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Cessez-le-feu entre Israël et le Hamas

Les réactions de la communauté étudiante montréalaise.

Titouan Paux | Le Délit

Après 15 mois de guerre, Israël et le Hamas sont parvenus à un accord pour mettre fin aux hostilités. L’accord, annoncé le 15 janvier, a été approuvé par le gouvernement israélien le 17, et est entré en vigueur le 19. Le premier ministre du Qatar, Mohammed ben Abderrahmane Al Thani, et un partenariat de deux diplomates, l’un envoyé par l’administration Biden et l’autre issu de celle de Trump, ont travaillé ensemble pour atteindre la trêve. Bien qu’une entente ait été trouvée, rien n’empêche les deux parties de faire de nouvelles demandes pendant les négociations à venir, mettant ainsi l’accord en péril. 

Le cessez-le-feu comprend deux phases de six semaines chacune. La première, qui a commencé dimanche, prévoit la libération de 33 otages israéliens et des centaines de prisonniers palestiniens. Parmi les otages pris par le Hamas, 100 personnes demeurent captives à Gaza, dont 35 que le gouvernement israélien croit mortes. Les femmes, les enfants, et les hommes âgés seront libérés en premier. 600 camions transportant de l’aide humanitaire, qui inclut au moins 60 000 demeures temporaires et 200 000 tentes, auront la permission d’entrer à Gaza dès dimanche. Le septième jour du cessez-le-feu, l’armée israélienne retirera ses forces du nord de Gaza, et les Palestiniens déplacés au courant de la guerre pourront y retourner. Le seizième jour, les partis négocieront la deuxième phase, qui doit comprendre des échanges de prisonniers et établir une fin plus permanente aux hostilités. Ce conflit a été déclenché le 7 octobre 2023 lorsque le Hamas, qualifié comme organisation terroriste par plusieurs pays, dont le Canada, a mené une offensive contre Israël, massacrant plus de 1 200 personnes et prenant plus de 250 personnes en otage. Israël a répondu avec force et, selon les autorités palestiniennes, environ 47 000 Palestiniens ont été tués, civils et militants confondus, dont la plupart sont des femmes, des enfants, et des personnes âgées. 

Les conséquences du cessez-le-feu 

Le professeur Rex Brynen, spécialiste de la politique du Moyen-Orient, la simulation de conflits, et le processus de paix Israëlo-arabe, m’a expliqué les raisons pour lesquelles le cessez-le-feu ne s’est produit que maintenant, après tant de négociations sans succès. 

Tout d’abord, les effets de 15 mois de guerre ont commencé à se faire sentir : « Il y a un épuisement considérable chez les deux camps (tdlr) », explique Brynen. « Du côté du Hamas, les morts et les blessés sont nombreux et son soutien parmi les Gazaouis a baissé », tandis qu’Israël « ne peut pas atteindre la victoire totale ». Pourtant d’après le professeur Brynen, cela n’est pas la seule motivation des partis à signer un accord. Donald Trump avait clairement indiqué qu’il désirait la fin de la guerre avant son retour à la Maison-Blanche le 20 janvier, et le professeur Brynen croit que d’une certaine manière, la pression qu’il exerçait était « plus crédible que tout ce que l’administration Biden est parvenue à faire. »

Pourtant, le professeur Brynen estime que le cessez-le-feu est loin d’être stable, en particulier la deuxième phase, dont les détails restent toujours à être négociés. « Quelques membres du cabinet israélien insistent sur une reprise de la guerre après la première phase et la libération partielle des otages », a‑t-il expliqué, puisqu’ils « nourrissent des ambitions d’expulser des Palestiniens du nord de Gaza et y établir des colonies israéliennes.» En effet, le premier ministre israélien Benyamin Netanyahou a affirmé le 18 janvier qu’il considère le cessez-le-feu comme « provisoire » et a déclaré qu’Israël se garde « le droit de reprendre la guerre au besoin, et ce, avec le soutien des États-Unis ». Ce n’est pas encore clair si le président Trump soutiendra une telle politique, ayant lui-même annoncé des conséquences sévères si tous les otages n’étaient pas libérés dès son retour au pouvoir.

Quant au futur gouvernement de la bande de Gaza, tout demeure « peu clair », précise le professeur Brynen. Il considère qu’une administration palestinienne est « le mécanisme le plus logique », avec l’approbation implicite du Hamas et le soutien des organismes internationaux. Or, il est possible que Netanyahou préfère « le chaos » à Gaza, puisqu’un gouvernement plus stable « le contraindrait de mener des opérations militaires à Gaza et soutiendrait l’initiative pour un État palestinien », explique le professeur.

Les réactions des activistes propalestiniens 

Le soir du 16 janvier, des dizaines de manifestants, dirigés par l’association des Étudiants pour l’honneur et la résistance de la Palestine (SPHR), se sont rassemblés devant le portail Roddick de McGill. La foule incluait plusieurs étudiants mcgillois, mais aussi de nombreuses autres personnes de tous âges, venues exprimer leur soutien pour le mouvement palestinien. Une manifestante mcgilloise a appelé l’événement « une expression d’espoir », tandis qu’un autre a remarqué que c’était « trop tôt pour une victoire ». Une autre a souhaité « mettre McGill dans l’embarras » en manifestant.

Après un moment de silence, la foule a commencé à scander divers slogans, dont « la résistance est justifiée », « l’occupation va tomber » et « de la mer à la rivière » entrecoupés de quelques discours. Un des orateurs proclamait que « le gouvernement israélien a été forcé à parvenir à un accord selon les conditions du peuple palestinien ».

« Tout le monde ici est vraiment heureux », a affirmé une représentante de SPHR qui souhaitait rester anonyme, en notant que « le travail n’est pas fini ». Elle a expliqué que « nous n’allons pas arrêter, en dépit du fait qu’il y ait un cessez-le-feu, nous sommes toujours ici », en affirmant continuer à appeler au désinvestissement. Une autre manifestante estime que le mouvement propalestinien « n’est pas transitoire », mais va plutôt s’inscrire dans la durée.

En décembre, après avoir examiné une requête par quelques membres de la communauté mcgilloise, le Conseil des gouverneurs a nié que l’investissement de McGill puisse être accusé de causer « du préjudice social », puisque les liens avec Israël sont indirects. Cependant, la communauté a trouvé cette politique « inadéquate » parce qu’elle compte « fermer les yeux sur les activités néfastes d’un associé ». La requête appelle McGill à désinvestir de toutes les compagnies ayant des liens économiques, directs ou indirects, avec Israël. La représentante de SPHR, qui a relié les investissements de McGill aux milliers de Palestiniens morts à Gaza, espère que le Conseil « prendra cela pour sérieux pendant la réunion à venir ».


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