Le mardi 5 février avait lieu à McGill une conférence sur le populisme intitulée : « La montée du populisme menace-t-elle les bonnes politiques gouvernementales ? » (« Does Rising Populism threaten good public policy ?», ndlr). Modérée par David Shribman, rédacteur en chef du Pittsburgh Post-Gazette, la conversation était menée par quatre panélistes : Eliana Johnson, reporter à Politico, Chantal Hébert, chroniqueuse au Toronto Star, E. J. Dionne, chroniqueur au Washington Post et Bruce Anderson, président chez Abacus Data, une entreprise canadienne de sondage et d’études.
Définir le populisme
Comme l’explique Chantal Hebert, le populisme, avant d’être un mouvement « antidémocratique », serait un mouvement constitué par « un groupe de personnes ayant des convictions communes » et trouverait ses racines dans les défaillances du système.
D’autre part, Eliana Johnson, qui travaille de près avec la Maison Blanche à Washington, a ajouté, se référant à Donald Trump, que « le populisme est un cadre intellectuel dans lequel une personne affirme représenter tous les individus d’une nation », alors que ce même cadre, selon cette dernière, serait restreint puisque l’individu ne fait que représenter « les personnes qui soutiennent le leader ».
Les racines du populisme
Concernant les racines de ce type de mouvement, beaucoup de facteurs rentreraient en jeu, selon les quatre invité·e·s. En effet, E.J. Dionne affirme que la crise financière globale qui a touché le monde, tout comme les crises climatique et migratoire, seraient à la source de nombreux enjeux auxquels les politicien·ne·s n’ont pas toujours de réponse concrète. Ces problématiques auraient mené à la montée du racisme et au refus de l’immigration ainsi qu’à la méfiance face au libre-échange.
Pour Chantal Hébert, le renversement de code pour les hommes blancs privilégiés aurait mené à une forme de colère de la part de ces derniers qui n’auraient plus toujours le pouvoir de se sortir de certaines situations politiques. On pointe également du doigt le manque d’intérêt des citoyen·ne·s américain·e·s envers la politique nationale pendant les élections qui aurait contribué à la victoire de Donald Trump. En effet, il·elle·s se seraient selon lui tournés davantage vers les réseaux sociaux. Celui-ci cite par exemple, en plaisantant, le succès de Cardi B, la rappeuse américaine qui comptabilise des millions de vues sur ses vidéos Instagram.
Il achève en déclarant : « Nous avons les politiciens que nous méritons ». L’égoïsme des citoyen·ne·s et des dirigeant·e·s est mis en avant par les quatre participant·e·s, puisque selon Eliana Johnson, « Trump ne se voit pas comme un républicain ni un homme politique, mais il est comme un grand patron », faisant notamment référence à ses incidents diplomatiques. D’autre part, le « silence de la majorité citoyenne » aurait donné raison à la montée de Trump.
Enfin, le débat concernant la place des élites aux États-Unis a été soulevé, lorsque Bruce Anderson a rappelé que selon des études statistiques menées lors des élections, « 15% des hommes blancs diplômés de l’université ont voté pour lui ». Eliana Johnson estime de son côté que « les gens les plus intelligents ne servent plus leur pays », expliquant que « les diplômés des plus grandes universités préfèrent travailler dans le secteur privé, alors qu’auparavant ils travaillaient pour les grandes instances gouvernementales ». Tous les participant·e·s sont unanimes : le populisme est un grand enjeu du 21e siècle.