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Deux temps, trois mouvements

Les BJM ouvrent la 26e saison de Danse Danse avec Essence.

Juliette Elie | Le Délit

C’est soir de fête au Théâtre Maisonneuve ! En plus d’être l’année des 60 ans de la Place des Arts, 2023 est également celle des 50 ans des Ballets Jazz de Montréal ! À l’occasion de l’ouverture de la 26e saison de Danse Danse, diffuseur associé à la Place des Arts, les Ballets Jazz de Montréal (BJM) ont présenté pour la première fois leur spectacle Essence, un triptyque contemporain. Dans ce spectacle d’ouverture annonçant une saison solide et innovante, trois pièces se succèdent : We Can’t Forget About What’s His Name d’Ausia Jones, Ten Duets on a Theme of Rescue de Crystal Pite et Les Chambres des Jacques d’Aszure Barton.

We Can’t Forget About What’s His Name d’Ausia Jones

Les rideaux s’ouvrent sur sept danseurs alignés sur la scène plongée dans la pénombre. « Just relax », nous répète l’enregistrement audio qui remplit l’espace sonore. À travers les sept interprètes, les éclairages épurés, colorés et porteurs de sens, et la musique électrisante de Jasper Gahunia, Stephen Krecklo & William Lamoureux alias Earth Boring, on explore l’univers d’Ausia Jones. Dans cette création, la jeune chorégraphe et interprète aux BJM unit groove et contrepoint, dans une chorégraphie qui donne envie de se mettre à danser soi-même. Parfois, quelques mouvements de danse classique ponctuent la chorégraphie, ce qui est moins intéressant, puisque cela s’est souvent déjà vu ailleurs. La chorégraphie aurait peut-être été ressentie comme plus personnalisée et originale sans ceux-ci.

Ten Duets on a Theme of Rescue de Crystal Pite

Une douzaine de projecteurs sur pied, placés en demi-cercle, créent un espace restreint au centre de la scène. Ils s’allument quelques-uns à la fois, à des angles variés, composant ainsi des ambiances très différentes les unes des autres. Comme le titre l’indique, cette pièce est une succession de couples de danseurs. À chaque duo, on a l’impression d’entrer dans une toute nouvelle histoire. Les tableaux sont installés rapidement par les danseurs, et les spectateurs y sont immédiatement plongés. Personnellement, c’est la pièce qui m’a le plus touchée. Les mouvements sont recherchés, la gestuelle parlante. Tout est réduit à l’essentiel et on ressent tout en grand. Il n’y a parfois même pas de comptes – ces repères temporels dans le rythme de la musique –, les danseurs se coordonnant uniquement avec des repères visuels. On reconnaît la signature de la chorégraphe renommée, et directrice artistique fondatrice de Kidd Pivot, dans chacun des duos et dans les liens qui les unissent.

Les Chambres des Jacques d’Aszure Barton

C’est nulle autre que La Danse à St-Dilon de Gilles Vigneault, qui nous accueille dans cette troisième et dernière partie du triptyque. Aszure Barton construit ce qu’on peut comparer à un film choral dansé. Sur des musiques classiques fortes en émotions, chaque danseur interprète un personnage. Chacun a sa manière d’interagir avec les autres, et chacun est soumis au mouvement et à ce que le mouvement crée en sa personne. Par exemple, le personnage de la danseuse Astrid Dangeard pousse un cri inattendu pendant la pièce. L’interprète a par la suite expliqué, pendant la période de questions après le spectacle, que son « personnage n’a pas d’autre choix que de crier à ce moment-là ». Un petit point faible de la chorégraphie est l’ajout de mouvements acrobatiques dans quelques séquences. Cela n’apporte rien de vraiment sensible à l’histoire, déjà complète sans ces démonstrations de capacités techniques. Enfin, les costumes, mis au goût du jour pour l’occasion, complètent subtilement l’ambiance de chaos contrôlé de la pièce, par des touches de bleu dans la masse de tissus aux couleurs chaudes.

Un triptyque tissé serré

On sent que les trois pièces dialoguent entre elles, par la mise en valeur des danseurs avant tout. Les pièces d’Aszure Barton et de Crystal Pite, revisitées pour l’occasion, accompagnées d’une création de la relève, soit celle d’Ausia Jones, racontent l’histoire des BJM, tout en amorçant l’écriture d’un nouveau chapitre. C’est ce que la directrice artistique, Alexandra Damiani, souhaitait réaliser. Pendant la période de questions après la représentation, cette dernière a expliqué n’avoir jamais eu en tête de bâtir un spectacle uniquement avec des chorégraphes féminines. Elle a seulement cherché à valoriser les danseurs, et par hasard, les trois pièces choisies étaient chorégraphiées par des femmes. En somme, la 26e saison de Danse Danse commence en force avec ce premier spectacle, autant par ses mises en scène captivantes que par la mise en lumière du vocabulaire gestuel distinctif de chaque chorégraphe.

Essence des Ballets Jazz de Montréal a été présenté au Théâtre Maisonneuve du 27 au 30 septembre 2023. Le prochain spectacle de la saison de Danse Danse, Past Rooms de Skeels Dance, accueillera le public du 17 au 21 octobre à la Cinquième Salle de la Place des Arts. 


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