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Manifestation pro-palestinienne 

L’adoption d’une politique par l’AÉUM est contestée par la direction.

Sonia Nouri | Le Délit

Le 21 mars dernier, la Politique de solidarité avec la Palestine a été approuvée au référendum d’hiver 2022 par le corps étudiant mcgillois avec 71,1% des voix. La Politique en question engagerait l’Association Étudiante de l’Université McGill (AÉUM) à reconnaître « le système colonial israélien contre la Palestine » et à dénoncer que « l’Université McGill investisse et collabore étroitement avec plusieurs institutions complices d’un système d’apartheid colonial ». Le plan est proposé par les Étudiant·e·s de McGill en solidarité pour les droits humains palestiniens (Students for Palestinian Human Rights, SPHR). À la suite de l’annonce de l’adoption de la Politique, le groupe SPHR a souligné la nature historique du vote sur Facebook : « Nous exhortons tous les étudiants à s’inspirer de cette campagne victorieuse pour s’engager davantage sur le plan politique, non seulement avec SPHR, mais aussi avec d’autres communautés anticoloniales et de justice sociale sur le campus », peut-on lire dans un communiqué du 22 mars dernier. 

Le même matin, un jour après les résultats du référendum, le président de l’AÉUM Darshan Daryanani a reçu un avis de défaut de Fabrice Labeau, premier vice-principal exécutif adjoint (études et vie étudiante). Celui-ci signalait que la Politique irait à l’encontre « d’une condition présente dans le protocole d’entente », la convention entre l’AÉUM et l’Université. Selon le communiqué, la Politique serait « inconstitutionnelle et discriminatoire » sans donner de justificatifs précis. L’article 12.2 du protocole d’entente indique que « la partie défaillante, après la réception d’un avis de défaut, dispose de 30 jours pour remédier à ce dernier ». 

Deux jours plus tard, le 24 mars dernier, Fabrice Labeau a envoyé un courriel intitulé « Résultat du référendum de l’AÉUM » à l’ensemble de la communauté mcgilloise en expliquant que le plan empiéterait sur le nouveau programme d’examen et de prévention de l’antisémitisme et de l’islamophobie de l’Université McGill. Cette initiative, annoncée le 21 mars dernier, vise à « maintenir une communauté universitaire ouverte et inclusive [et représente] un travail de tous les instants qui interpelle chacun d’entre nous », selon le courriel envoyé par Christopher Manfredi, vice-principal exécutif et vice-principal aux études. Le communiqué de Fabrice Labeau a ensuite souligné que la Politique de solidarité avec la Palestine créerait « une culture d’ostracisme et d’irrespect » et donnerait « le sentiment à des membres de la communauté de ne pas être à leur place sur nos campus ». 

« Si l’administration semble autant affolée par une revendication démocratique d’action pour la condition palestinienne, je me dis que notre activisme porte ses fruits » 

Jeanne*, membre de SPHR

Lorsque Jeanne*, membre de SPHR, a lu le courriel du v.-p. exécutif adjoint, elle était « bien sûr outrée, mais pas tant surprise », puisque « McGill nous prouve constamment qu’elle est déconnectée des réalités étudiantes et que ses intérêts capitalistes et libéraux passent avant la démocratie étudiante », a‑t-elle expliqué. 

Le 25 mars dernier, en réaction au courriel de l’administration, les membres de SPHR ont organisé un rassemblement d’une cinquantaine de personnes devant le Pavillon James, siège de l’administration. 

Déroulement de la manifestation 

Entourée d’une foule brandissant des drapeaux palestiniens, une membre de SPHR a débuté la manifestation en affirmant que l’adoption de la Politique de solidarité avec la Palestine est avant tout une victoire pour SPHR, mais aussi pour tous· les étudiant·e·s pro-palestinien·ne·s. Par la suite, deux autres membres du groupe SPHR ont exprimé leur frustration vis-à-vis de l’administration et ses « nombreuses tentatives de réduire au silence, de censurer et de réprimer les voix des étudiants palestiniens et pro-palestiniens sur le campus ». 

La parole est ensuite passée à des étudiant·e·s de confession juive qui ont lu à voix haute une lettre ouverte adressée à Fabrice Labeau, exprimant leur déception vis-à-vis de l’administration mcgilloise pour avoir insinué que la Politique ciblerait l’identité juive alors que ce n’est pas le cas. Les deux étudiant·e·s ont exprimé leur solidarité avec la Palestine.

Pendant la manifestation, l’ancien président de l’AÉUM, Bryan Buraga, et le président actuel, Darshan Daryanani, ont également pris la parole afin de partager leurs expériences et les difficultés de communication avec l’administration de McGill au sujet de la Palestine. Buraga a avancé que « la menace qui existe présentement n’est pas la dissolution de l’AÉUM, mais porte plutôt sur l’indépendance et l’autonomie de l’Association comme organisation étudiante ». Daryanani a quant à lui affirmé que l’AÉUM allait faire tout son possible pour « défendre le processus démocratique ». 

Après les discours, la foule a commencé à scander le slogan « le campus nous appartient ».

La manifestation s’est close dans une ambiance de célébration avec une performance de la dabkeh, une danse traditionnelle de groupe dans la culture palestinienne.

*Nom fictif


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