Aller au contenu

Tour du monde avec Le Délit

Les éditrices du journal vous racontent leurs histoires de voyage.

Rose Chedid | Le Délit

Les réminiscences de voyage vont au-delà des simples souvenirs et font naître bien plus que des sourires nostalgiques. Notre esprit tout entier est plongé dans une douce épopée vers le passé, qui nous ramène là-bas avec une telle force que nous perdons nos repères et sommes transportés par notre pensée volatile. Les souvenirs de voyage, c’est la force du moment, ce qui nous lie à notre passé, et ce qui nous offre un aperçu de notre évolution personnelle. Les réminiscences d’un voyage, c’est la beauté. Celle d’un temple grec ou d’un bout de plage croate, celle d’un glacier de Patagonie, des marmonnements d’excuse d’un Tokyoïte ou de l’ambiance chaleureuse d’un café new-yorkais.

Outre ces pérégrinations poétiques, le voyage détient une force unique : celle de profondément nous changer. L’enrichissement de nos opinions, la remise en question de nos habitudes de vie, vestimentaires, alimentaires ou langagières, nos expressions, nos références, en somme, le développement de notre moi, passent grandement par le voyage. Il nous permet de nous décentrer de notre chez-soi, de notre confort, avec une force particulière qui favorise le questionnement profond et la prise de recul. Le voyage remet en perspective nos convictions et nos façons de faire à travers l’observation et l’apprentissage, ces dernières pouvant parfois être brutales et saisissantes, à un tel point qu’on en ressort souvent changé à jamais, équipé de souvenirs inoubliables.

Le voyage, c’est la mémoire, certes, mais c’est aussi l’instant présent, ainsi que l’avenir. Au vu de son impact, il est important de garder en tête que le voyage est un privilège hors du commun. Il est différent pour chacun d’entre nous, c’est pourquoi nous avons décidé de compiler quelques anecdotes et photos de voyage des éditeur·rice·s du Délit. Nous espérons vous permettre de voyager à travers nos yeux, à travers nos souvenirs, de vivre une aventure qui vous permettra sûrement de vous replonger également dans le bonheur du voyage, avec ses surprises et ses émotions, dans sa grandeur et sa perfection.

LE MAROC AU TRAVERS DES YEUX DE LAYLA

Layla Lamrani | Le Délit
Layla Lamrani | Le Délit
Layla Lamrani | Le Délit
Layla Lamrani | Le Délit

EMA, SAGE-FEMME DE TORTUES

Ema, Coordonnatrice Réseaux : L’été passé, j’ai été bénévole dans un projet de conservation des tortues de l’océan Pacifique au Costa Rica. C’était situé dans une ferme qui s’appelle Finca Ganadito. C’était ma première patrouille de nuit : on marchait en groupe de cinq personnes sur la plage, dans le noir, avec des lampes frontales, puis on essayait de détecter s’il y avait des nids de tortues ou des tortues qui pondaient leur œufs, pour les prendre et les mettre dans un sanctuaire spécialisé. Là-bas, le vol d’œufs de tortues est vraiment commun. C’est ce que les locaux appellent des « bandits », qui s’emparent des oeufs et les revendent au marché noir, souvent avec des connexions aux cartels de drogue. Soudainement, au loin, on a vu une sorte de boule noire sortir de l’eau. À ce moment-là, tout le monde s’est dit : « Oh mon dieu, une tortue ! » C’était une tortue particulière, appelée « tortue olivâtre ». On a alors commencé à s’approcher tranquillement, et on s’est aperçu·e·s qu’elle était en train de faire son trou. Un professionnel qui nous accompagnait a expliqué qu’elle se préparait à pondre des œufs. À partir de ce moment-là, notre mission était de récupérer les œufs, prendre des mesures, et les mettre dans un sac pour les ramener au sanctuaire. Notre « professeur » nous a tous regardé·e·s, et nous a dit : « OK, Ema, ce soir, tu vas être celle qui va attraper les œufs, puis les mettre dans le sac ». J’étais très stressée. J’ai mis les mains dans le trou, puis j’ai commencé à compter les œufs. Ils étaient très fragiles, et sont extrêmement précieux pour les tortues. J’ai commencé à compter « 1, 2, 3 … » et je me rends à 87. Je ne m’y attendais tellement pas ! 87 œufs en environ 15 minutes ! Quand la tortue a terminé sa ponte, on a reculé, et on l’a laissée repartir dans l’eau. Je ne réalisais toujours pas ce qui s’était passé, c’était tellement magique. C’était honnêtement un moment merveilleux. Je ne sais pas comment le décrire exactement, mais je recommande fortement cette expérience. Cependant, il faut le faire dans les bonnes conditions, être encadré·e et le faire dans un contexte éthique. Ça m’a vraiment marquée. C’est quelque chose que j’ai partagé avec des étrangers, mais grâce à ça, on est tous liés. C’était tout simplement fou.

DOMINIKA À DEUX DOIGTS D’ÊTRE SANS PASSEPORT

Dominika, Photographe : J’étais en backpacking solo et j’ai pris un Flixbus de nuit de Zagreb pour me rendre à Varsovie. Vers cinq heures du matin, le chauffeur annonce qu’on va prendre une pause de 10 minutes à une gare routière se trouvant sur le chemin. J’avais très faim, donc j’ai décidé d’aller m’acheter quelque chose à manger au dépanneur de la gare. Il y avait une petite file, et je commençais à trouver ça un peu long, mais j’avais cru voir au loin quelqu’un qui ressemblait à mon chauffeur donc je me suis dit que ça allait. Je paye mes courses et lorsque je sors de la gare, je ne vois plus mon autobus où il était stationné lorsque je l’avais quitté. Je regarde autour en panique et je vois l’autobus vert fluo qui roule vers la sortie du parking souterrain, à une cinquantaine de mètres. Je me mets à sprinter avec mes lacets détachés. Arrivée côte à côte avec l’autobus, celui-ci ne s’arrête toujours pas. Sans penser, je lance de toutes mes forces la canette de breuvage que je venais de m’acheter sur la portière, et l’autobus finit par s’arrêter. J’ai failli me retrouver au milieu de nulle part sans mon sac à dos, et donc, sans tous mes biens essentiels pour le reste de mon voyage.

SOUVENIR D’AURORES BORÉALES DE CAMILLE

Camille, Coordonnatrice de la production : En 2019, j’ai eu la chance de partir en colonie de vacances en Finlande. J’avais 16 ans et je rêvais depuis toute petite de voir des aurores boréales. Pendant le séjour, nous sortions plusieurs fois chaque soir pour surveiller le ciel, mais sans succès, puisqu’il restait couvert de nuages pendant la nuit. Les animateurs nous préparaient donc à devoir retourner chez nous, sans avoir pu apercevoir les belles traînées vertes dont tout le monde rêvait. Ce n’était pas facile de se dire que seuls quelques nuages nous séparaient peut-être de ce spectacle. Nous étions arrivés en Finlande le samedi et ce n’est que le jeudi soir, un peu après 23 heures, alors qu’on était tous couchés prêts à dormir, que quelqu’un a crié dans le couloir du chalet qu’il fallait s’habiller. En plus d’être dégagé, le ciel commençait à être vert. C’est devenu l’une des plus belles nuits de ma vie. Malgré la température glaciale, j’ai passé plusieurs heures couchée dans la neige à regarder les aurores boréales danser au-dessus de moi et changer de couleur en quelques secondes. Elles étaient bien plus impressionnantes que tout ce que j’avais souhaité, c’était vraiment magique.

Camille Matuszyk | Le Délit

BÉATRICE DANS UN TOUT-INCLUS MEXICAIN

Béatrice, Coordonnatrice de la correction : Quand j’avais à peu près 12 ans, j’ai été au Mexique avec ma famille passer une semaine dans un tout-inclus. Ma soeur et moi voulions nourrir les coatis (une espèce de raton laveur méxicain) qu’il y avait sur le site, et nous avions jugé que leur donner les bananes que nous subtilisions du buffet le matin était un choix judicieux. Un matin, on sort deux bananes et on commence à nourrir un coati, qui semblait heureux de recevoir un tel traitement. Rapidement, plusieurs autres coatis émergent des buissons avoisinants et on se retrouve embusquées assez vite. Ceux-ci étaient également plus agressifs que le premier, tentant de grimper sur les jambes de ma sœur pour qu’elle les nourrisse. On se rend bien vite compte que c’est maintenant une horde de ratons laveurs mexicains qui nous entoure. Je hurle à ma sœur : « Lance la banane ! Lance la banane ! » Heureusement pour nous, on a été épargnées.

LA FROUSSE SRI LANKAISE DE JEANNE

Jeanne, Éditrice Opinions : Durant mon voyage au Sri Lanka, j’ai été témoin d’un événement des plus choquants : le quasi-décès d’une dame. Pour voyager de ville en ville, il est commun de prendre le train. Ces trains sont assez particuliers, puisqu’ils offrent des vues incroyables sur les paysages verts sri lankais. Pour beaucoup, il s’agit aussi d’une opportunité photo à ne pas manquer. Il est important de noter que ces trains ont aussi comme caractéristique que leurs cabines ne sont pas dotées de portes coulissantes comme les trains que nous connaissons. Imaginez-vous donc que plusieurs touristes entreprennent des cascades peu recommandées pour obtenir la photo parfaite. C’est ainsi qu’une touriste suédoise munie d’un selfie-stick a entrepris une manœuvre dangereuse, où son corps se trouvait complètement hors de la cabine, à laquelle elle restait accrochée à une main. Comme vous pouvez vous l’imaginez, la pauvre dame, sous nos yeux, est tombée hors du train. En panique, nous avons enclenché le frein d’urgence. Le train s’est remis en marche peu après, mais sans qu’on revoit la dame. Il fallut quelques jours pour qu’on recroise la dame et son copain, sur la plage, dans une autre ville. Apparemment, elle avait subi une grosse commotion cérébrale et était condamnée à passer quelques semaines de plus ici parce qu’elle ne pouvait pas reprendre l’avion.

LA CHINE VUE PAR ROSE 

Rose Chedid | Le Délit
Rose Chedid | Le Délit
Rose Chedid
Rose Chedid | Le Délit

Dans la même édition