision d’une université défendant le bien commun, critiquant plutôt la « logique marchande » du « soi-disant marché international universitaire ».

Une grande proportion des étudiants au Québec (…) sont des étudiants de première génération

Enfin, il avance que l’une des meilleures façons d’améliorer la rétention des étudiant·e·s est d’offrir de bonnes opportunités d’emploi à ceux et celles souhaitant s’établir de façon permanente au Québec, affirmant par ailleurs que le dérèglement de leurs frais de scolarité « est une bien drôle de façon de leur souhaiter la bienvenue ».

Violence sexuelle 

Lorsqu’il est question des enjeux en éducation supérieure, difficile de passer outre la question des violences sexuelles sur les campus. Questionné sur l’efficacité de la Loi 151 (Loi visant à prévenir et à combattre les violences à caractère sexuel dans les établissements d’enseignement supérieur), Gabriel Nadeau-Dubois indique d’emblée que c’est une « belle avancée » et salue le processus « transpartisan » ayant mené à l’adoption de cette loi. Il précise que ce projet a même été bonifié par la ministre responsable de l’Enseignement supérieur et de la Condition féminine Hélène David, à la suite de recommandations. 

Le candidat nuance toutefois sa vision de la situation en expliquant que l’affaire n’est pas close. À ce titre, il mentionne qu’il est primordial de continuer à sensibiliser sur les campus et dans la société en général. Confronté à certains problèmes parfois soulevés par les communautés étudiantes, notamment l’impression latente que la Loi 151 permettrait aux universités de se doter de politiques sans réelle efficacité, le candidat solidaire avance l’idée d’instaurer un processus d’appel pour les plaintes faites au sein des institutions universitaires : « Ce que beaucoup de groupes ont souligné en commission parlementaire, c’est que si une plaignante se sent lésée dans le processus, il n’y a pas de deuxième recours. » 

Questionné sur la possibilité de voir un gouvernement solidaire légiférer en ce qui concerne les relations entre professeur·e·s et étudiant·e·s, le co-porte-parole a appelé à la réflexion plutôt qu’à une décision tranchée : 

« Est-ce que c’est le gouvernement du Québec qui doit adopter une loi en ce sens-là ? Est-ce que c’est plutôt les institutions universitaires qui doivent, de manière collégiale et démocratique, se doter de ces règles-là ? C’est une grande question. […] Même les intervenants sur le terrain ne s’entendent pas là-dessus. […] Ce qui reste clair, c’est qu’il faut faire quelque chose. Il y a en ce moment un flou qui fait en sorte qu’il y a beaucoup de jeunes femmes — et de jeunes hommes — qui se sentent lésés, et ça, ce n’est pas acceptable. » 

Pour ce débat, le candidat souligne l’importance de préserver « l’autonomie des communautés universitaires » et indique en ce sens que la Loi 151, bien qu’elle soit imparfaite, permet de trouver un « certain équilibre » entre l’action de l’État et celle des universités. 

Gabriel Nadeau-Dubois conclut en réaffirmant que l’éducation et la gratuité scolaire seront parmi les propositions principales de Québec solidaire pour la campagne : « Vous allez [les] voir partout ! » 


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