Le Délit (LD) : Commençons par une courte présentation, nous qui nous connaissons. Patrice, qui es-tu ?
Patrice Lessard (PL) : Comme tu le sais, mon emploi principal consiste à enseigner la littérature au Collège de Bois-de-Boulogne. Je viens d’une petite ville du Québec qui se nomme Louiseville, d’une famille de la petite classe moyenne — upper lower class, mettons. Elle n’était pas nécessairement intéressée par la littérature. Il n’y avait pas de livres chez moi, pas de films, pas de musique. Je viens donc d’un milieu — tant ma famille que ma ville — pauvre culturellement.
J’écris depuis mes 20 ans et j’ai publié mon premier livre (un recueil de nouvelles) sous le titre de Je suis Sébastien Chevalier en 2009, donc à la fin de la trentaine. Depuis, j’ai publié sept autres livres ; à propos du joug est le dernier de cette liste, mais j’avais commencé à l’écrire il y a longtemps.
Mes premiers romans se passaient au Portugal, donc la question du Québec et des Québécois était abordée par la bande. Il me semble que j’avais un peu besoin de m’évader du Québec à cette époque-là. J’y suis revenu dans mes derniers romans et c’est dans À propos du joug que j’attaque de manière assez frontale tout ce qui me dérange ici.
LD : À propos du Joug, qu’est-ce qui a changé pour toi entre les premières esquisses de 2003 et maintenant ?
PL : En ce qui me concerne, la question du racisme en 2003 était très périphérique. Je n’y croyais pas, pour tout dire. Elle ne me frappait pas. Il me semble qu’à l’époque, j’étais beaucoup plus indépendantiste. Cela dit, je n’étais pas nationaliste et ce qui me désolait, c’était que l’on n’arrivait pas à créer un pays. Dans les dernières années, il s’est révélé difficile de réfléchir à l’indépendance du Québec sans que des voix anti-immigration, se gargarisant à la laïcité afin d’exprimer un racisme, ne se manifestent. En ce sens, par rapport à ce qu’était ce texte en 2003 — ce que la note d’introduction indique — se pose la question à savoir si je veux vraiment m’associer à tous ces connards, ces connards qui disent vouloir sauvegarder la langue française alors qu’ils sont incapables d’écrire trois mots sans faire huit fautes. Sont-ce ces gens qui veulent l’indépendance du Québec aujourd’hui ? Évidemment, c’est une généralisation complètement absurde, mais s’il était possible à une époque de fermer les yeux sur ce racisme, là, nous l’avons dans la face tous les jours. On le voit dans les réseaux sociaux, dans le Journal de Montréal, etc. Quand je pense le Québec et les Québécois, je me trouve forcément en porte-à-faux. C’est chez moi et il y a plein de belles choses ici, mais il y a aussi une espèce de honte et de peur qui me dit que je veux câlisser mon camp. Il est difficile de raconter ce sentiment-là sans tomber dans la généralisation.
À mon avis, les Québécois s’illusionnent beaucoup sur ce qu’ils sont, sur leur chaleur humaine, sur leur hospitalité. Lorsqu’on se promène un peu, on voit bien que de la chaleur et de l’hospitalité, il n’y en a pas tant que ça. C’est peut-être de ça dont je voulais parler dans le Joug. Il y a une importante distinction à faire entre ce que l’on fait et la perception que l’on peut en avoir.
LD : As-tu l’impression d’avoir suivi le modèle d’un Roland Barthes et d’avoir dévoilé quelques mythologies québécoises ?
PL : Non, pas du tout. Cela ne faisait pas partie de mes références. Je te dirais que l’auteur que j’avais en tête à ce moment-là, c’était Thomas Bernhard, un homme qui est pour moi un très grand génie de la littérature autant sur le plan stylistique que sur le plan du contenu. C’était quelqu’un qui était beaucoup dans l’exagération et la critique très amère de l’Autriche. Bernhard disait par exemple que tous les Autrichiens sont des catholiques et des Nazis. Je le lis souvent et j’ai l’impression que je pourrais reprendre des pans entiers de ses livres et changer « Autriche » par « Québec ». Récemment, j’ai découvert un auteur grec au nom de Christos Chryssopoulos. Il a écrit un petit livre très baroque intitulé La Destruction du Parthénon dans lequel il tient un discours sur les Athéniens et les Grecs. Là aussi, j’avais la même impression. Beaucoup de choses pourraient être transposées d’un espace à l’autre, notamment, cette grande frustration, cette grande colère complètement stérile qui ne mène qu’à des actes haineux.
Il s’est révélé difficile d’aborder une réelle pensée à propos de l’indépendance du Québec sans que des voix anti-immigration, se gargarisant à la laïcité afin d’exprimer un racisme, ne se manifestent
LD : As-tu l’impression d’avoir interrogé cette colère-là ou d’en avoir simplement fait le constat ? Je m’explique. Si, effectivement, les auteurs que tu mentionnes ont remarqué une grande haine, une grande misère, n’as-tu pas l’impression qu’à force de n’en dresser que le constat, on en oublie les causes ? Cette colère, l’on peut la voir de par le monde : il y a une hausse des discours de l’extrême-droite, il y a une hausse des discours opposés à l’immigration et les mouvements fascistes sont en croissance. Pourquoi ? Quelles sont les conditions de possibilité d’une telle croissance ? Ils n’apparaissent pas ex-nihilo. Laisse-moi éclaircir ma question : à force de constater la colère sans en chercher la racine, n’abandonne-t-on pas les « fâchés mais pas fachos » à cette haine qui capte leur colère ?
PL : Écoute, c’est possible. Je ne suis pas sociologue.
LD : Non, ton rôle est peut-être plus important.
PL : Non, je ne dirais vraiment pas ce genre de choses. Je te dirais que j’ai beaucoup de mal à comprendre qu’après le désastre que les idéologies haineuses ont représenté au 20e siècle, certaines personnes soient à nouveau en train d’en faire la promotion. C’est d’une absurdité. Ce sont des idéologies de l’ignorance. Lorsque tu regardes les Italiens à Montréal, personne n’a aujourd’hui de problèmes avec eux et on les dit bien intégrés. Pourtant, à leur arrivée, on les traitait comme des chiens, on les détestait, on les insultait. On fait la même chose avec les musulmans aujourd’hui.
Mon travail d’auteur est dans la fiction. Le Joug, c’est un gars qui se suicide parce qu’il se demande à quoi sert l’écriture. C’est une question que je me pose constamment. J’ai besoin d’écrire, j’ai besoin de m’exprimer, mais ça ne sert à rien. Personne ne nous lit. Tu sais, je lisais René-Daniel Dubois — il s’est souvent fait ostraciser dans les dernières années en raison de ses opinions champ gauche — et il disait qu’au Québec, les intellectuels sont muets et les artistes sont « tatas ». Pour beaucoup, c’est de cette manière qu’on les veut, ces intellectuels ou ces artistes. Lorsqu’une personne affirme quelque chose sortant du grand récit national, on ne veut pas l’entendre ; cela ébranle nos certitudes. C’est sur cela que j’ai voulu travailler. Je ne suis pas sociologue ; j’écris une histoire. Néanmoins, ce n’est parce qu’il s’agit d’une histoire que je m’en déresponsabilise.
Je n’écris pas afin de questionner la résurgence des mouvements fascistes.
LD : Je veux rappeler que l’épigraphe de ton livre est une citation de Cioran. Ne penses-tu pas qu’en poursuivant dans cette tradition — tu me permettras de soulever la critique — trop repliée sur elle-même, la littérature soulève d’emblée la question — trop peu souvent prise en compte — de ses motivations premières ?
PL : Lorsque tu dis cela, tu réduis la littérature à un rôle que tu voudrais bien lui donner. Je crois que la littérature est souveraine. Je rappelle un truc bien important : j’écris de la fiction. Ce que dit le personnage du Joug, ce n’est pas ce que pense Patrice Lessard. Lorsque j’ai publié Le sermon aux poissons, on m’invitait en entrevue en me disant « Oui, mais Antoine…c’est un peu vous ! ». Moi je leur disais que non. Antoine, il se nomme Antoine, déjà. Il vit au Portugal et ce n’est pas mon cas. Cela, ce n’est pas ce que la littérature a fait — c’est ce qu’on cherche à faire d’elle ! On cherche à amalgamer le propos d’un narrateur à son auteur. Le narrateur du Joug, ce n’est pas moi ; il faut s’enlever cela de la tête. Je ne me suis pas encore suicidé. Tu vois que j’ai une belle bibliothèque derrière moi et je n’ai pas jeté tous mes livres. Tout cela, ce sont des moyens et des motifs visant à créer des réflexions et des émotions chez les lecteurs. La littérature est souveraine. Elle n’a pas un rôle. Celle-là, c’est la littérature à thèse et c’est la pire. C’est celle qui défend les fascismes et les régimes totalitaires. Je ne veux rien savoir de cela.
LD : Si tu me permets de revenir à ce que je te demandais, il me semble que l’on se soit mal entendus. Je t’ai interrogé à propos des motivations premières de la littérature, non de ses finalités pratiques. Évidemment que la culture ne doit pas être un produit, évidemment que la culture ne doit pas suivre un programme politique et s’embrigader. Cependant, cependant. Elle comporte tout de même des finalités qui se dévoilent a posteriori. Lorsque tu as des auteurs nationaux — je pense notamment aux « Trois couronnes » toscanes (Dante, Bocage et Pétrarque) que tu as pu m’enseigner —, ces trois auteurs-là se sont révélés sans l’avoir voulu l’union d’une certaine communauté. Cela s’est matérialisé par la suite, cela n’était pas dans leurs intentions. Cela n’est certainement pas comparable à nombre d’auteurs nazis durant le troisième Reich. Ils ne cherchaient pas à créer artificiellement quelque chose. Néanmoins, ils ont tout de même, cela de manière non téléologique, créé un peuple, un sentiment d’appartenance. Et il y a une beauté à cette appartenance. C’est une appartenance libre, qui n’est pas contrôlée par un État ou encore un pouvoir politique. Une appartenance qui donne par ailleurs envie qu’on la rejoigne — ce qui manque au Québec. Qu’a‑t-on envie de rejoindre au Québec ?
PL : Je pense qu’il y a un travail de sape depuis aussi longtemps que le Canada existe, mené conjointement par l’Église et les gouvernements, visant à ce que les discours des intellectuels et des artistes soient systématiquement déconsidérés. Il me semble que c’est pour cela que ce que disent les auteurs n’a pas beaucoup d’importance pour nombre de Québécois. Après, I do my shit. C’est tout. Je ne peux rien faire d’autre. J’essaye d’être fidèle à moi-même et de demeurer authentique dans mon travail de création. Je n’ai pas d’objectifs nationaux. Je peine à croire que cela puisse être bénéfique, que cela puisse rallier. J’ai l’impression que lorsque Gaston Miron écrivait L’homme rapaillé, c’est justement parce qu’il le faisait de manière authentique et avec tout son talent qu’il en est sortit quelque chose. C’est la même chose pour Hubert Aquin, Réjean Ducharme et Michel Tremblay. À côté de toi, il y a deux livres sur la table empruntés à la bibliothèque. Ces deux auteurs n’entrent pas dans le grand récit national. Pourtant, ils ont écrit des trucs marquants. Neuf jours de haine de Jean-Jules Richard se passe durant la Deuxième Guerre mondiale où Richard était engagé volontairement. Or, pour un Canadien français, s’engager était considéré comme une forme de trahison. On disait que la guerre en Europe, ce n’était pas de nos affaires. Six millions de Juifs, et ce n’était pas de nos affaires. Bref, il ne rentre pas dans le grand récit national et on ne le lit pas. Mais ce gars-là, he was doing his fucking shit. Avant le chaos d’Alain Grandbois, c’est un pur chef‑d’œuvre. Je ne me souviens pas avoir lu un auteur québécois m’ayant tant marqué depuis Réjean Ducharme lorsque j’avais 20 ans – quoique je ne suis plus vraiment capable de lire Ducharme aujourd’hui. Lorsque je dis que la littérature est souveraine, c’est dire qu’il y a quelque chose, un moment donné, qui t’anime. Ce quelque chose peut faire partie d’un projet, être en lien avec tes convictions — chez certains auteurs cela fonctionne. À certains moments, il faut pouvoir s’engager et prendre position. Ma position, elle peut difficilement aller plus loin qu’elle le va dans le Joug. Je maintiens et maintiendrai toujours écrire de la fiction.
LD : Sans t’engager personnellement, j’aimerais que l’on prenne la peine de s’attarder à certains passages ou éléments du Joug. As-tu l’impression que paradoxalement, malgré lui peut-être, ce texte s’insère dans le récit national ? C’est-à-dire qu’il est dans la production de constats d’échec — c’est l’échec constamment reconduit.
PL : Absolument. C’est pour cela qu’il y a toutes ces références à Hubert Aquin. C’est un texte paradoxal. Ce sont deux narrateurs qui se retrouvent devant le même constat d’échec quant à l’écriture d’un roman national, cela alors qu’il en résulte un texte d’un roman qui parle de nationalisme, bien qu’il ne soit pas un roman nationaliste. Je ne sais pas jusqu’à quel point tu as peut-être relevé ces passages-là, mais il y est dit une chose et son contraire.
Le nationalisme n’en est lui-même pas à une contradiction près. On le voit tous les jours. Tout à l’heure, je te mentionnais que lorsque l’on affirme que les Québécois sont racistes, on nous répond que c’est partout pareil. Alors que, en continuant la discussion, en pointant ce que les Québécois font, on affirme d’emblée que cela n’est pas raciste. Ici, cela ne serait pas pareil comme ailleurs. Dans la même conversation, on dit donc une chose et son contraire ! Ce serait partout pareil, mais ici cela ne serait pas pareil. Puis, je ne sais même pas jusqu’à quel point les gens qui disent cela ont tort. Ils ont peut-être un peu raison. Si c’est le cas, c’est paradoxal.
Je ne serais pas capable de résumer le roman en quelques phrases. La note du début signée P.L. — ce qui pourrait bien signifier Pascal Lamartine —, bien qu’elle soit totalement fictive dans sa prétention au patriotisme, signifie l’impossibilité pour moi d’un discours patriotique. Cela dit, ce paradoxe déroutant qui ne se rapporte pas à quelques lignes de force remplit un objectif.
LD : J’aimerais te demander. Patrice, quel est ton joug ? À quoi appartiens-tu ? Tu affirmes que la littérature est souveraine — nous pouvons être en accord là-dessus —, mais si elle l’est, c’est bien qu’elle approprie. Il y a des gens qui se font ravir par elle, pour de bonnes ou mauvaises raisons. Par quoi te fais-tu approprier ? À quelle logique obéis-tu ? Je me permets de te poser cette question, car elle figure en tant que déclaration dans ton livre : « À chacun son joug .» Il y a cette idée remontant à Kant, métamorphosée sous les méditations de Heidegger et rapportée au Québec dans les multiples essais d’Alain Deneault que l’on ne domine pas les mots, mais que l’on peut décider de ceux qui nous dominent.
PL : C’est une question difficile. J’ai l’impression que souvent, j’abdique une part de ma liberté parce qu’il faut gagner sa vie. Mon joug, c’est peut-être celui-là : j’ai bien du mal à me faire dire quoi faire et quoi penser. J’essaye d’être le plus fidèle possible à mes convictions, mais parfois nous n’avons pas le choix de les laisser de côté afin de survivre. Si j’étais complètement libre, je ne travaillerais pas et je n’habiterais pas ici. Ce qui ne veut pas dire que je déteste ce lieu ou mon travail. En vieillissant, j’ai l’impression d’avoir besoin toujours davantage de temps, alors que forcément, puisque je vieillis, il en reste de moins en moins.
Ce que tu dis va un peu dans le sens de ce que je disais. Il y a ce proverbe qui dit entre deux maux, on choisit le moindre. Entre la clochardise et l’enseignement au collégial, j’ai choisi le deuxième. Or, si j’étais vraiment fidèle à mes convictions, je serais clochard.
LD : Dans un autre registre : que penses-tu du sport ? Je te connais une passion toute particulière pour cela.
PL : Nous parlions de paradoxes, en voilà un (rires, ndlr). Je suis un grand admirateur de la NFL ; je passe ma vie à regarder des émissions associées à cela. C’est du divertissement et nous en avons besoin. Dans À propos du joug, ce que j’essaye de dire — et encore une fois je rappelle qu’il est difficile de réduire ce texte-là à des lignes de force — tient dans un certain paradoxe. Lorsqu’il n’y a rien d’autre dans ta vie que le hockey — ce dont on a un peu l’impression au Québec —, tu te retrouves avec une abondance de partisans et aucun lecteur. Le sport se rapproche de ces moments où l’on regarde un film ou une série, ces moments où l’on s’abrutit.
Au Québec, on manque de lecteurs. Les gens qui lisent Louise Tremblay‑d’Essiambre ne sont pas des lecteurs. Si tu lis Michel David ou Louise Tremblay‑d’Essiambre, c’est parce que tu n’as jamais rien lu d’autre. Tu sais, un truc que je dis tout le temps — et je te l’ai probablement déjà dit d’ailleurs —, notamment à propos de Jacques le fataliste et son maître, c’est qu’il me semble qu’à la base de la consommation du divertissement, peu importe qu’il soit de haut niveau ou du sport-spectacle, il y a l’enjeu du plaisir. C’est de la grande généralisation, mais je conçois deux grands types de plaisir. Il y a celui de la reconnaissance, c’est un plaisir naïf. Tu vas aller voir une comédie romantique parce que tu sais bien que tu vas reconnaître tel type de pattern ou tel autre, cela car elles sont toutes construites de la même manière. Tout le monde raffole de Game of Thrones, mais cela reste des osties d’histoires avec des dragons. À l’opposé, il y a un autre plaisir beaucoup plus fécond. C’est celui de la déroute. Être dérouté par un texte. Quand tu lis un livre ou encore que tu vois un film, une pièce de théâtre ou un spectacle de danse, et que tu te dis « what the fuck », cela en même temps que tu te forces le cul afin de comprendre, il y a quelque chose de vrai qui se passe. Quelque chose d’important, même. Lorsque je dis qu’il n’y a pas de lecteurs au Québec, je veux dire qu’il y a beaucoup trop peu de lecteurs qui acceptent de se soumettre à la déroute.
Il y a ce proverbe qui dit entre deux maux, on choisit le moindre. Entre la clochardise et l’enseignement au collégial, j’ai choisi le deuxième. Or, si j’étais vraiment fidèle à mes convictions, je serais clochard
LD : As-tu des suggestions de lecture pour ceux s’intéressant à la littérature québécoise ou encore à la déroute ?
PL : Au Québec, il y a forcément David Turgeon. C’est à mon avis le meilleur auteur québécois — ajoutons vivant car il semblerait que l’on doive respecter les morts. Le continent de plastique est un pur chef‑d’œuvre. Simone au travail, aussi. Son dernier portant sur le style de Genette, même chose. Il y a quelques années, j’ai vraiment adoré le roman d’une autrice québécoise du nom de Dominique Scali. Je te parlais tout à l’heure d’Avant le chaos de Grandbois.
À l’étranger, disons Thomas Bernhard. Littérature peut-être un peu plus exigeante. Il a écrit une trilogie que j’aime beaucoup : Des arbres à abattre, Maîtres anciens, Le Naufragé. Ce sont des textes qui peuvent se lire indépendamment, mais ils portent des voix similaires. Le Naufragé parle de musique classique, notamment à travers la figure de Glenn Gould. Maîtres anciens, de peinture. Des arbres à abattre, de théâtre. S’il faut en nommer un autre, je te dirais le Français Tanguy Viel. Sur le plan stylistique, c’est impeccable.