L’Association Étudiante de l’Université McGill (AÉUM, SSMU en anglais, ndlr) organise pour la première fois, du 1er au 7 février, une semaine de sensibilisation aux troubles alimentaires. L’initiative a été mise en place par la vice-présidente à la vie étudiante, Sophia Esterle. Celle-ci, lors d’une entrevue en janvier, déclarait au Délit que bien qu’il y ait déjà eu des évènements portant sur les troubles alimentaires lors de la semaine de sensibilisation aux maladies mentales de l’année dernière, y dédier une semaine entière lui semblait nécessaire. « J’ai vraiment envie de faire un effort, ce semestre, pour mettre l’emphase sur ça. Je trouve que c’est vraiment un problème ». Un problème de société, mais aussi d’éducation, selon elle : beaucoup ne savent adopter les bons comportements et le bon langage face à ceux·elles qui souffrent de troubles alimentaires, ce qui pourrait, même lorsqu’ il·elle·s sont muni·e·s de bonnes intentions, aggraver la condition de leurs proches.
Des statistiques frappantes
Les troubles alimentaires, en particulier l’anorexie, sont les maladies mentales ayant le taux de mortalité le plus élevé. Selon le Centre National d’Information des Troubles Alimentaires Canadien (NEDIC en anglais, ndlr), on estime que 10% des individus anorexiques meurent dans les dix ans suivant le début de leur maladie.
Le problème semble toucher particulièrement les jeunes et les adolescent·e·s ; les résultats d’une étude menée auprès d’environ 5000 adolescent·e ·s par l’Université du Minnesota de 1989 à 1999, intitulée Project EAT, révélaient que sur l’ensemble des individus sondés, plus de la moitié des filles et le tiers des garçons pratiquaient des comportements nocifs visant à contrôler leur poids, tels que le jeûne, les vomissements volontaires, la prise de laxatifs ou encore le tabagisme. En ce qui concerne les trois troubles alimentaires les plus importants, l’anorexie, la boulimie et l’hyperphagie (binge-eating en anglais, ndlr), les femmes sont statistiquement beaucoup plus touchées, mais tout individu, en raison de combinaisons de facteurs biologiques, psychologiques ou sociaux, peut en être atteint. Au Québec, à l’ère actuelle, plus de 100 000 filles et jeunes femmes souffriraient de troubles alimentaires – un chiffre impressionnant, d’autant plus que les données de ce genre auraient triplé depuis quelques décennies dans les pays occidentaux les plus « développés ».
À McGill, qu’en est-il ?
La vice-présidente, en parlant du projet, mentionnait aussi la suppression du programme d’assistance aux troubles alimentaires de McGill comme facteur important de son initiative. En effet, durant l’automne 2017, l’Université a mis fin à son programme d’assistance aux troubles alimentaires (Eating Disorder Program, en anglais, ndlr), sans le remplacer. Celui-ci était notamment composé d’un·e coordonnateur·rice, d’un·e infirmier·ère, d’un·e nutritionniste, d’un·e psychiatre et d’un·e psychologue. Les rôles ont peu à peu été désertés, sans que l’information ait été rapidement communiquée. À l’université, les étudiants sont pourtant particulièrement à risque, entre l’anxiété scolaire, la distance de la famille et les ajustements parfois difficiles à une indépendance nouvellement acquise.
Des évènements variés
Pour tenter d’élargir le discours sur ces enjeux, plusieurs initiatives ont été planifiées pour la semaine à venir. Une discussion en panel sur les troubles alimentaires se déroulera mardi, et un atelier portant sur la grossophobie mercredi. Une récitation de poème est également prévue pour jeudi. La semaine se déroulera aussi en parallèle au campus Macdonald, où sont organisés des évènements portant sur l’impact des réseaux sociaux et de la « culture du régime » (diet culture en anglais, ndlr). Toutes ces initiatives se rejoignent autour de deux objectifs : sensibiliser la population mcgilloise et mettre en lumière les ressources disponibles.