Une longue lutte
« Ça fait plus de deux ans maintenant, le 8 janvier 2019, que le projet de construction Coastal Gaslink a reçu une injonction pour faire intrusion sur le territoire Yintah » annonce Marlene Hale, une aînée Wet’suwet’en dans un discours de commencement prononcé le samedi 27 novembre dernier devant les immeubles de la Gendarmerie royale du Canada (GRC), à l’occasion d’une manifestation contre le projet de construction d’un gazoduc en Colombie-Britannique. Le projet Coastal GasLink (CGL), proposé par TC Énergie, reliera les ressources naturelles au nord de la Colombie-Britannique au site de LNG Canada en construction à Kitimat. L’injonction émise par la Cour Suprême en 2019 interdit aux Wet’suwet’en de bloquer l’accès à la construction du projet gazoduc sur leur territoire ancestral et accorde à la GRC le droit d’exercer son autorité sur le territoire. Cette injonction, au cœur du conflit, témoigne de la rupture entre la tradition de droit autochtone et celle du système canadien.
Depuis l’hiver 2019, les chefs héréditaires Wet’suwet’en expriment leur opposition à la construction du gazoduc CGL, un projet qui traverse leur territoire ancestral en Colombie-Britannique. Un an plus tard, les cinq clans de la Première Nation ont émis un avis d’expulsion à l’endroit de la compagnie. Au mois de janvier 2020, après l’avis d’expulsion, 28 manifestants sont arrêtés. En février 2020, le gouvernement fédéral canadien et les chefs héréditaires entament une période de négociations. Un mois plus tard, une entente de principe est atteinte.
« M. le premier ministre, que sais-tu du ‘‘Wiggus’’, le mot Wet’suwet’en pour respect ? »
Marlene Hale
La semaine dernière, à la suite d’une nouvelle vague de manifestations et d’arrestations en Colombie-Britannique, les tensions entre peuples autochtones et gouvernement fédéral se sont de nouveau exacerbées. Plusieurs chefs des nations de la région, comme Gaagwiis Jason Alsop, président de la nation Haida, ont dénoncé l’escalade du conflit : « L’utilisation de force policière militarisée contre des personnes non armées ainsi que la suppression des communications et des médias sont une violation des droits humains », pouvait-on lire dans un communiqué publié le 20 novembre dernier. La nation Heiltsuk a également émis un communiqué quelques jours plus tard, affichant son soutien à la nation Wet’suwet’en dans la défense de son territoire et de son auto-détermination.
Déroulement de la manifestation
La manifestation a débuté par les discours de Marlene Hale et Eve Saint, deux représentantes de la nation Wet’suwe’ten. Dans sa déclaration, Hale reprenait les questions qu’elle avait posées au premier ministre Justin Trudeau lors d’une rencontre en 2019 : « M. le premier ministre, que sais-tu du ‘‘Wiggus’’, le mot Wet’suwet’en pour respect ? »
Marlene Hale a par ailleurs accusé le gouvernement fédéral d’avoir pris des décisions sans le consentement des chefs héréditaires, les détenteurs des titres et des droits ancestraux et représentants de la volonté des peuples autochtones. Eve Saint, la fille d’un chef héréditaire, a pris la parole à son tour afin de dénoncer la présence de la GRC à Yintah, le territoire des peuples Wet’suwet’en.
« Shame, shame shame !»
Slogan scandé par les manifestants
À la suite des discours, les manifestants ont été guidés par Marlene Hale pour une marche dans les rues de Montréal. L’événement était organisé par la Convergence des luttes anticapitalistes (CLAC). Des représentants du groupe étudiant Fight Back Concordia, de Students for Palestinian Human Rights McGill (SPHR McGill) et de Divest McGill étaient également parmi la foule.