L’Université McGill a mis en place un système d’autocollants coupe-file (fast-pass en anglais, ndlr) afin d’accélérer l’accès aux bibliothèques, conditionnel à la présentation du passeport vaccinal depuis le 27 octobre dernier. Le Délit s’est penché sur ce nouveau programme d’autocollants et a examiné sa conformité aux exigences du ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec. Le Délit a également interrogé McGill sur les potentielles failles de ce système. Outre cette mesure en place depuis la fin octobre, l’Université a annoncé le 4 novembre dernier un projet-pilote de dépistage rapide de la COVID-19 sur le campus, quelques jours après les nombreux rassemblements des fêtes de l’Halloween auxquels McGill soutient que ses étudiant·e·s ont pris part.
Enquête sur les autocollants coupe-file
Dans les jours qui ont précédé l’imposition des passeports vaccinaux pour l’accès aux bibliothèques de McGill, l’Université a mis en place un système d’autocollants « coupe-file » permettant d’accélérer le processus de vérification du statut vaccinal. Les étudiant·e·s ayant rempli un formulaire de consentement et présenté leur passeport vaccinal ainsi que leur carte étudiante à un·e membre du personnel mcgillois peuvent se faire apposer sur leur carte étudiante un autocollant circulaire rouge sur lequel est écrit « McGill ». Cet autocollant certifie leur statut de personne adéquatement vaccinée. En plus d’être utilisés pour accélérer l’accès aux bibliothèques, ces autocollants sont également utilisés pour accéder aux installations sportives de l’Université (comme son centre de conditionnement physique) et à certaines de ses aires de restauration et salles à manger sur le campus. En date du 4 novembre, plus de 10 000 autocollants avaient été distribués.
« Des étudiant·e·s mcgillois·es ont exprimé certaines réserves quant à la véritable assurance de vaccination garantie par ces autocollants »
Or, des étudiant·e·s mcgillois·es ont exprimé certaines réserves quant à la véritable assurance de vaccination garantie par ces autocollants sur les réseaux sociaux, notamment dans le groupe Facebook des étudiant·e·s de la Faculté de droit. Certain·e·s ont évoqué la possibilité de simplement transférer l’autocollant de la carte étudiante d’une personne vaccinée à une autre carte. D’autres ont affirmé qu’il serait facile pour un individu de recréer ces autocollants, étant donné leur apparence générique. Enfin, certain·e·s se sont inquiété·e·s que ces autocollants ne conviennent pas aux standards gouvernementaux, puisqu’ils remplacent la présentation de la preuve de vaccination sous l’une des formes prescrites par la Santé publique – soit l’application VaxiCode, le code QR sur papier ou un PDF sur appareil mobile.
Le Délit a interrogé l’Université McGill dans le but de savoir si elle avait contacté la Santé publique ou le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec et obtenu son approbation quant au programme d’autocollants coupe-file. En outre, Le Délit a demandé à McGill d’expliquer les mesures actuellement en vigueur afin de prévenir la falsification ou l’échange entre étudiant·e·s d’autocollants coupe-file.
Dans sa déclaration, McGill a répondu au Délit que le programme d’autocollants coupe-file a été « développé à partir des lignes directrices des autorités de santé publique concernant la présentation et la vérification de la preuve de vaccination ». Selon l’Université, les autocollants distribués ne seraient pas des autocollants standard : ils seraient « impossibles à transférer », car ils se désintégreraient si retirés de la carte d’identité mcgilloise. McGill a également affirmé avoir formé son personnel afin qu’il soit en mesure de repérer des faux autocollants ou des autocollants mal placés.
« Les autocollants coupe-file de l’Université tiennent donc le coup contre des tentatives de fraude menées par des étudiant·e·s muni·e·s d’outils de base »
Le Délit a cherché à vérifier l’efficacité des mesures mises de l’avant par l’Université. Deux journalistes doté·e·s d’un autocollant coupe-file sur leur carte étudiante respective ont mis à l’épreuve le « dispositif de sécurité » dont seraient armés ces petits cercles rouges adhésifs. Équipé·e·s d’un couteau X‑acto, d’une règle et d’un bâtonnet de colle, les journalistes du Délit ont tenté de retirer les autocollants sans les endommager, sans succès. Tant en poussant leurs contours vers l’intérieur qu’en essayant d’en faire lever un coin, les autocollants se sont progressivement ratatinés et de fines lignes blanches sont apparues à tous les points de flexion. À la fin de l’exercice, les autocollants n’étaient que de minuscules amas chiffonnés impossibles à réutiliser. Les autocollants coupe-file de l’Université tiennent donc le coup contre des tentatives de fraude menées par des étudiant·e·s muni·e·s d’outils de base.
Le Délit a tenté de contacter le ministère de la Santé et des services sociaux du Québec afin d’obtenir des commentaires sur le programme d’autocollants coupe-fil mis en place par l’Université McGill. Au moment de publier, Le Délit n’avait pas obtenu de réponse.
Dépistage rapide sur le campus
Depuis le 8 novembre, les membres de la communauté mcgilloise peuvent se rendre à la cafétéria du Pavillon Trottier de l’Université entre 12h et 17h afin de passer un test de dépistage rapide de la COVID-19. McGill affirme qu’elle est en mesure de faire entre 12 et 24 tests par heure. Les résultats de ces tests, confidentiels, sont disponibles en une vingtaine de minutes. Seules les personnes ne présentant pas de symptômes de COVID-19 peuvent accéder au projet-pilote, les individus symptomatiques étant toujours priés de ne pas se présenter sur le campus.
Advenant un résultat positif, l’individu infecté doit se rendre dans un centre de dépistage offrant des tests PCR afin de confirmer sa positivité. La personne doit subséquemment signaler son résultat à l’Université, en appelant le groupe de gestion des cas de McGill au (514) 398‑3000 afin de permettre le traçage des contacts. Il est également à noter qu’un résultat négatif émis par le projet-pilote de dépistage rapide de McGill ne peut être présenté comme une preuve de négativité à la COVID-19 – aucun résultat sous forme papier ou autre n’est d’ailleurs fourni aux participant·e·s.
Ce projet-pilote a été annoncé alors qu’aucun cas de COVID-19 n’avait été signalé sur le campus mcgillois dans la semaine du 24 au 30 octobre. Or, les vice-principaux exécutifs adjoints Fabrice Labeau et Chris Buddle ont souligné que les étudiant·e·s avaient été nombreux·ses « à [se] rassembler […] ainsi qu’à fréquenter des bars et des restaurants » à l’occasion de la fin de semaine de l’Halloween et ont rappelé l’importance de signaler à l’Université des symptômes de COVID-19 apparus dans les 48 heures suivant une présence sur le campus.
« Fabrice Labeau et Chris Buddle ont souligné que les étudiant·e·s avaient été nombreux·ses « à [se] rassembler […] ainsi qu’à fréquenter des bars et des restaurants » à l’occasion de la fin de semaine de l’Halloween »
Du nouveau pour les employé·e·s de l’Université
Depuis le 3 novembre, les membres de la faculté et du personnel ainsi que les employé·e·s étudiant·e·s de l’Université McGill ne sont plus contraint·e·s de remplir le formulaire d’autoévaluation quotidienne sur leur état de santé sur Minerva. Selon le courriel envoyé le 4 novembre par Fabrice Labeau et Chris Buddle, cette décision aurait été prise en raison de « commentaires sur cette obligation quotidienne » provenant du nombre grandissant d’employé·e·s et d’étudiant·e·s sur le campus.
Cependant, toute personne se rendant sur le campus – les membres des corps étudiant et professoral de même que le personnel – doit encore compléter une autoévaluation quotidienne de son état de santé, au moyen d’un formulaire d’autoévaluation disponible sur la page d’information sur la COVID-19 de l’Université. Il est toutefois à noter que ce formulaire ne vise qu’à informer et non à collecter des données.