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Chorégraphies théâtrales

Génération Danse captive l’essence de l’adolescence.

Suzane O'Neill

Génération Danse, mise en scène par Sophie Cadieux, reflète les inquiétudes et les troubles associés à l’adolescence. Nous suivons l’histoire d’une troupe de danse composée de six filles et d’un garçon, qui s’apprête à participer à une compétition de danse régionale, espérant gagner une place dans la compétition nationale à Tampa, en Floride. Afin d’atteindre cet objectif, l’équipe se prépare à interpréter une chorégraphie « acro-lyrique » ayant pour thème l’héritage de Gandhi. Bien entendu, seulement une danseuse peut interpréter ce rôle, ce qui suscite des tensions parmi les membres de l’équipe, alors qu’un sentiment de rivalité les envahit.

Au fil de la pièce, nous devenons témoins de l’intériorité des personnages, de leurs désirs et de leurs insécurités, alors qu’ils cherchent à se comprendre les uns les autres et à se démarquer au sein de la troupe. Le texte autopsie le rapport au corps, les apparences physiques, le sentiment d’échec et le regard de l’autre. Chaque monologue interprété par les personnages nous donne un aperçu des pensées intimes et des préoccupations de ces adolescents, qui se sentent incompris et impuissants, malgré un fort désir d’indépendance.

Voir ces adolescents s’exprimer avec autant de passion a suscité l’émoi chez le public : l’adolescence est une période fondatrice de l’existence, ponctuées par des premières expériences caractérisées par leur intensité. Les acteurs parviennent avec expertise à rendre compte de ces émotions, exacerbées par des mouvements théâtraux et des expressions faciales exagérées, frôlant parfois le ridicule. Malgré l’écart d’âge entre les personnages et leurs interprètes – la production a accordé le rôle à des adultes plutôt qu’à des adolescents -, les acteurs conservent une énergie juvénile, mise en évidence durant des chorégraphies dynamiques et effrénées. J’ai trouvé particulièrement intéressants les nombreux monologues qui ponctuent la pièce, au fil desquels les personnages s’adressent directement au public, brisant le quatrième mur. Ces monologues transmettent un sentiment d’angoisse, décuplé par les lumières tamisées et le battement de cœur en bruit de fond, qui contraste avec la tonalité comique de la pièce. Ces moments plus dramatiques incitent ainsi les spectateurs à réfléchir sur les thèmes plus sérieux qu’abordent la pièce.

« l’adolescence est une période fondatrice de l’existence, ponctuées par des premières expériences caractérisées par leur intensité. »

Les membres de la troupe de danse discutent de leurs projets d’avenir, hantées par les spectres de ce qu’elles deviendront inévitablement. Génération Danse nous rappelle les drames de l’adolescence, qu’ils soient majeurs ou insignifiants, et leur impact durable sur l’adulte que nous devenons. C’est dans cette optique que le choix d’avoir des acteurs adultes pour interpréter des rôles d’adolescents devient intéressant : il met en avant cette idée qu’une grande partie de ce que nous sommes en tant qu’adulte est liée à nos expériences vécues en tant qu’adolescent.


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