Le 31 mars 1821, le roi Georges IV signa une charte royale autorisant l’Institution royale pour l’avancement des sciences à fonder l’établissement qui ouvrirait officiellement ses portes, huit ans plus tard, sous le nom de McGill College. L’Institution royale dépendait pour ce projet du legs de 10 000 livres et du domaine de 46 acres que lui avait laissé le commerçant écossais et montréalais James McGill.
À l’intention du bicentenaire, l’Université a créé une ligne du temps, disponible exclusivement en anglais, détaillant l’histoire de l’institution et ses réalisations sous cinq grands thèmes : Histoire générale, Environnement bâti, Impact, Visages changeants et McGill dans la communauté. Le site web créé par l’Université à l’occasion de son 200e anniversaire ne se prononce pas sur le passé esclavagiste et colonialiste de James McGill, malgré la controverse qui entoure l’héritage de ce dernier depuis quelques années.
Une célébration virtuelle
Pour souligner ses 200 ans, l’Université McGill a convié les membres de sa communauté à son événement signature « Bicentenaire et lancement de notre troisième siècle » le 31 mars dernier. Cette célébration en ligne était animée par Laurent Duvernay-Tardif, diplômé de McGill en médecine et joueur de la Ligue nationale de football américain, et Heleena De Oliveira, étudiante de McGill en sciences politiques et en anthropologie et présidente du Réseau des étudiant·e·s noir·e·s de l’Université.
Plusieurs personnalités (politicien·ne·s, membres de l’administration, diplômé·e·s, employé·e·s) se sont prononcées par vidéo pré-enregistré sur la signification que revêtait pour eux et elles le bicentenaire. La principale et vice-chancelière de McGill, Suzanne Fortier, a abordé les visées de durabilité environnementale de l’Université pour le prochain siècle. « McGill est prête à forger un avenir meilleur, et sa communauté participera au projet de la planète Terre », notamment en travaillant aux 17 objectifs de développement durable de l’Organisation des Nations Unies. Elle a également souligné le caractère simultanément mondial et local de l’Université, affirmant que « McGill pense et agit globalement tout en restant ancrée dans sa ville, sa province et son pays ».
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L’un des vidéos avait pour thème l’inclusion autochtone à McGill. Michael Loft, membre de la nation mohawk de Kahnawà:ke et diplômé de McGill en travail social, a prévu que la présence autochtone à McGill grandirait de façon exponentielle dans les années à venir. Thomasina Philips, elle aussi mohawk de Kahnawà:ke et travailleuse en santé mentale auprès des étudiant·e·s autochtones de la communauté mcgilloise, espère quant à elle que l’on incluera non seulement les personnes autochtones, mais également leurs savoirs et leurs façons de vivre dans chaque aspect de l’Université d’ici 50 ans. « J’espère voir des partenariats se former [entre McGill et] des communautés qui soutiennent des initiatives telles que la revitalisation des langues autochtones et des liens de parenté de même que le travail de croissance et de guérison [des peuples autochtones]», a‑t-elle affirmé.
L’événement était entrecoupé de performances d’artistes, notamment du pianiste Chilly Gonzales, de l’artiste inuite et mohawk Beatrice Deer et de l’ensemble Christine Jensen de l’École de musique Schulich.
Regards en arrière et vers l’avant
Invité à se prononcer sur le bicentenaire, le président nouvellement élu de l’Association étudiante de l’Université McGill (AÉUM) pour l’année 2021–2022 Darshan Daryanani a affirmé au Délit être optimiste quant à l’avenir de l’Université McGill tout en soulignant l’importance, dès cette première année de son troisième siècle, de déterminer la direction dans laquelle ira l’Université pour les 100 prochaines années. Il a notamment mis en lumière les progrès technologiques et de recherche de McGill, prenant le nouveau magasin connecté Couche-Tard à titre d’exemple. « Chaque jour dévoile une nouvelle innovation. Le rôle de McGill est d’être au premier plan de l’innovation, du changement, du leadership. »
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Pour Darshan Daryanani, le bicentenaire serait l’occasion de se souvenir et de reconnaître « le bon et le mauvais » de l’Université. Il a ainsi affirmé que l’Université avait été bâtie grâce au labeur de personnes noires, autochtones et de couleur et que les voix de ces groupes marginalisés, tout comme celles des étudiant·e·s internationaux·les ou francophones, ne sont toujours pas écoutées par McGill. À cet effet, le futur président a mis de l’avant une motion au Sénat de l’Université qui proposerait l’installation d’une plaque sur le portail Roddick qui reconnaîtrait les erreurs passées de McGill envers des populations marginalisées par la colonisation et l’esclavage et réaffirmerait l’engagement de l’Université envers l’équité et la diversité. Il espère que cette motion sera acceptée par le Sénat mcgillois avant la fin avril.
Le futur président de l’AÉUM s’est en outre exprimé sur les obligations de durabilité sociale en environnementale adjacentes aux nombreuses innovations de McGill. «[Notre responsabilité sociale] inclut le désinvestissement [des énergies fossiles] et la reconnaissance de la réalité des changements climatiques et de notre complicité en la matière », a‑t-il affirmé.
Ses propos rejoignent ceux de Désinvestissement McGill, qui a fourni au Délit un communiqué à l’occasion du bicentenaire. En plus de sommer l’Université de démonter la statue de James McGill, l’organisation considère que « McGill a l’opportunité d’être à la hauteur de ses prétentions de leader climatique en se désinvestissant de l’industrie des énergies fossiles, ce qui inclut les compagnies Enbridge et TC Energy qui perpétuent actuellement la violence coloniale sur le territoire anishinaabe et wet’suwet’en ».
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